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Sahara verdoyant… faut-il vraiment s’en réjouir ?

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Le sahara

Et si la pluie tombait demain sur le désert ? Ce scénario, longtemps réservé à la science-fiction, s’impose désormais dans les modèles climatiques les plus sérieux.

Le sahara

Les chercheurs de l’Université de l’Illinois à Chicago l’affirment : le Sahara pourrait recevoir jusqu’à 75 % de précipitations supplémentaires d’ici la fin du siècle. À première vue, la promesse d’un désert qui reverdit semble miraculeuse. Mais l’Afrique, prise entre sécheresse historique et humidité nouvelle, avance sur un fil. Car derrière cette humidification apparente se cache une redistribution brutale des équilibres naturels.

Depuis des décennies, le continent vit au rythme des moussons et des sécheresses, dans un fragile ballet qui régule les récoltes, les migrations et même les conflits. Les simulations récentes montrent que les températures élevées renforcent les flux d’humidité venus de l’Atlantique et de l’océan Indien. Résultat : le nord s’humidifie, le centre se gorge de pluies, tandis que l’extrême sud se dessèche. Ce déplacement des zones climatiques pourrait redéfinir la carte agricole et économique de l’Afrique plus sûrement qu’aucune réforme politique.

Mais derrière les chiffres, une autre réalité s’impose : ce n’est pas la pluie qui sauvera le continent, c’est la manière dont il s’y préparera. Car une augmentation des précipitations ne rime pas forcément avec abondance. Elle peut signifier crues dévastatrices, sols érodés, infrastructures submergées et récoltes détruites. Les modèles annoncent un Sahara plus vert, mais peut-être aussi un Sahel plus instable, un bassin du Congo saturé, un delta du Nil menacé. Autrement dit, un continent où la pluie devient à la fois espoir et menace.

Ce bouleversement met en lumière un paradoxe : alors que le monde redoute la sécheresse, l’Afrique pourrait bientôt affronter l’excès inverse. Les dirigeants du continent ont désormais la responsabilité d’anticiper ce tournant. Urbanisme repensé, stockage des eaux de pluie, politiques agricoles résilientes : il faut investir dans l’adaptation, non dans l’attente. Car la pluie de demain, si elle n’est pas maîtrisée, risque de lessiver bien plus que la poussière du désert : elle pourrait effacer des modes de vie entiers.

L’Afrique n’est pas condamnée à subir le climat ; elle peut en devenir actrice. Les données scientifiques, aussi inquiétantes soient-elles, offrent une chance historique : celle de bâtir une souveraineté écologique. Les courants d’humidité qui se déplacent, les moussons qui se réinventent, tout cela dessine le visage d’un continent en mutation. Encore faut-il que cette mutation soit pensée, concertée et équitable. Alors oui, il pleuvra peut-être sur le Sahara. Mais si cette pluie doit signifier la fin des repères climatiques et humains, la promesse du vert pourrait bien n’être qu’un mirage.

JRMA

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