Le pays vise 2026 pour sortir de la liste grise du gendarme financier international.

Entre ombres et lumières de la conformité, le Cameroun s’accorde un dernier souffle avant l’éclaircie. La sortie de la fameuse liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), d’abord espérée pour septembre 2025, se voit repoussée à fin 2026. Une année supplémentaire pour lever les zones d’ombre, renforcer les contrôles et redonner à la place financière nationale un éclat terni par les lenteurs de la réforme. S’exprimant récemment dans les colonnes du quotidien Cameroon Tribune, Hubert Ndé Sambone, directeur général de l’Agence nationale d’investigation financière (ANIF), le pays a transmis son cinquième rapport de suivi au GAFI.
Ce document, censé marquer l’achèvement du plan d’action convenu, n’a pourtant pas suffi à convaincre l’organisation internationale. Sur les 24 recommandations formulées, 8 seulement ont été jugées « largement satisfaites ». Un score modeste, à peine 40 %, qui traduit à la fois des efforts réels et des résistances persistantes.
Freins
Les difficultés se concentrent sur trois fronts sensibles : la supervision des professions non financières, la régulation des organisations non gouvernementales et la transparence sur les bénéficiaires effectifs. Trois pierres d’achoppement qui exigent des moyens humains et techniques considérables, ainsi qu’une réelle coordination entre les institutions concernées. « Les textes existent, mais la pratique tarde à suivre », confie un banquier de la place, lucide mais inquiet. Être sur la liste grise ne signifie pas sanction immédiate. C’est une surveillance prolongée, un examen minutieux, presque une probation internationale.
Le pays y évolue comme sous un ciel couvert : pas d’orage, mais pas de soleil non plus. Les partenaires financiers étrangers observent, mesurent, hésitent. Les banques correspondantes redoublent de vigilance, les investisseurs se montrent frileux, et les transactions internationales prennent des allures de parcours d’obstacles. « Cette situation pèse sur la réputation du Cameroun, déjà fragilisé par la conjoncture économique », souligne un économiste proche du dossier. Dans un monde où la transparence est devenue la nouvelle monnaie, chaque retard se paie cher. Le pays doit non seulement rassurer le GAFI, mais aussi convaincre les marchés qu’il a tiré les leçons du passé.
Face à ces défis, Yaoundé veut croire à la renaissance de sa crédibilité financière. Le gouvernement promet de renforcer les mécanismes de contrôle, d’améliorer la coopération entre régulateurs et d’intensifier la formation des acteurs impliqués. Les partenaires techniques, notamment la Banque mondiale et l’Union européenne, sont appelés en appui pour accélérer la cadence. Mais au-delà des chiffres, une autre lecture s’impose : celle d’un pays en quête de lumière. Sortir de la liste grise, c’est plus qu’une formalité administrative ; c’est un acte de confiance envers soi-même et envers le monde.
C’est l’ambition de marcher tête haute sur les marchés financiers, sans l’ombre d’un soupçon. « Nous voulons faire du Cameroun une place claire dans un monde de plus en plus exigeant », confie un opérateur financier. Et dans cette promesse, résonne un souffle poétique : celui d’un pays qui veut transformer la contrainte en tremplin, le doute en espoir, et le gris en lumière. Si 2026 tient parole, le Cameroun pourra enfin tourner la page, et écrire, à l’encre claire, le chapitre d’une crédibilité retrouvée.
Jean René Meva’a Amougou




