Home INTÉGRATION RÉGIONALE Des routes impraticables qui contredisent un discours laudatif

Des routes impraticables qui contredisent un discours laudatif

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Une vidéo récemment diffusée montre Guillaume Gbato, ancien journaliste de « Notre Voie », quotidien pro-Gbagbo, circulant à moto sur une route en très mauvais état.

Les images parlent d’elles-mêmes: nids-de-poule, crevasses, chaussée dégradée. Bref, un véritable parcours d’obstacles. Et pourtant, la scène se déroule à Daleu, une zone dont Gbato lui-même reconnaît le potentiel agricole. Selon ses propres mots, Daleu est une région de forte production, où les paysans préfèrent approvisionner la Guinée-Conakry plutôt que Danané, la ville ivoirienne la plus proche à cause du piteux état des routes.

Comment une zone stratégique pour la production alimentaire peut-elle être desservie par de telles routes ? Comment peut-on parler de développement, d’émergence ou de modernisation lorsque les voies d’accès, essentielles à l’économie locale, sont dans un état aussi lamentable ?

Ce contraste est d’autant plus troublant que, quelques mois plus tôt, le même Guillaume Gbato affirmait publiquement qu’Alassane Ouattara travaillait bien, qu’il avait transformé la Côte d’Ivoire et qu’il fallait saluer ses actions positives. Or, ce que montre aujourd’hui sa propre vidéo va exactement à l’encontre de ce discours. On ne peut pas, honnêtement, prétendre que tout va bien sous le régime Ouattara lorsque des routes vitales sont laissées à l’abandon à Danané et dans la région.

Et le problème ne se limite pas à Danané. Tous ceux qui empruntent les axes de l’Ouest et du Centre-Ouest font le même constat amer: routes dégradées, zones entières oubliées, infrastructures essentielles laissées à la merci du temps et des intempéries. Pendant ce temps, de nombreuses routes flambant neuves ont été construites au Nord du pays. Ce déséquilibre pose une vraie question de justice territoriale.

Une discrimination territoriale qui menace la cohésion nationale

Le fait que les routes soient devenues impraticables à l’Ouest et au Centre-Ouest signifie qu’une partie des Ivoiriens est négligée, voire abandonnée. Et cela contredit frontalement l’idée que le chef de l’État gouverne pour tous les Ivoiriens, même ceux qui ne l’ont pas élu.

Gouverner un pays, ce n’est pas favoriser une zone au détriment d’une autre. Ce n’est pas construire des routes dans certaines régions tout en laissant d’autres dans un état digne d’un pays en guerre. Ce n’est pas sélectionner qui mérite le développement et qui doit rester dans l’arrière-cour du progrès.
Cette manière d’agir porte un nom: la discrimination. Une discrimination silencieuse, sournoise, mais bien réelle. Un apartheid qui ne dit pas son nom, où certains citoyens ont accès aux infrastructures modernes, tandis que d’autres sont condamnés à circuler sur des pistes défoncées comme au siècle dernier.

Pourtant, ceux qui gouvernent aiment parler de cohésion sociale, d’unité nationale, de vivre ensemble, de réconciliation. Mais comment bâtir une cohésion durable lorsqu’une partie de la population est privée des fruits de la croissance ? Comment demander l’unité quand l’État lui-même crée de la division dans la gestion du territoire ?
Ce rattrapage ethnique décomplexé, beaucoup d’Ivoiriens le dénoncent. Ils le rejettent fermement et appellent le régime à y mettre fin au plus vite. Car une nation ne se construit jamais sur l’exclusion, jamais sur la marginalisation, jamais sur la punition collective d’un groupe ou d’une région.
Quant à Guillaume Gbato, s’il souhaite véritablement être cohérent avec lui-même, il devrait reconnaître que ce qu’il a filmé dans sa vidéo est incompatible avec les discours laudatifs qu’il tenait quelques mois auparavant. S’il est honnête, il devrait se joindre à celles et ceux qui affirment haut et fort qu’on ne construit pas une nation solide en abandonnant une partie de la population au bord du chemin.
La Côte d’Ivoire mérite une gouvernance équitable.
Elle mérite que chaque région soit traitée avec dignité. Elle mérite que tous ses enfants – du Nord, du Sud, de l’Est, de l’Ouest et du Centre – aient accès au développement.

Jean-Claude Djéréké

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