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Étiquette : André Balla
Climatosceptiques, grosse épine dans la chaussure des Cop
La problématique du changement climatique met aux prises deux tendances idéologiques diamétralement opposées: les climato-convaincus et les climatosceptiques. Les premiers sont persuadés que l’action de l’Homme a un impact sur le dérèglement du climat alors que les seconds, capitalistes pour la plupart, défendent le contraire.
À l’issue de la Cop 21, tenue à Paris fin 2015, on croyait les climatosceptiques vaincus que non ! L’arrivée au pouvoir de certaines personnalités leur a donné un nouveau souffle de vie. Avec l’installation de Donald Trump à la Maison-Blanche, les États-Unis, deuxième plus grand pollueur de la planète, sont sortis de l’accord sur le climat conclu lors de la Cop 21. Une décision qui porte un sérieux coup à la réalisation de l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 2 °C.
L’élection de Jair Bolsonaro à la tête du Brésil complique encore un peu plus la situation. Le président brésilien refuse que son pays accueille la prochaine Cop. De même, il ne cache pas son intention de mener une politique agricole plus intensive. Cette orientation pourrait conduire à la destruction de l’Amazonie, considérée comme le plus grand poumon écologique du monde. Et la montée en puissance de l’extrême droite en Europe n’est pas pour arranger les choses.
Contrevérités
Pour convaincre leurs opinions, ces hommes politiques n’hésitent pas à faire recours à la mystification. Le cas le plus patent est celui du président américain. Donald Trump a justifié le retrait de son pays de l’accord de Paris en prétendant que des chercheurs de l’Institut de technologie du Massachusetts (MIT) avaient soutenu que la responsabilité de l’Homme dans le dérèglement du climat n’est pas aussi déterminante. Or, le directeur du programme de recherche sur le changement de cette institution a toujours affirmé qu’aucun chercheur du MIT n’avait eu de contact avec la Maison-Blanche.Pour soutenir la démarche des autorités américaines, l’impact que l’accord de Paris pourrait avoir sur l’augmentation de la température du globe est minoré. Pour les climatosceptiques, même si cet accord est intégralement mis en œuvre, en totale conformité par tous les pays, cela ne produirait qu’une réduction de 0,2 degré par rapport à la hausse prévue d’ici 2100. Avant la Cop 21, les experts de l’Onu, en charge des questions climatiques, estimaient pourtant que la température augmenterait de 4 à 5 °C si rien n’est fait d’ici 2100. Mais si tous les pays signataires respectent leurs engagements, elle sera contenue entre 3 et 4 degrés.
Guerre de théories
Néanmoins, ce courant de pensée a ses scientifiques. Ils sont prix Nobel, chercheurs, lauréats de nombreux prix, auteurs d’articles majeurs. On peut par exemple citer Tim Ball, Ph. D. en climatologie, ancien professeur à l’université de Winnipeg au Canada. Il rappelle les faiblesses des modes de mesure de la température, et l’absence de fondement scientifique à la théorie liant émissions de CO2 et réchauffement climatique. « Ce qui menace la planète, ce n’est pas le réchauffement climatique, mais les politiques économiques stupides qui pourraient en dériver, poussées par des politiciens en quête d’une bonne cause », tance pour sa part Gary Becker, prix Nobel d’économie, professeur à l’université de Chicago.En réaction, les climato-convaincus pointent la récurrence et la violence de certains phénomènes à l’exemple des incendies à répétition en Europe et aux États-Unis (comme récemment en Californie), des cyclones qui frappent les Caraïbes et l’Asie du Sud-est, l’avancée du désert et l’augmentation du niveau de la mer. Cette réalité, de plus en plus difficile à nier ou à contester, pousse certains climatosceptiques à plus de circonspection. Mais ce n’est pas encore assez pour faire changer d’avis au président Trump et donner une chance à l’accord de Paris sur le climat.
André Balla
Politique climatique : comprendre la Cop
La Cop, ou conférence des parties, dérive de l’acronyme anglais (conference of the parties). Elles sont nées en 1992, au cours de la rencontre de 178 pays, lors du sommet de la terre de Rio De Janeiro au Brésil.
Elle est encore appelée Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNCC), ayant pour objectif de reconnaitre que c’est l’homme qui est à l’origine de ce changement climatique. On établit alors, les droits et les devoirs de chaque pays en matière d’environnement lors de cette conférence. Mais il est dit que les pays développés doivent prendre la responsabilité de trouver une issue à ce problème, car ces pays sont les plus grands pollueurs de la planète. Ainsi, cette conférence s’est tenue pour la première fois à Berlin, dans la capitale allemande, en 1995. On y a fixé les objectifs chiffrés en matière d’émission des gaz à effet de serre pour chaque pays ou régions. Rendus à ce jour, nous sommes à la 24e Cop qui se tient actuellement à Katowice en Pologne.
De manière générale, l’objectif primordial de cette organisation onusienne est de réduire les émissions de gaz à effet de serre (ce sont des composants gazeux qui bloquent le rayonnement infrarouge émis par la surface terrestre et contribuent à l’augmentation de leurs concentrations dans l’atmosphère terrestre). Ces changements climatiques sont provoqués par l’utilisation des énergies fossiles (pétrole), les gaz naturels, la déforestation, l’élevage et l’agriculture intensive. Pour ce faire, les phénomènes naturels entrainent l’implication des actions humaines, qui conduisent au réchauffement climatique. Par conséquent, cela provoque des effets néfastes sur l’environnement, à savoir : le dérèglement des saisons, l’augmentation du niveau de la mer et l’avancée du désert, l’augmentation des températures. Tous ces dérèglements impactent sur les activités humaines à l’instar de l’Agriculture.
La Conférence des parties est une rencontre qui se tient une fois par an dans une ville choisie, sous l’égide des Nations unies. Son rôle est double: – permettre aux États de faire le point et de statuer sur la lutte contre le réchauffement climatique ; – maintenir les efforts internationaux au cours des ans, afin de faire face aux changements climatiques.
Pour y parvenir, la Cop évalue les résultats des mesures écologiques prises par chaque pays, ainsi que l’avancée globale vers les objectifs fixés. C’est pendant la tenue d’un sommet que le lieu et la date de la prochaine conférence sont choisis, avec un agenda bien déterminé.
Parmi les acteurs impliqués dans la Cop, on retrouve tous les pays du monde, les collectivités territoriales, les organisations non gouvernementales et une communauté scientifique (le GIEC) qui est un groupe international d’experts sur l’évolution du climat. Ces derniers jouent un rôle important dans l’implémentation des résolutions de ces problèmes dans le monde ou dans des régions géographiques spécifiques telles que les îles, les montagnes, les écosystèmes marins.
André Balla
En attendant la proclamation officielle des résultats de la présidentielle : Le Cameroun retient son souffle
Le pays est en attente de la publication des résultats de la présidentielle du 7 octobre. En cas de défaite, Paul Biya est-il disposé à quitter le pouvoir? «Nous assistons à une compétition très disputée avec une saine émulation, mais le président sera réélu largement», clamait déjà Grégoire Owona au soir de ce scrutin. Interrogé par la version en ligne du journal français Le Monde, le ministre du travail et secrétaire général adjoint du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) ajoute : «ce sont les Occidentaux qui se lassent rapidement de leurs présidents, mais la chefferie dans la culture bantoue, c’est pour toute la vie. Le chef meurt au pouvoir».
Le message est clair : Paul Biya restera au pouvoir tant que Dieu lui prête vie. Son entourage fait tout pour l’y maintenir : instrumentalisation de la haine tribale, fraudes, intimidations, manipulations autour de l’observation du scrutin… Le régime Biya ne recule devant rien. Maurice Kamto en fait l’amère expérience depuis quelques jours. Le candidat du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) est mangé à toutes les sauces depuis qu’il a revendiqué «sa victoire» le 8 octobre dernier à travers une conférence de presse donnée au siège de son parti à Yaoundé.
Elections
Les autorités de Yaoundé et l’omerta sur les résultats
Pourtant rendus publics à la suite du dépouillement dans chaque bureau de vote, les autorités laissent passer dans l’opinion publique que leur publication est interdite par le code électoral.
Le ministre de l’Administration territoriale Maurice Kamto a relancé le débat sur la légalité de la publication des résultats issus des bureaux de vote au Cameroun. Dès le 8 octobre, le candidat du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) a convoqué la presse et fait cette déclaration: «J’ai reçu mission de tirer le penalty, je l’ai tiré et je l’ai marqué. J’ai reçu du peuple un mandat clair que j’entends défendre jusqu’au bout». Au sein du gouvernement et du Rassemblement démocratique du peuple camerounais et des partis politique alliés, c’est le tollé. Issa Tchiroma Bakary, Paul Atanga Nji et jean Nkuete sont tous sortis pour indiquer que l’agrégé des facultés françaises de droit s’est mis hors la loi.
Pour les ministres de la Communication et de l’Administration territoriale, autant que pour le secrétaire général du comité central du RDPC (parti au pouvoir), l’ancien ministre délégué auprès du ministre de la Justice aurait violé l’article 137 du code électoral. «Le Conseil constitutionnel arrête et proclame les résultats de l’élection présidentielle dans un délai maximum de quinze (15) jours à compter de la date de clôture du scrutin», indique, laconique, cet article. «Se déclarer président élu, c’est s’autoproclamer président de la République en contravention de la loi électorale», estime le politologue Mathias Owona Nguini.
Black-out
Durant pratiquement toute la semaine dernière, c’est ce discours que certains médias ont relayé, obligeant le MRC à réagir. «La sortie récente de Maurice Kamto reste en accord avec la loi», défend Bibou Bibou Nissack. Pour étayer sa position, le porte-parole de Maurice Kamto s’appuie lui aussi sur le code électoral, précisément sur l’article 113. «Immédiatement après le dépouillement, le résultat acquis dans chaque bureau de vote est rendu public», indique cette disposition. Pour le MRC, «revendiquer ces résultats rendus publics n’est pas s’auto proclamer président de la République». «Personne n’est dupe. Et ceux qui essayent de monter cela en épingle savent dans quel dessein ils le font», commente le porte-parole de Maurice Kamto.
Depuis l’élection présidentielle de 2011, le pouvoir de Yaoundé essaie d’imposer un black-out sur les résultats pourtant rendus publics après le dépouillement dans chaque bureau de vote.Quelques mois avant cette élection, la loi portant création d’Election Cameroon (Elecam), l’organe chargé de l’organisation des élections, avait été modifiée. L’article 6 alinéa 2 de cette loi qui disposait que le Conseil électoral «rend public les tendances enregistrées à l’issue du scrutin» avait été supprimé. Depuis, les autorités somment les médias à s’abstenir de publier les résultats, afin de mettre les citoyens devant le fait accompli. Ce d’autant plus que les décisions du Conseil constitutionnel ne sont pas susceptibles de recours.
Nombre d’experts soutiennent pourtant que la publication des résultats ou la revendication de sa victoire ne sont en rien interdites par la loi. «Selon la loi en la matière, c’est le Conseil constitutionnel qui est l’organe chargé de proclamer les résultats d’une élection présidentielle. Mais il n’est pas interdit à un candidat, lorsqu’il a les résultats, de dire qu’il a gagné ou pas». Les bons usages démocratiques veulent d’ailleurs que les perdants félicitent le gagnant avant la proclamation officielle des résultats. «Si Kamto avait fait cette sortie pour reconnaitre sa défaite. Il aurait été certainement canonisé. Tout le tollé qui a suivi sa déclaration montre simplement que Paul Biya n’est pas prêt à quitter le pouvoir peu importe le verdict des urnes», commente agacé, un sociologue qui dit avoir voté pour Maurice Kamto.
Aboudi Ottou
Election présidentielle
Les chefs de la Mifi redoutent la révolte populaire
Ils ont commis une déclaration vendredi dernier à Bafoussam.
Le chef supérieur Bafoussam remettant la déclaration au préfet Y aura-t-il soulèvement après la proclamation des résultats de la présidentielle ? La question préoccupe les chefs traditionnels du département de la Mifi. Ils se sont réunis vendredi dernier 12 octobre 2018 dans la salle des actes de la Caplami, pour analyser le climat social qui règne au lendemain de la présidentielle dans le département de la Mifi. Sous la conduite de sa majesté Njitack Ngompé de bafoussam, entouré pour la circonstance de ses majestés Moumbe Fotso de Bamougoum, Tale de Baling, Dojo de Bali, Negou de Badin, les chefs traditionnels de la Mifi constatent que le scrutin du 7 octobre s’est déroulé dans la paix, la sérénité et la convivialité sur l’ensemble du territoire national et dans le département de la Mifi en particulier.
Seulement, ils sont préoccupés par le contexte sociopolitique et des déclarations associées à des attitudes de certains camerounais, qui selon eux «sont de nature à troubler notre vivre ensemble, réalité palpable dans notre Mifi, plus qu’ailleurs, et si cher au peuple camerounais». Aussi, ces chefs traditionnels commettent une déclaration qui «condamne énergiquement toute incitation au désordre, à la haine, à la rébellion et/ou à toutes formes de violence qui tendraient à déstabiliser notre pays». Ces chefs traditionnels qui associent les chefs de communautés, les notabilités coutumières et les forces vives du département dans leur démarche «invitent nos populations à dénoncer toutes manœuvres visant à troubler l’ordre public dans notre département, voire dans le Cameroun en général».
Ils en appellent aux Camerounais de garder un esprit républicain, dans l’attente des résultats qui seront proclamés par le conseil constitutionnel. Par ailleurs, ils réaffirment leur attachement à la paix, «aux institutions républicaines et ainsi qu’à ceux qui les incarnent, au sentiment du vivre ensemble afin de continuer à œuvrer pour le développement de notre nation, qui a toujours su se caractériser par sa diversité culturelle, linguistique et religieuse». Après cette rencontre de la salle des actes de la Caplami, les chefs traditionnels et certains de leurs notables et élites se sont déportés aux services du préfet de la Mifi. Ici, ils ont, après avoir dévoilé le contenu de leur déclaration remis copie au préfet. Ce dernier a promis transmettre cette déclaration à qui de droit.
Zéphirin Fotso Kamga
Crédibilisation du scrutin
Que valent les avis des observateurs électoraux
La quasi-totalité des missions d’observation nationales et à grande notoriété internationale ont salué l’organisation de la présidentielle du 7 octobre. En faisant le black-out sur les manquements dénoncés par des candidats en lice.
Les vrais-faux observateurs de Transparency International L’Union africaine, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), l’Institut panafricain d’assistance électorale (IPAE). Voilà quelques-unes des organisations ayant envoyé des missions d’observation au Cameroun à l’occasion de l’élection présidentielle du 07 octobre 2018. Dirigée par l’ancien Premier ministre togolais Artheme Kwesi Ahoomey Zunu, la mission de l’Union africaine conclue que «l’élection s’est déroulée dans un contexte de défis opérationnels, sécuritaires et politiques».
Dans sa déclaration préliminaire du 9 octobre, la mission donne le verdict d’une élection calme, aux procédures pour l’essentiel respectées. Toutefois, les recommandations formulées à la page 9 de ladite déclaration sont de nature à inviter à une réforme de la loi électorale. Il y est proposé l’abaissement de la majorité électorale (18 ans), l’adoption du bulletin unique, l’instauration d’un dialogue politique inclusif, la clarification des circonstances de désistement… La mission exhorte par ailleurs «toute la classe politique ainsi que les candidats, à accepter le verdict des urnes librement exprimés».
Dans la région, la CEEAC et la Cemac dégagent un satisfecit global de l’ensemble du cycle, allant de la campagne au scrutin. Seul bémol au tableau : les violences dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest en proie à une crise sécuritaire depuis deux années. Aucune réaction sur les accusations supposées ou établies de coupures d’électricité et les violences subies par certains scrutateurs dans des bureaux de vote.
Société civile
Les organisations de la société civile (OSC) camerounaise se sont également investies dans l’observation de ce scrutin présidentiel. More women in politics, organisation nationale pour la réinsertion sociale ou les experts judiciaires du Cameroun sont quelques OSC à avoir fourni ce travail pas aisé. Justine Diffo Tchunkam, Coordonatrice de More Women in Politics, interviewée par le quotidien gouvernemental Cameroon Tribune, dit n’avoir «jamais vu un processus électoral aussi bien organisé». La juriste d’affaires, qui a battu campagne pour le candidat Paul Biya, lance un appel à ses «ainés» et «collègues» «qui veulent nous gouverner, en leur qualité d’éducateurs, de formateurs de consciences, à faire preuve d’un patriotisme exemplaire, gage de crédibilité de ce leadership transformationnel».Le 9 octobre 2018, l’organisation dénommée «Observatoire du développement sociétal » dépose une plainte chez le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire de Yaoundé. Le requérant reproche à Maurice Kamto et à Paul Eric Kingue des faits de «sédition d’appel à la haine et au soulèvement populaire». Motus et bouche cousue sur les accusations de fraude électorale formulées par le parti MRC de Maurice Kamto.
Ce qui questionne finalement la crédibilité des missions d’observation. L’affaire de la vrai – fausse observation des élections par Transparency International achève d’enfoncer le clou de la suspicion. «Un récent reportage télévisé présentant des individus décrits comme travaillant pour Transparency International est faux et mensonger». Cette mise au point est apparue sur le site internet de l’organisation le mardi 9 octobre 2018. L’organisation de lutte contre la corruption affirme n’avoir aucune mission internationale d’observation des élections au Cameroun. Cette mise au point faisait suite à la diffusion d’un reportage au journal télévisé de 20h du 8 octobre sur les antennes de la CRTV, la chaine de télévision à capitaux publics.
Pareille forfaiture amène à s’interroger sur le processus d’accréditation des missions d’observation électorale au Cameroun. Sur la CRTV, Raphael Kalfon, Nurit Greenger, Amanda Benzekri, Yamina Thabet et leur compère saluent la transparence, l’afflux des électeurs et les innovations de cette élection au Cameroun. Au même moment, dénonçant de graves irrégularités, des candidats à cette élection saisissent le Conseil constitutionnel pour solliciter l’annulation soit partielle soit totale du scrutin. D’où la demande du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) portant sur «l’ouverture d’une enquête publique sur ces faux agents de Transparency».
Zacharie Roger Mbarga
Lendemains d’élection
Montée en puissance du discours va-t-en-guerre
La violence verbale rythme l’environnement post – électoral au Cameroun. Décryptage.
Au quartier Anguissa de Yaoundé, le 9 octobre 2018. Nous sommes au siège de l’Organisation non gouvernementale «Dynamique Citoyenne». Jean-Marc Bikoko et son équipe procèdent à une «évaluation citoyenne du scrutin du 7 octobre 2018». La presse nationale et internationale est toute ouïe. Face aux journalistes, le point focal du réseau des organisations de la société civile camerounaise décline son constat : «le discours va-t-en-guerre orne l’après-élection au Cameroun». «Porté par Atanga Nji, poursuit l’activiste de la société civile, ce discours est la métaphore de toutes les angoisses du pouvoir en place en proie à un doute existentiel». Vue à partir de la fenêtre de Dynamique citoyenne, cette situation est l’une des causes de la bataille post-électorale au Cameroun. «L’excès de zèle et la dérive autoritaire du ministre de l’Administration territoriale (Minat) à travers des déclarations intempestives et certaines prises de positions maladroites ne résisteront pas sur la durée», postule Jean-Marc Bikoko.
Dans le fond, la communication de ce démembrement de la coalition internationale «Tournons la page» ne s’encombre pas de nuances subtiles. D’autant plus que l’ONG s’appuie sur un élément fondamental : la séquence communicante qui a rythmé toute une soirée télévisuelle au lendemain du vote. Celle-ci montre en effet un Paul Atanga Nji dans un magistère de pédagogie obstinée. Sans concession, irréductible, le Minat déploie une rhétorique frontale, pour sermonner une opposition se revendiquant «d’acier», incarnée par Maurice Kamto et ses lieutenants politiques. Dans la foulée, on se remémore la métaphore menaçante prononcée par le secrétaire permanent du Conseil national de la sécurité le 5 octobre 2018 à Yaoundé: «la révolution est essentiellement carnivore ; elle se nourrit du sang de ceux qui l’ont organisée». Implicitement, la formule est reprise ce 12 octobre 2018 au cours d’une conférence de presse des partis alliés au RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais) dans un hôtel de Yaoundé.
Regards
«La trace du discours va-t-en-guerre se retrouve dans la résonance particulière de chaque mot du Minat», théorise Fabrice Takeudeu. Selon ce linguiste, «ce discours est construit tel que les fantassins devraient courir le plus vite possible vers l’ennemi pour arriver sur lui avant qu’il ait pu recharger». Allusion faite à la sortie du leader du MRC (Mouvement pour la renaissance du Cameroun) le 8 octobre 2018. «Nous avons eu des représentants dans presque tous les bureaux de vote du pays. Les résultats qu’ils ont collectés nous donnent largement en tête», déclare le président du MRC.Si ce n’est pas de l’appel à la guerre civile, ça y ressemble énormément, du point de vue de Paul Atanga Nji, tout au moins. Contre le «tireur de pénalty» et d’autres qui ont l’outrecuidance d’émettre des critiques publiques visant à discréditer le scrutin du 7 octobre 2018. Le langage musclé, verni de quelques formules de rappel à l’ordre, est brandi. Sur ce plan, le troupeau gouvernemental reprend en chœur les mêmes éléments de langage, n’hésitant pas à baigner dans la mauvaise foi la plus complète, comme dans le cas des «observateurs de Transparency International».
«Cette vulgate abusivement répandue donne le sentiment d’être gouvernés de haut, de trop haut», observe Jean-Marc Bikoko. Il ajoute que «prononcés par ceux qui font semblant d’être des parangons de lucidité, les mots durs ferment le ban de la paix». Sur la même veine, le politologue Belinga Zambo déplore : «le discours de domination après une élection lance inévitablement des punchlines qui retombent lourdement sur la popularité de ceux qui le tiennent ; ce discours est porteur pour des dynamiques scandaleuses ou belliqueuses».
A l’observation, un dispositif de rétorsion fait le lit de ces dynamiques. Dans les colonnes du journal français La Croix (édition du 9 octobre 2018), Maurice Kamto note une forte présence sécuritaire autour de sa maison : «il y a un rideau de policiers en civil autour de chez moi et un peu plus loin, un rideau en uniforme», décrit-il. «En érigeant partout des pare feux à la fonction plus provocatrice que dissuasive, dans le camp du gouvernement, il semble que l’heure n’est plus à l’économie comportementale», conclut Belinga Zambo.
Jean René Meva’a Amougou
Intimidations
Les QG de Kamto et Cabral Libii sous haute surveillance
Au lendemain de l’élection présidentielle, des forces de l’ordre ont pris position devant les sièges du parti MRC et du parti Univers.
Devant le QG de Maurice Kamto à Nlongkak Quartier général (QG) de Maurice Kamto à Nlongkak dans le premier arrondissement de Yaoundé. Des forces de l’ordre et des agents de renseignement campent. En tenue pour la plupart, ils intimident en se stationnant en face des bureaux où se tiennent les conférences de presse et le travail d’analyse des procès-verbaux venus des localités reculées. Ce10 octobre, ils seraient mêmes passés à l’offensive. «Hier, lors de la conférence de presse du porte-parole du candidat Maurice Kamto, le bâtiment a été pris d’assaut par la police, la gendarmerie et les services de renseignement. Et même après la conférence, ils ont encore fait plus de trois heures en bas de l’immeuble», raconte un militant ayant requis l’anonymat. Il a fallu que les militants et les autres locataires dudit immeuble sortent des arguments juridiques pour dissuader les bidasses.
Des hommes en tenue sont aussi visibles au QG de Cabral Libii à Nkoldongo, dans le quatrième arrondissement. «Cela ne nous rassures pas», commente un responsable du parti Univers. C’est cette formation qui a investi Cabral Libii comme candidat à l’élection présidentielle du 7 octobre. Afin de veiller les uns sur les autres, les militants et sympathisants qui s’engagent à aller dans les sièges de parti et les QG de leurs candidats informent régulièrement leurs proches de la situation et font un effort de rester en contact avec les autres collègues. D’autres se font tout simplement discrets en attendant la proclamation des résultats.
Dans le même registre des intimidations, le trésorier adjoint du MRC est en détention depuis quelques jours.Il est officiellement reproché à Okala Ebode d’avoir endommagé une urne. Ce que remet en cause le parti de Maurice Kamto. «Okala Ebode, se rendant le 7 octobre dans son bureau de vote à Mvolyé pour accomplir son devoir citoyen, a découvert que quelqu’un d’autre avait déjà voté en son nom. Et son crime est d’avoir protesté», explique Bibou Nissack. A en croire le porte-parole de Maurice Kamto, le MRC le considère désormais comme un prisonnier politique. «La curiosité ici c’est que Maurice Kamto a reçu une fin de non-recevoir lorsqu’il a demandé à rencontrer Okala Ebode.
Il s’est entendu dire : « nous allons référer à notre hiérarchie [entendu le délégué général à la sureté national (DGSN)] ». Le DGSN a fait savoir que lui aussi devait référer à la très haute hiérarchie, à savoir la présidence de la République… C’est la raison pour laquelle nous considérons désormais Okala Ebode comme un prisonnier politique», ajoute Bibou Nissack. Sur le web, une campagne pour sa libération est en cours.
Outre l’arrestation de leur camarade, le parti de Maurice Kamto dit également être sans nouvelles de certains de ses représentants dans les bureaux de votes envoyés dans la région de l’Extrême-Nord. «Dans le temps où les communications sont interrompues, nos représentants ont été pourchassés, retrouvés et les PV en leur possession détruits. Et au moment où nous vous parlons, nous devons avouer que nous avons perdu définitivement le contact avec certains d’entre eux. Nous sommes dans l’impossibilité de vous dire ce qu’ils sont devenus», informe, inquiet, le porte-parole de Kamto.
André Balla, stagiaire
Post scriptum
Je suis Bamiléké…
Je suis est né et j’ai grandi à Douala jusqu’à l’âge de 18 ans.
C’est à cet âge que j’ai pu me rendre au village de mon père, à Foreke-Dschang, tout seul, sans guide. D’ailleurs, mon père, le Bamiléké, n’avait jamais cessé de rappeler à ses enfants, avec ironie, qu’ils sont des Duala. Au fond, c’est ce que nous sommes, mes frères, mes sœurs et moi-même car, peu de personne nous connaissent sur les collines du village de papa et celui de maman. Là-bas, je ne peux gagner une élection. C’est pareil pour mes cousins qui ne connaissent que Bonadibong, ce quartier de Douala, qui est leur pays natal. La seule langue camerounaise qu’ils parlent est le Duala.Quant à moi, je suis un garçon de Bessengue et j’ai fait l’école primaire à Akwa. Mes camarades et amis s’appelaient Bekoko, Ndedi, Ndome, Kingue, Lobe, EbelleNgomba ou encore Ebanda Ngoko. Comment oublier l’élève Pio, qui était non seulement brillant mais aussi très bon dessinateur. Que dire de mes instituteurs, tous exceptionnels sans être des Bamilékés : mesdames Sokol et Ngabena, ainsi que de M. Wanack, pour ne citer que ceux-là. Au secondaire, j’ai été l’éternel deuxième en classe de 6e, derrière Mansourou Sinata Maliki. En cinquième, j’ai certes pris ma revanche, mais Mansourou restait un concurrent sérieux au rang de premier de la classe. Et il n’était pas seul. Il y avait tous les autres camarades non Bamilékés, à l’instar de Mbenoum Njanal ou de Njoh Engome Banimbeck était la benjamine, et de loin la plus brave.
Elle qui, depuis la classe du CM1, décrocha avec brio le concours d’entrée en 6e et le CEPE. Au cours de mes années de lycée, l’un des enseignants à qui je dois l’usage rigoureux de la langue française s’appelle Bekono Aniouzoua. Il eut aussi M. Bissohong, le prof de SVT, qui voulut m’orienter en série D. En classe de première, ma bande de joyeux copains était composée d’Atoume, de Ngo Goi, Ndobo Bassime, Tchoffa et Yemi. J’étais le seul Bamiléké. Nous formions un sacré groupe d’étude, qui obtint 100% de réussite au probatoire puis 50% au baccalauréat. L’année suivante fut la bonne pour les trois recalés. Parti poursuivre mes études à Yaoundé, je suis tombé amoureux du Bikutsi, rythme musical des peuples de la forêt. Moi, l’enfant de Douala, moulé au Makossa. Moi, qui sais peu de chose des rythmes Bamilékés.
Moi qui suis émerveillé par le talent de Charlotte Dipanda autant que par celui de KareyceFotso. Etudiant, je suis si souvent tombé amoureux des filles Bassa’a ; et j’ai fini par vivre une belle histoire. J’ai été martyrisé par plusieurs de ces «Ngo». Mais c’est sans rancune. D’ailleurs j’ai finalement vécu une belle histoire d’amour avec l’une d’elles, sur les bancs de l’université. Jeune journaliste, j’ai découvert avec émerveillement le peuple et la culture du grand Mbam ; et j’ai même secrètement nourri le fantasme d’épouser un jour une de ces « Mbamoises », belles, élancées, intelligentes, généreuses mais caractérielles. Le journaliste que je suis aujourd’hui travaille sans relâche pour tenir la compétition au moins dans ma génération. Je suis admiratif des travaux de Monique Ngo Mayag, Rita Diba, Monica Nkodo, Patricia Ngo Ngouem ou Steve Libam. Encore des non Bamilékés.
Le Bamiléké que je suis vient d’être frappe par le malheur.
Parmi les six personnes venues à domicile me donner du réconfort, il y a Ebah, Tsala, Kenembeni et Ngo Mayag.
Une certaine Nogo est venue également chez moi après mon mariage. Que de non Bamilékés. L’homme que je suis devenu se bat pour que sa progéniture porte les noms de nos héros, de nos icônes au plan national et africain : Um Nyobe, OsendeAfana, Ouandie, Moumie, Mandela, Makeba ou encore Evora. Je ne suis ni le plus intelligent, ni le plus travailleur, ni le plus méritant, ni le plus honnête. Oui je suis Bamiléké par mes origines que je n’ai pas choisies. Mais je suis un banal Camerounais, fruit d’un parcours de vie, d’une trajectoire unique parce qu’elle m’appartient et à personne d’autre.
Chaque Bamiléké est donc unique, comme tout individu l’est d’ailleurs. Il n’existe donc pas un spécimen Bamiléké aux caractéristiques définies, auquel appartiennent toutes les personnes issues ou se revendiquant de ce peuple.
Alors tu as tort Jean de Dieu Momo.Yannick Assongmo Necdem,
chef service politique
au quotidien Le Jour