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Journal Intégration

Étiquette : OHADA

  • OHADA: cap sur Yaoundé pour le 13e concours «Génies en herbe»

    OHADA: cap sur Yaoundé pour le 13e concours «Génies en herbe»

    Ledit évènement se tiendra en marge du 30e anniversaire de l’instance promotrice du droit des affaires.

    La 13e édition du concours «Génies en herbes Ohada» de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires se déroulera à Yaoundé le 26 septembre prochain, suivant le système rotatif décidé pour cet évènement.

    Un colloque international d’une journée sur le droit des affaires est prévu. Il se tiendra le 26 septembre en amont dudit concours, sous le thème «L’Ohada, bientôt 30 ans». Il y sera question d’apprécier les forces et insuffisances de l’Organisation et de dresser ses perspectives. Plusieurs thèmes seront à cet effet abordés notamment, la circulation des décisions de justice dans l’espace communautaire ; les Actes uniformes comme un frein potentiel à l’harmonisation, quand le ver entre dans le fruit ; L’Ohada à l’épreuve de la zone de libre-échange continentale, entre autres.

    Le Prix «Génies en herbes Ohada» met en compétition des équipes de trois personnes issues de quinze pays. Celles-ci s’affronteront autour de deux compétitions, estudiantines et professionnelles. La première catégorie est ouverte aux étudiants en master et aux élèves magistrats en début de formation ainsi qu’aux jeunes avocats. S’agissant de la compétition professionnelle, elle est ouverte à des candidats de mois de 40 ans.

    Louise Nsana

  • Noël Alain Olivier Mekulu Mvondo Akame : «La question de l’évaluation des entités publiques doit être clarifiée»

    Noël Alain Olivier Mekulu Mvondo Akame : «La question de l’évaluation des entités publiques doit être clarifiée»

    Le webinaire organisé par le Cabinet Obiv Solutions le 31 août était l’occasion pour le directeur général de la CNPS de fournir des clés pour l’application des lois de 2017. Entre redéfinition des profils des compétences et évaluation des résultats des entités publiques et de leurs dirigeants, Alain Noël Olivier Mekulu Mvondo Akame partage son expérience.

     

    I/ sur l’effectivité de la réforme
    Astuce 1 : La disponibilité tardive des principaux textes de la réforme
    La CNPS était parmi les toutes premières entités à faire signer ses nouveaux textes, en 2018. L’arrimage tardif ou le non-arrimage des entités publiques aux textes de base peuvent être dûes à une forme de résistance sourde de celles-ci aux nouveaux textes, notamment en ce qui concernent les nouveaux critères de rémunération des dirigeants. Cette réticence, qui n’est pas assortie de sanction, aurait pu être supprimée en réglant la question de la rémunération des dirigeants en conformité avec les principes généraux du droit et l’équité, par exemple en préservant les droits acquis salariaux aux dirigeants en poste ou alors en les nommant à d’autres entités.

    Astuce 2 : La lente disponibilité des outils de gestion requis par la réforme (Plan stratégique, Budget programme, Règlement intérieur du conseil d’administration, Charte de l’administrateur, Fonction d’audit et de contrôle de gestion)
    La CNPS disposait de ces outils avant même les textes de 2017-2019, qui se sont d’ailleurs inspirés de notre architecture de gouvernance.

    En général, outre les compétences indispensables à l’élaboration et la mise en place de ces outils, il convient d’avoir : une vision claire des missions et des objectifs de l’entité ; la ferme volonté des dirigeants de transparence et de conformité dans les pratiques de gestion ; l’engagement total à rechercher les résultats proposés ou définis.

    Astuce 3 : La question des incompatibilités
    La décision ne relève pas de la gestion, mais il n’est pas curieux de s’interroger sur le caractère absolu de cette disposition, dès lors que les textes OHADA l’autorisent, sans dommages apparents.

    II/ sur l’efficacité de la réforme
    Astuce 4 : La difficile question de la qualité des ressources humaines au sein des organes sociaux (en rapport avec les exigences du rôle du Conseil d’administration)

    S’il peut toujours être utile d’avoir les meilleures ressources humaines au sein d’un Conseil d’administration, et a fortiori dans une direction générale, il y a lieu de considérer qu’il s’agit d’une difficulté, non pas lié au caractère discrétionnaire de la nomination, et comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement au regard des pouvoirs constitutionnels du Président de la République dans le fonctionnement des institutions et son autorité en matière de nomination, mais surtout à l’implication et au sérieux que les membres reconnus s’accordant eux-mêmes à l’exercice de leurs responsabilités. La totalité des conseils d’administration sont constitués de hauts cadres représentant divers départements ministériels ou des organismes indépendants… Par ailleurs,

    Il ne faut pas succomber à la tentation illusoire de vouloir définir un profil académique ou technique des membres du Conseil, qui semble revendiquer quelques diplômés académiques ou autres hauts fonctionnaires « mal servis », pour d’autres locataires et aboutissants ; il s’agit d’aborder une instance démocratique chargée de prendre connaissance et de débattre, par confrontation d’idées au besoin, de la qualité des décisions et des résultats obtenus par la direction générale. Le bon sens y suffirait amplement, si le sérieux et l’implication y sont.

    Tout compte fait, c’est dans les résultats que l’on peut apprécier la qualité des dirigeants sociaux et non a priori. D’où l’intérêt ici d’avoir une instance d’évaluation dotée de ressources humaines de qualité indiscutable et de bonne moralité…

    Astuce 5 : La question de l’évaluation des dirigeants et de la performance des entités publiques pas clarifiée
    Il convient, pour les besoins didactiques et de compréhension fondamentale, de distinguer ce qu’on peut appeler l’appréciation des dirigeants et l’évaluation des dirigeants.

    L’évaluation, annuelle et par mandature, du Directeur général est faite, de par les textes et selon les principes généraux en la matière, par le Conseil d’administration et celle du Conseil d’administration par l’Assemblée générale et la tutelle. Toute évaluation autre serait irrégulière et redondante, donc inopportune.
    Par contre, l’appréciation globale ou politique (c’est-à-dire en rapport avec les missions de l’entité et ses interactions avec son environnement socio-économique) est tout autant nécessaire, et devrait s’exercer aussi souvent que possible , chaque fois que ledit environnement évolue ou subit des soubresauts induits ou impactant l’entité). Cette appréciation politique peut comprendre la modification éventuelle des missions, de la composition des organes sociaux voire la suppression pure et simple de l’entité s’il apparaît que son existence n’apporte plus de valeur ajoutée à la société ou détruit la valeur ou pose plus de problèmes (financiers et autres) qu’elle n’en résout (politiques publiques).

    Cette appréciation doit être faite par le politique.
    Il convient de noter ici que « la mutualisation des moyens » entre entités publiques (les surliquides et les moins liquides) n’est ni juridiquement faisable (autonomie de gestion) ni même socialement acceptable ; chacun doit pouvoir compter sur ses efforts de gestion ou l’appui direct de l’État lorsque cela est nécessaire. Sinon, cela pourrait conduire à une « communisation » qui découragerait les efforts de certains au profit des moins performants devenant, par le fait même, des rentiers des performances des autres.

    Par contre, il est absolument impératif de bien définir la notion de performance, qui ne saurait se résumer aux gains financiers, mais bien à la bonne réalisation des missions désignées par l’État et l’atteinte des objectifs fixés.

    Si complément aux textes de 2017-2019 il devrait y avoir, ce serait d’abord à ce niveau. On doit bien accepter qu’il existe des entités publiques qui n’ont pas vocation à gagner de l’argent, mais qui transféreront une mission de service aux populations. Dans ce cas, il appartient à l’État de les subventionner par l’impôt ou des taxes parafiscales.

    D’où la nécessité de fixer et clarifier périodiquement (durée du mandat des dirigeants ou du plan stratégique pluriannuel) les rapports (droits et obligations) entre l’État et ses entités, selon les principes de « parenté » et de responsabilité.

    III/ Sur la gestion stratégique du portefeuille de l’Etat
    Astuce 6: Gestion stratégique du portefeuille de l’Etat peu claire et pas actualisée
    Il est souhaitable en effet, avant toutes autres considérations sans préjudice de leur utilité ou pertinence, de refaire le recensement et l’appréciation de la géographie et de la consistance du portefeuille de l’État. Ceci a la vertu de permettre à celui-ci de focaliser ses moyens (limités) sur les entités publiques à valeur sociale ou économique avérée ; sans duplication, ni avec d’autres entités publiques, ni encore moins des entités privées qui exerceraient dans la même configuration en tenant compte des impératifs sociaux déterminés par l’État.

    IV/ Sur le flou dans le pilotage
    de la réforme
    Astuce 7 : La question de la cohérence dans le pilotage de la réforme
    La création d’un organisme unique chargé d’initier, examinateur et élabore les propositions en vue de la modernisation de l’ Etat dans toutes ses caractéristiques et ses procédures est souhaitable. Pour remplir cette attente, l’entité concernée devrait avoir des missions et des objectifs clairs et évalués périodiquement. Elle ne pourrait pas relever d’une structure interne à un département ministériel, mais surtout posséder, à tous les niveaux de ses composantes, des ressources humaines appropriées et de bonne moralité.
    Cependant, il est bon de noter que la réforme n’est pas un mais en soi, mais un moyen d’adaptation et de performance, toute conception autre, liée notamment à des positionnements personnels ou des avantages de système, reste peu recommandable.

    V/ Sur la cohabitation des logiques marchandes et bureaucratiques
    Astuce 8 : Le sort des outils de gouvernance dans un environnement fortement bureaucratisé
    On a pu observer que les organes de contrôle institués, et paradoxalement une grande partie de l’intelligentsia académique et professionnelle, semble accorder une place visiblement démesurée à la forme ou aux procédures administratives qu’à la recherche ou l’atteinte des résultats induits ou la qualité de service attendue par les populations-cibles. C’est ce qu’on pourrait appeler «le paradoxe du vent», où les dirigeants seraient conspués voire stigmatisés pour avoir violé une règle de pure forme, quittant à présenter des résultats positifs et appréciables, tandis que les conformistes passifs montreraient patte blanche, et même, seraient montrés en exemple… En somme, le vent soufflerait dans un sens contraire à la direction recherchée par les navigateurs.

    Pour la modeste expérience que nous pouvons revendiquer, le simple aménagement et la simplification réelle des procédures permet de réaliser des économies budgétaires substantielles (pouvant parfois se chiffrer à des milliards de francs) et d’enrichir les postes de travail pour un plus grand épanouissement des travailleurs.

    VI/ Sur l’implication des logiques politiques dans les enjeux de
    la
    performance 2017, reste le prototype du vrai faux débat entretenu pour des raisons qu’on peut certes imaginer mais pas loin, dans le meilleur des cas, du besoin du spectacle public des chaises musicales.
    Il est d’abord difficilement compréhensible de rattacher la longévité à un poste à la performance d’une entité publique, les exemples abondants dans un sens comme dans l’autre.

    De plus, au plan strictement juridique, il n’est pas soutenable d’affirmer que la loi de 2017 abrège, le cas échéant, les mandats en cours ; la mesure serait tellement dérogatoire et attentatoire au principe de non-rétroactivité des lois que le signalement aurait dû le préciser dans une disposition particulière, comme il est de bonne logistique.

    Par contre, au regard de la date d’entrée en vigueur de la loi, les mandats pourraient être décomptés de nouveau et, le cas échéant, le dépassement constaté, quoique le principe du renouvellement tacite jusqu’au terme total légal puisse être légitimement admis , et comme on peut le voir, il reste loin du compte à ce jour.
    Quant à la valeur des instructions présidentielles sur le bon fonctionnement des entités publiques, elles gardent toute leur valeur, en application du principe d’adaptabilité immédiate des textes, en anticipation aux modifications formelles approuvées.

    En ce qui concerne les principes d’équilibre régional, de genre, de handicap, etc. il convient de constater qu’il s’agit, pour certains, de concepts qui restent à définir clairement, bien qu’on doive objectivement convenir qu’ ils restent politiquement complexes dans leur application pratique quotidienne, surtout lorsqu’on revendique la performance. Peut-être devra-il un débat général apaisé sur ces questions, afin d’en dégager les aspérités, les non-dits et autres fantasmes de groupes ou individus, il s’agit de questions nationales à très forte sensibilité qu’on ne saurait sans précautions extrêmes, d’autant plus que l’entendement des uns et des autres n’est pas obligatoirement commun et unanime.

    VII/ Sur la relation tutélaire
    Astuce 10 : L’urgence de redéfinir la relation tutélaire
    Je plaide pour l’adoption, l’introduction et la pleine application du « principe de parenté » dans les rapports entre l’État et ses entités infra, notamment les entreprises et établissements publics. L’observation montre qu’il soit entretenue l’idée, fausse, d’une concurrence ou une quelconque rivalité entre l’Etat et ses démembrements, soit au plan personnel, soit au plan organique et institutionnel. Ces entités infra-étatiques sont et demeurent les « enfants » de l’État qui sont donc leur parent incontestable.

    Le principe de parenté implique essentiellement que, d’une part, l’autonomie de gestion qui est accordée par la loi (et donc l’Etat) se justifie uniquement par la volonté de disposer d’instruments de réalisation de missions publiques de manière plus rapide, efficace et efficace. D’autre part, et en vertu de ce but, l’obligation par l’État de soutenir, accompagner et encourager la performance de ces entités. On ne concevrait pas autrement le rôle d’une mère ou d’un père à l’égard de sa progéniture.

    Aussi, les premiers éléments d’évaluation ou d’appréciation d’une entité publique par l’État doivent être de mesurer soi-même le soutien qu’il lui a apporté tout au long de l’année, du mandat ou du plan stratégique pour lui permettre de remplir ses missions et d’atteindre ses objectifs. Les représentants de l’État et ses services spécialisés doivent en être améliorés conscientisés et imprégnés, puis évalués sur cette base irréductible.

    Source : CNPS

  • CCJA-Ohada : Esther Ngo Moutngui aux commandes !

    CCJA-Ohada : Esther Ngo Moutngui aux commandes !

    La magistrate camerounaise a été élue à la Présidence de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage le 26 avril dernier.

    Esther Ngo Moutngui entre dans les annales en tant que premier ressortissant camerounais à occuper les fonctions de président de Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada).

    Par son élection, la récipiendaire grimpe ainsi les échelons dans cette institution où elle a officié durant cinq ans en qualité de juge. Dans sa nouvelle posture, Esther Ngo Moutngui va préparer et présider les audiences tout en gérant le personnel ; car la CCJA jouit des fonctions juridictionnelles, consultatives et arbitrales.

    Esther Ngo Moutngui jouit de 36 ans de formation et d’expérience pratique dans le domaine du droit. Nantie d’un Doctorat en droit privé de l’université unique du Cameroun entre 1982 et 1989, elle intègre à l’Ecole nationale de magistrature de Paris puis, plus tard, l’Institut national des droits de l’homme de Strasbourg en 1999 et l’université de Nottingham en Grande Bretagne en 2007.

    Suivra alors une carrière professionnelle remarquable qui la porte tour à tour au poste de substitut du procureur de la République à Bafoussam et à Mbalmayo, puis comme attachée près la Cour d’appel du Littoral et substitut du procureur de la République près les tribunaux de première et grande instance de Douala et du Wouri. Esther Ngo Moutngui a également travaillé au ministère de la Justice où elle assumé plusieurs fonctions notamment, chef de service de l’exécution des peines, sous-directeur de la législation pénale et sous-directeur des droits de l’homme.

  • Paul Biya à ses compatriotes :  »Dialoguons, ne combattons plus »

    Paul Biya à ses compatriotes :  »Dialoguons, ne combattons plus »

    L’intégralité de l’adresse du président de la République du Cameroun à la nation

    Depuis près de trois ans, les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest de notre pays sont en proie à une crise, qui met en péril la sécurité et le bien-être des  populations qui y vivent, mais à également de profondes conséquences sur l’ensemble de la communauté nationale.

    Cette crise, faut-il le rappeler, est née des revendications corporatistes des Avocats et des Enseignants, qui réclamaient la traduction en langue anglaise des Actes Uniformes OHADA et la préservation de la spécificité du système judiciaire et du système éducatif anglo-saxon dans les deux régions.

    Dès le départ, fidèle à une option qui m’est chère, j’ai instruit l’instauration d’un dialogue entre le Gouvernement et les organisations syndicales en vue de trouver des réponses appropriées à ces revendications. Les mesures qui ont été prises par le Gouvernement à l’issue de ces concertations, sont allées bien au-delà des revendications de départ. Qu’il me soit permis d’en énumérer quelques-unes :

    – la traduction en langue anglaise des textes OHADA a été effectuée. Ces textes sont désormais disponibles dans nos deux langues officielles ;

    – une Section de la Common Law a été créée à la Cour Suprême, afin de connaitre des pourvois formés contre les décisions des juridictions inférieures, dans les affaires relevant de la Common Law ;

    – au plan de la formation des Magistrats, une Section de la Common Law a été créée à l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature. Cette mesure a été accompagnée d’un programme de recrutement des Auditeurs de justice et des Greffiers d’expression anglaise ;

    – par ailleurs, un recrutement spécial d’Enseignants bilingues a été mis en œuvre dans l’Enseignement secondaire ;

    – au plan judiciaire, un arrêt des poursuites a été ordonné en faveur de certaines personnes interpellées dans le cadre de ces revendications ;

    – Une Commission Nationale pour la Promotion du Bilinguisme et du Multiculturalisme  a été créée, afin notamment d’examiner en profondeur l’ensemble des sources de frustrations  de nos compatriotes des régions du     Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

    Par la suite, des décisions ont été prises pour accélérer le processus de décentralisation, avec en prime la création d’un Ministère dédié. Les prochaines élections régionales serviront à parachever ce processus, en permettant à nos compatriotes, sur l’ensemble du territoire national, de participer pleinement à la gestion de leurs affaires au niveau local.

    Mes Chers compatriotes,

    Malgré ces efforts du Gouvernement, des mouvements radicaux, principalement inspirés de l’étranger, ont récupéré et dévoyé les revendications corporatistes. Ils ont ainsi ourdi un projet sécessionniste avec pour but, la partition de notre pays. A cette fin, ils ont constitué et financé des groupes armés qui ont causé un lourd préjudice aux populations des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

    Le monde entier a été témoin des atrocités commises par ces groupes armés : mutilations, décapitations, assassinats des éléments des Forces de Défense et de Sécurité, des autorités administratives et des civils sans défense, destructions des infrastructures et édifices publics, incendie des écoles, des hôpitaux, etc.

    Je voudrais saisir la présente occasion, pour réitérer mes condoléances les plus sincères et celles de la Nation tout entière à tous ceux qui ont perdu des êtres chers dans le cadre de cette crise. J’adresse également un message de réconfort aux blessés et à toutes les autres victimes à divers titres. Je leur donne l’assurance qu’ils peuvent compter sur la solidarité du Gouvernement de la République et sur celle de la Nation tout entière.

    Mes Chers compatriotes,

    Les exactions des groupes armés ont poussé des milliers de nos compatriotes à se réfugier dans les autres régions du pays, voire, pour certains, dans des pays voisins où ils sont réduits à la précarité.

    Face à ces actes intolérables, les Forces de Défense et de Sécurité ont pris des mesures énergiques, souvent au péril de leur vie, pour assurer leur devoir de protection des citoyens et de leurs biens.

    A l’heure actuelle, ces mesures commencent à porter leurs fruits avec l’amélioration de la sécurité et la reprise progressive des activités économiques  dans les deux régions.

    Mes Chers compatriotes,

    Depuis la survenance de cette crise, je n’ai ménagé aucun effort, avec l’aide de Camerounaises et de Camerounais de bonne volonté, pour rechercher les voies et moyens d’une résolution pacifique de celle-ci.

    Dans un souci d’apaisement, j’ai même décidé de l’arrêt des poursuites judiciaires pendantes devant les tribunaux militaires contre 289 personnes arrêtées pour des délits commis dans le cadre de cette crise.

    Dans le même ordre d’idées, j’ai adressé une offre de paix aux membres des groupes armés, en les invitant à déposer les armes et à bénéficier d’un processus de réintégration dans la société.  A cet effet, un Comité National de Désarmement, de Démobilisation et de Réintégration a été créé. Les Centres Régionaux de Désarmement accueillent progressivement de nombreux ex-combattants qui acceptent volontairement de déposer les armes. Nous allons continuer à déployer les efforts nécessaires pour que ce processus soit pleinement opérationnel.

    Au plan humanitaire, j’ai décidé du lancement d’un vaste plan d’assistance à nos compatriotes éprouvés des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. J’ai également créé un Centre de coordination de l’action humanitaire chargé de mettre ledit plan en œuvre. Je voudrais à cet égard, dire merci aux partenaires internationaux qui nous accompagnent dans cette initiative.

    Mes Chers compatriotes,

    Pour expliquer cette crise, il a souvent été évoqué un sentiment de marginalisation qu’éprouveraient les populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Je voudrais à cet égard redire à nos compatriotes de ces régions, mais également à ceux des huit autres régions du Cameroun, que la marginalisation, l’exclusion ou la stigmatisation n’ont jamais inspiré l’action des différents Gouvernements que j’ai formés depuis mon accession à la Magistrature suprême de notre pays. Certes, aucune œuvre humaine n’est parfaite et dans un pays en développement tel que le nôtre, confronté à de multiples défis et ne disposant que de ressources limitées, de nombreux besoins restent encore insatisfaits, dans toutes les régions.

    Fort du soutien massif que vous m’avez accordé lors de la dernière élection présidentielle, je continuerai à œuvrer sans relâche, avec toutes les filles et tous les fils de notre pays, à relever les multiples défis auxquels nous sommes confrontés pour améliorer le bien-être de nos populations, notamment  en matière d’infrastructures, d’approvisionnement en eau et en électricité, de couverture sanitaire et d’emploi des jeunes.

    Mes Chers compatriotes,

    Le 4 janvier dernier, j’ai procédé à un important remaniement ministériel, avec notamment la nomination d’un nouveau Premier Ministre, Chef du Gouvernement. Le choix de ces responsables a, comme à l’accoutumée, été principalement guidé par leurs qualités humaines et professionnelles, leurs compétences et leur expérience. Je voudrais néanmoins souligner que, fidèle à la politique d’équilibre régional que je n’ai cessé de promouvoir, j’ai choisi un Premier Ministre originaire de la région du Sud-Ouest. Son prédécesseur, qui a quant à lui passé près de dix ans à ce poste clé, était originaire de la région du Nord-Ouest. De fait, depuis le 9 avril 1992, les Premiers Ministres, Chefs du Gouvernement, ont été choisis parmi les ressortissants de ces deux régions.

    Malgré cela, certains continueront à parler de marginalisation des populations de ces régions. En fait, il y a lieu de reconnaitre, au plan général, que la nature humaine est ainsi faite qu’il n’y aura jamais assez de postes de responsabilité pour satisfaire toutes les régions, tous les départements, les arrondissements, les villes, villages, familles et citoyens de notre pays. Chaque choix continuera de provoquer de la joie lorsque l’on sera distingué et de la tristesse lorsqu’on ne le sera pas.

    Il est cependant indispensable que nos mentalités évoluent sur ce point. S’il est nécessaire de tenir compte de l’équilibre régional dans des pays neufs, à la structuration sociologique diverse tel que le nôtre, il est indispensable de rappeler que les Ministres et autres responsables ne sont pas nommés seulement pour servir leurs régions, leurs villages ou leurs familles, mais l’ensemble de la communauté nationale. Ils doivent être au service de l’intérêt général et non des intérêts particuliers.

    C’est pourquoi, depuis mon accession au pouvoir, je n’ai cessé et je ne cesserai de mener, avec acharnement, la lutte contre la corruption et les détournements de fonds publics et de promouvoir la bonne gouvernance.

    Mes Chers compatriotes,

    Depuis la survenance de la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, jamais le terme dialogue n’a été autant évoqué, prononcé, voire galvaudé.

    A l’interne comme à l’international, chacun y est allé de ses propositions et de ses suggestions. Certaines d’entre elles réalistes, d’autres nettement moins. Les conseils ont afflué. Certains avisés, d’autres intéressés. D’aucuns se sont même risqués à des injonctions.

    Des initiatives multiples et diverses ont également fleuri. La plupart du fait de personnes de bonne foi, de pays ou d’organisations véritablement soucieux du devenir de notre pays et du bien-être de nos populations. Qu’il me soit permis de les remercier pour leurs efforts et leurs témoignages d’amitié.

    Il y a toutefois lieu de remarquer que la prolifération de ces initiatives s’est parfois malheureusement appuyée sur des idées simplistes et fausses, procédant de la propagande sécessionniste. Il en est ainsi de la prétendue marginalisation des Anglophones, de la persécution de la minorité anglophone par la majorité francophone, du refus du dialogue par notre Gouvernement au bénéfice d’une  solution militaire à la crise ou encore des accusations ridicules de génocide.

    S’agissant du dialogue lui-même, la question s’est toujours posée de savoir, Avec qui ?

    Les nouvelles technologies de l’information et de la communication et notamment les réseaux sociaux ont malheureusement favorisé l’apparition de leaders autoproclamés, d’extrémistes de tout bord essayant d’asseoir leur notoriété par le biais d’injures, de menaces, d’appels à la haine, à la violence et au meurtre.

    Or, tuer des gendarmes ou des civils, kidnapper, mutiler, molester, incendier, détruire des infrastructures publiques, empêcher les enfants d’aller à l’école ou les populations de vaquer tranquillement à leurs occupations n’a jamais été, dans aucun pays au monde, source de légitimité pour représenter ou s’exprimer au nom des populations justement victimes de ces exactions.

    En démocratie, seule l’élection confère une telle légitimité.

    Mes Chers compatriotes,

    Les nombreuses consultations que je n’ai cessé de mener au sujet de cette crise, m’ont permis de prendre la mesure de l’ardent désir des populations des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest de retrouver le cours normal de leurs vies, de pouvoir de nouveau, en toute sécurité, exercer leurs activités économiques et sociales, de voir les réfugiés et les personnes déplacées revenir et les enfants retrouver le chemin de l’école. La récente tournée du Premier Ministre dans les deux régions a permis de confirmer ce sentiment.

    J’ai la ferme conviction, à cet égard, que le moment est venu de mobiliser toutes les forces positives et constructives de notre pays, à l’intérieur comme dans la diaspora, pour que ce désir devienne une réalité.

    C’est pourquoi, j’ai décidé de convoquer, dès la fin du mois en cours, un grand dialogue national qui nous permettra, dans le cadre de notre Constitution, d’examiner les voies et moyens de répondre aux aspirations profondes des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, mais aussi de toutes les autres composantes de notre Nation.

    Le dialogue dont il est question, concernera principalement la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Mais il est évident qu’en cela même il touchera à des questions d’intérêt national, telles que l’unité nationale, l’intégration nationale, le vivre-ensemble, il ne saurait intéresser uniquement les populations de ces deux régions.

    Il aura donc vocation à réunir, sans exclusive, les filles et les fils de notre cher et beau pays, le Cameroun, autour de valeurs qui nous sont chères : la paix, la sécurité, la concorde nationale et le progrès.

    Il s’articulera également autour de thèmes susceptibles d’apporter des réponses aux préoccupations des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ainsi qu’à celles des autres régions de notre pays : le bilinguisme, la diversité culturelle et la cohésion sociale, la reconstruction et le développement des zones touchées par le conflit, le retour des réfugiés et des personnes déplacées, le système éducatif et judiciaire, la décentralisation et le développement local, la démobilisation et la réinsertion des ex-combattants, le rôle de la diaspora dans le développement du pays, etc.

    Présidé par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, ce dialogue réunira une palette diverse de personnalités : parlementaires, hommes politiques, leaders d’opinion, intellectuels, opérateurs économiques, autorités traditionnelles, autorités religieuses, membres de la diaspora, etc. Seront également invités des représentants des Forces de Défense et de Sécurité, des groupes armés et des victimes.

    Tout le monde ne pourra, et c’est compréhensible, prendre effectivement part à ce dialogue, mais chacun aura l’occasion d’y contribuer.

    En amont de la tenue effective du dialogue, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, mènera de larges consultations, afin de recueillir les avis les plus divers, qui serviront de sources d’inspiration pour la conduite des débats. Des Délégations seront également envoyées dans les prochains jours à la rencontre de la diaspora, afin de lui permettre d’apporter sa contribution à ces réflexions sur la résolution de la crise.

    Je voudrais à cet égard en appeler au patriotisme et au sens des responsabilités de tous nos compatriotes de l’intérieur comme de la diaspora pour que chacun, où qu’il se trouve, saisisse cette opportunité historique pour contribuer à conduire notre pays sur les chemins de la paix, de la concorde, de la sécurité et du progrès.

    Mes Chers compatriotes,

    La propagande des sécessionnistes a voulu présenter les décisions de justice récemment rendues à l’encontre d’un certain nombre de nos compatriotes, dans le contexte de cette crise, comme un obstacle au dialogue envisagé.

    Il n’en est rien. Je voudrais d’ailleurs en profiter pour préciser que le respect de la règle de droit et la lutte contre l’impunité constituent les piliers de la consolidation de l’Etat de droit, à laquelle nous aspirons tous. Fouler aux pieds la règle de droit et assurer l’impunité à certains citoyens, aboutiraient à préparer le lit de l’anarchie.

    Il est donc fondamental, à ce stade, de dissiper les rumeurs selon lesquelles, l’on peut tranquillement piller, violer, incendier, kidnapper, mutiler, assassiner, dans l’espoir qu’un éventuel dialogue permettra d’effacer tous ces crimes et assurera l’impunité à leurs auteurs.

    Une telle façon de penser ne peut qu’encourager la perpétuation des violences dans les régions en crise et même en susciter dans les régions où il n’y en a pas, ainsi que nous l’enseigne l’expérience vécue par plusieurs pays dans le monde.

    Il est toutefois vrai que dans le cadre d’un dialogue, d’un processus de paix ou de réconciliation nationale, il puisse être envisagé l’éventualité d’un pardon, dans certaines conditions.

    Il est tout également vrai qu’aux termes de notre Constitution, le Chef de l’Etat est habilité à user d’un droit de grâce.

    C’est d’ailleurs fort de cette habilitation que j’ai adressé, lors de ma récente prestation de serment, une offre de paix aux membres des groupes armés.

    Je voudrais solennellement réitérer en ce jour cette offre. Ceux qui volontairement déposent les armes et se mettent à la disposition des centres de DDR, n’ont rien à craindre. Leurs camarades qui s’y trouvent déjà peuvent en témoigner. En revanche, ceux qui persisteront à commettre des actes criminels et à violer les lois de la République, feront face à nos Forces de Défense et de Sécurité et subiront toute la rigueur de ces mêmes lois. Il en est de même des promoteurs de la haine et de la violence qui, confortablement et impunément installés dans des pays étrangers, continuent à inciter au meurtre et aux destructions. Qu’ils sachent qu’ils devront tôt ou tard rendre des comptes à la Justice.

    J’en appelle justement aux pays qui abritent ces extrémistes. S’ils se soucient réellement de la situation des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, qu’ils agissent  contre ces criminels. La plupart n’ont plus la nationalité camerounaise, mais ils passent leur temps à collecter des fonds pour perpétrer des actes terroristes au Cameroun, à commanditer des incendies, des kidnappings et des assassinats et à lancer des mots d’ordre pour empêcher les enfants d’aller à l’école et les citoyens de vaquer tranquillement à leurs occupations.

    Mes Chers compatriotes,

    La communauté nationale tout entière fonde de grands espoirs sur les assises que je viens d’annoncer. Elle espère y voir l’opportunité pour nos frères et sœurs du Nord-Ouest et du Sud-Ouest de tourner cette page particulièrement douloureuse, d’oublier leurs souffrances et de retrouver une vie normale. Elle espère également voir notre pays poursuivre résolument sa marche vers le progrès, grâce à une réflexion féconde sur les voies et moyens de créer les conditions d’une  exploitation optimale des ressources naturelles et du formidable potentiel humain que recèle notre pays. Nous devons donc tous œuvrer à leur succès.

    Mes Chers compatriotes,

    Au fil du temps, nous avons su tirer parti de notre formidable diversité linguistique et culturelle, du talent de nos filles et de nos fils, de nos efforts et de nos sacrifices méritoires, pour bâtir un pays solide et une Nation forte. Ensemble nous avons relevé de nombreux défis et remporté d’innombrables victoires. Nous avons prouvé que lorsque nous sommes unis,     il n’y a pas de difficulté que nous ne puissions surmonter, d’obstacle que nous ne puissions franchir. Nous l’avons prouvé hier. Nous le prouverons encore aujourd’hui et demain. L’avenir de nos compatriotes du Nord-Ouest et du Sud-Ouest se trouve au sein de notre République.

    Le Cameroun restera un et indivisible.

    Vive le Cameroun !

  • Le droit en Afrique : rapports de force et champs d’opportunités

    Le droit en Afrique : rapports de force et champs d’opportunités

    «Le droit est le souverain du monde», disait Mirabeau. Régissant, codifiant, normalisant l’ensemble des interactions entre les individus, le droit apparaît de plus en plus comme un champ à dominer.

    conomiquement, ses subtilités permettent de structurer, protéger et maîtriser un marché concurrentiel. Utilisé comme un vecteur d’influence à des fins économiques, le droit fait l’objet d’un rapport de force entre deux visions qui s’opposent ou se complémentent, le droit de tradition civiliste francophone et la «Common Law» anglo-saxonne.

    Le développement de l’Afrique a pour originalité de mettre en exergue les velléités propres à un marché, ainsi que les différents moyens de le maîtriser. Le droit en fait partie.

    Prise de conscience et homogénéisation des modèles de gouvernance
    L’attrait des investisseurs pour le Continent a toujours été important. Néanmoins, celui-ci a, pendant longtemps, été freiné par leurs réticences, induites par les problèmes de stabilité politique et économique de certains pays, ralentissant ainsi le développement inclusif de l’Afrique. Le continent africain est depuis quelques années en complète mutation. Celle-ci s’amorce à plusieurs niveaux : politique et sociétal, mais de manière plus importante sur le plan économique. Une prise de conscience s’est effectuée au fil des années, concernant la place de l’Afrique et ses possibilités en matière de gestion des ressources, de développement économique et de modernisation. Les carences en infrastructures stratégiques se sont fait ressentir et ont ainsi accentué la nécessité de modifier les modèles de gouvernance à long terme.

    L’une des réflexions importantes de cette prise de conscience fut la nécessité de se prémunir d’un socle juridique stable et homogène. Elle s’est formalisée par la création de la zone OHADA. En optant pour une harmonisation des pratiques, ses dix-sept membres ont augmenté leurs champs des possibilités, créant de fait une zone d’échange de 9,1 millions de km², offrant une stabilité juridique propice aux investissements.
    Ainsi, les projets d’infrastructures, notamment dans les énergies renouvelables, se sont multipliés, résultants de la convergence entre ambition de développement et intérêts des investisseurs. Dans le cas présent, la régionalisation semble être une solution appropriée, afin d’entamer des mutations favorables au développement du Continent.

    Le droit, outil d’influence et de maîtrise du marché
    Le droit se révèle comme un composant de premier plan dans le mécanisme de concrétisation d’investissements locaux et étrangers. Le marché se structure autour de règles et de normes édictées par le droit appliqué. Ainsi, avoir la possibilité de structurer les règles juridiques, ou a minima les influencer, fait du droit un outil de maîtrise de la concurrence, octroyant par conséquent un avantage compétitif à certaines entreprises. Cette structuration passe par nombre d’éléments, tels que la gestion de la propriété intellectuelle par la réglementation des brevets ou la gestion des normes, qu’elles soient financières, réglementaires ou bien techniques.

    Placés en amont du marché, ces dispositifs juridiques peuvent être utilisés comme leviers afin de concurrencer d’autres entreprises, s’emparer de parts de marché ou bien le maîtriser dans son ensemble. Ce phénomène permet, par ailleurs, d’obtenir un éclairage sur l’implication des cabinets internationaux en Afrique et d’obtenir une nouvelle grille de lecture sur leur rôle et leur importance dans ce processus.

    Bien que leurs actions sur le Continent soient disséquées avec attention — comme ce fut le cas lors de la participation du barreau de Paris à la création d’un organe équivalent au sein de l’OHADA — ils agissent comme de véritables influenceurs. En augmentant la convergence entre standards internationaux et droit local, ils agissent ainsi sur les possibilités de structuration, modification et orientation des systèmes juridiques.

    Karim Bounoi, consultant en intelligence économique

    et analyste en circuits financiers
    Source Tribune Afrique

  • Viviane Ondoua Biwole : Sociétés d’Etat : les oublis gênants des lois de 2017

    Viviane Ondoua Biwole : Sociétés d’Etat : les oublis gênants des lois de 2017

    Viviane Ondon Biwole, DGA ISMP.

    Les lois de 2017 dévoilent en effet d’importantes réserves de pouvoir aptes à hypothéquer l’horizon de performance envisagée

    Le directeur général adjoint de l’Institut supérieur de management public du Cameroun a codirigé l’ouvrage «Lois sur les établissements et les entreprises publics au Cameroun. Innovations et reculades», paru le 20 juin dernier aux Editions Afrédit. Cette passionnée des préoccupations de gouvernance pointe les oublis gênants de ces lois qui pourraient hypothéquer la performance des sociétés d’Etat recherchée par ces textes.

     

    Ne pas reconnaître l’utilité des lois 2017/010 et 2017/011 du 12 juillet 2017 relèverait de la mauvaise foi. Nées de l’abrogation de la loi n°99/16 du 22 décembre 1999 régissant les entreprises et établissements publics, elles consacrent la séparation entre ces deux entités. Elles apparaissent comme une réponse du législateur à l’évolution du contexte marquée par des exigences de performance d’une part et, par les récriminations formulées à l’endroit des entreprises publiques par le Ministère des Finances, le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale relayées par les médias, d’autre part.

    Plus qu’une simple scission, les nouvelles lois matérialisent un engagement pour la performance. Cette option est confirmée par les exposés de motifs des lois. Il y est rappelé que l’existence jumelée des dispositions relatives au fonctionnement des établissements et entreprises publics a induit des confusions qui ont créé des erreurs de gestion. Les lois de 2017 permettent alors de parachever la réforme de ce secteur et faire de ces entités des structures viables et capables de contribuer, de manière significative, à la promotion de l’emploi et à la création de la richesse nationale 1.

    I- Poids des sociétés d’Etat
    L’importance des établissements et entreprises publics s’apprécie aux plans quantitatif et qualitatif. Au plan quantitatif 2, ils représentent au moins 184 entités dont 143 établissements publics (EPA), 28 sociétés à capital public (SCP) dans laquelle l’État détient 100% du capital, 12 Sociétés d’économie mixte (SEM) dans lesquelles l’État est actionnaire majoritaire et 1 administration de sécurité sociale (la CNPS). Aucun secteur ne leur est épargné, du secteur purement public au secteur financier, industriel et commercial.

    Ces entités économiques mobilisent une importante masse financière en termes de budget. En 2015, les 40 entreprises publiques mobilisent 1794,1 milliards, la CNPS 117,2 milliards, les EPA 269,8 soit un montant total de 2181,1 milliards de francs CFA représentant 54,62 % du budget global de l’Etat (3992,6 milliards) de 2015. Cette proportion est suffisamment importante et ne suscite pas l’indifférence au regard des contre performances décriées dans ce secteur.

    Au plan qualitatif, les établissements et les entreprises publics emploient plusieurs âmes. Le rapport du FMI3 évalue cet effectif à plus de 22 000 à la Cameroon Development Corporation, qui est le deuxième employeur du pays, à environ 40 000 personnes dans 17 entreprises publiques. On imagine que les 184 établissements et entreprises publics pourraient employer plus de 200 000 personnes.

    Malgré cette importance, la contribution des établissements et entreprises publics à l’économie, semble mitigée. Les lois de 2017 présentent alors un espoir à plusieurs titres. Elles complètent efficacement le dispositif légal en matière d’arrimage aux directives CEMAC relatives à la gestion des finances publiques et à l’arrimage aux dispositions d’OHADA. En effet, le Cameroun a été longtemps invité à transposer ces dispositions dans la législation nationale. Ces lois prétendent accompagner les entreprises du secteur public sur la voie de la performance.

    Elles préparent également le Cameroun à respecter son engagement pris dans le cadre de l’acte additionnel portant unification4 des marchés financiers qui interviendra au plus tard le 30 juin 2019. L’article 8 de cet acte additionnel stipule que les Etats ont 24 mois à compter du 19 février 2018 (soit le 19 février 2020), pour procéder à une cession partielle ou totale en bourse de leurs participations dans les entreprises publiques, parapubliques ou issues des partenariats publics-privés, notamment dans le cadre de programme de privatisation.

    …les établissements et les entreprises publics emploient plusieurs âmes. Le rapport du FMI évalue cet effectif à plus de 22 000 à la Cameroon Development Corporation, qui est le deuxième employeur du pays, à environ 40 000 personnes dans 17 entreprises publiques. On imagine que les 184 établissements et entreprises publics pourraient employer plus de 200 000 personnes….

    II- Oublis et reculades
    Au final, les lois du 12 juillet 2017 consacrent des avancées importantes, autant en ce qui concerne leur arrimage aux dispositions OHADA qu’aux principes de bonne gouvernance. On regrette néanmoins des oublis gênants et quelques reculades. Leur mise en œuvre et leur efficacité restent alors conditionnées par le contexte institutionnel dont les travers peuvent constituer des freins importants. L’analyse approfondie du contexte institutionnel des établissements et des entreprises publics constitue donc en soi une piste d’analyse à explorer. Les lois de 2017 dévoilent en effet d’importantes réserves de pouvoir aptes à hypothéquer l’horizon de performance envisagée. Sans prétendre à l’exhaustivité, nous évoquons quelques réflexions à entrevoir :

    1. Confiance ou contrôle, que doit- on favoriser ? La perspective disciplinaire privilégiée par les lois de 2017 repose sur 3 postulats : (1) les dirigeants et les actionnaires ont des intérêts divergents ; ce sont des acteurs calculateurs et intéressés; (2) il y’a asymétrie d’information, comportements opportunistes, incomplétude des contrats et donc risque moral ; (3) dans ce contexte, la création et la répartition de la richesse sont conditionnées par les incitations proposées aux dirigeants et le contrôle assuré par les actionnaires. La principale question est donc de savoir comment assurer l’efficacité du système de surveillance et comment choisir celui qui minimise les coûts de contrôle.

    Doit-on maintenir les Conseils d’Administration ou convenir d’un autre mode de surveillance des établissements et entreprises publics ? La surveillance par le Conseil d’Administration a montré ses limites, pourquoi la maintenir ? De même, les lois excluent les autres parties prenantes dans le contrôle des entreprises notamment le personnel et les bénéficiaires. Pourtant leur proximité quotidienne avec les dirigeants de l’entreprise peut en faire des donneurs d’alerte en cas de violation flagrante des règles ou de comportements opportunistes des dirigeants.

    2. Par ailleurs, la perspective disciplinaire annihile toute innovation de la part des dirigeants. Ces derniers exécutent les orientations données par les actionnaires et les tutelles ; ils s’abstiennent de s’en détourner, au risque d’être sanctionnés. Ce qui est contraire aux discours et philosophies de gestion en vigueur marqués par les principes de gestion axée sur les résultats. Les lois de 2017 semblent alors s’opposer à celles de 2007 sur le régime financier de l’Etat qui en est le socle principal. Cette réalité constitue une reculade conceptuelle dont les effets bloquants n’assurent pas l’effectivité des lois de 2017.

    3. Les lois de 2017 restent relativement myopes et privilégient les problématiques de court terme. Elles continuent dans la logique du micro management et des procédures à triple validation (validation du Conseil d’Administration, de l’Assemblée Générale, de la tutelle…). La consécration de la forte hiérarchie empêche d’anticiper sur les enjeux à venir. La plupart des métiers de l’avenir ne sont pas encore connus, les compétences de demain ne sont donc pas maîtrisées par les acteurs d’aujourd’hui, contraindre les dirigeants à des rôles d’exécutants apparaît comme une grave erreur. Ils ont besoin de plus d’autonomie et de marge de manœuvre pour anticiper sur l’avenir, voire l’inventer. Pour cela il faut disposer de bons dirigeants dont le choix n’est pas toujours garanti par la procédure discrétionnaire la plus répandue actuellement.

    4. Comment fabrique-t-on les gestionnaires ? Il est difficile de faire l’économie de cette préoccupation. Avec 184 établissements et entreprises publics, ce sont au moins 2453 dirigeants qui sont conviés à l’œuvre soit 184 PCA, 368 DG et DGA, 61 tutelles (en moyenne 3 entreprise pour une tutelle), 1840 membres des Conseil d’Administration (soit 10 membres en moyenne pour chaque conseil). Il convient de réfléchir au processus de leur désignation dont la qualité pourrait prédire le succès de l’entreprise. Le dire ne s’oppose pas au processus discrétionnaire en vigueur mais contribue à le rationnaliser. L’enjeu étant de capter les meilleurs talents !

    5. L’exigence de disposer de dirigeants talentueux est aussi valable pour le choix des personnels au sein des établissements et des entreprises publiques. Il n’existe actuellement aucune procédure harmonisée et connue pour le recrutement au sein de ces entités. Les recrutements affinitaires ou de nature sociale sont des pratiques qui hypothèquent leur performance. Et pourtant cette préoccupation adresse la question de la création et de la répartition des richesses générées par les entreprises du secteur public. Il s’agit d’un problème de gouvernance sérieux dont il est risqué de faire l’économie. De même, il n’existe pas de missions précises attribuées au poste de Directeur Général Adjoint.

    La fameuse formule la direction générale est placée sous l’autorité d’un Directeur Général, éventuellement assisté d’un Directeur Général Adjoint viole le sacrosaint principe de la division du travail jamais renié dans les théories managériales. D’ailleurs, de l’échange que nous avons avec les DG, plusieurs d’entre eux se passeraient volontiers de leurs adjoints. Les adjoints, à leur tour, se sentiraient soulagés de se départir d’une hiérarchie parfois indifférente et le plus souvent peu collaborative. Ces problématiques et d’autres, autorisent à prolonger le débat sur les conditions d’une meilleure gouvernance des établissements et entreprises publics.

    1. Extrait de l’exposé des motifs de la loi portant statut des établissements publics.

    2. Les données des établissements et entreprises publiques mentionnées ici sont issues du rapport final de l’évaluation

    du système de gestion des finances publiques selon la méthodologie PEFA 2016 et publié en Juin 2017.

    Cette évaluation a été financée par l’Union Européenne et exécutée par ADE SA (Belgique).

    3. Rapport FMI sur les entreprises publiques, mars 2017
    4. Il s’agit de la fusion de la bourse des valeurs mobilières de l’Afrique Centrale

    et la bourse de Douala. Cette bourse a son siège à Douala.