Home INTÉGRATION RÉGIONALE Cameroun : un complexe pharmaceutique d’un milliard USD pour transformer l’Afrique centrale

Cameroun : un complexe pharmaceutique d’un milliard USD pour transformer l’Afrique centrale

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Instant de pose de la première pierre à Meyo

Le 3 octobre 2025 restera gravé dans l’histoire pharmaceutique du Cameroun. À Meyo, dans la périphérie de Yaoundé, a été posée la première pierre d’un complexe pharmaceutique d’envergure, fruit d’une joint-venture sino-camerounaise, Yicheng Pharmaceutical Group Fabrication Co., LTD, avec un investissement de 530 milliards FCFA (948 millions USD).

Instant de pose de la première pierre à Meyo

Le projet ambitionne de transformer le Cameroun en hub pharmaceutique régional et de répondre à une urgence critique : la dépendance massive aux importations de médicaments.

Situé à moins de cinq kilomètres de l’aéroport international de Yaoundé-Nsimalen, le site de Meyo s’étend sur 5 hectares, avec possibilité d’extension. La première unité de production pourra fabriquer annuellement 100 millions de flacons, 2 milliards d’ampoules injectables et 10 milliards de comprimés, couvrant environ 100 références pharmaceutiques essentielles.

Cette capacité vise à stabiliser l’offre locale tout en répondant à la demande croissante de la zone CEMAC, qui regroupe Cameroun, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, Tchad et Congo. « La localisation proche de l’aéroport est un atout logistique majeur », note Mme Solange Tchoumi, experte en politique de santé publique. « Elle facilite l’importation des matières premières et la distribution rapide des produits finis dans l’ensemble de la sous-région».

Impact économique et emplois

Au-delà de l’enjeu sanitaire, le complexe devrait générer des milliers d’emplois directs et indirects. Les fournisseurs locaux, laboratoires de contrôle qualité et services logistiques bénéficieront d’un essor significatif. « Nous estimons que plus de 5 000 emplois directs et 10 000 indirects pourraient être créés sur les cinq premières années », précise Jean-Pierre Zang, économiste industriel camerounais. « C’est un véritable levier pour dynamiser l’écosystème pharmaceutique camerounais et régional ».

Aujourd’hui, le Cameroun importe plus de 95 % de ses médicaments, et la facture pharmaceutique nationale a atteint 169 milliards FCFA en 2024, un poids lourd pour l’économie et un frein à l’accès aux soins de qualité. « Ce complexe est une réponse stratégique à la fois nationale et régionale », explique Dr Patrice Hilarion Assene, économiste spécialisé en santé publique. « La production locale permettra de sécuriser l’approvisionnement des pays voisins et de réduire leur dépendance aux marchés internationaux».

Le projet pourrait également transformer Yaoundé en un pôle industriel pharmaceutique sous-régional, attirant investisseurs et experts. « Cette usine constitue un catalyseur pour l’innovation et la formation dans le secteur pharmaceutique », ajoute Dr Omer Lagan Mele, chercheuse camerounaise en politiques de santé publique.

Une vision sous-régionale

Le Cameroun ambitionne de positionner Meyo comme un hub pharmaceutique pour toute la CEMAC, réduisant les ruptures d’approvisionnement et rendant les médicaments plus accessibles. Selon Dr Hilarion Assene, « la capacité de produire localement des médicaments de qualité est un atout stratégique pour toute la sous-région. Les pays voisins pourront sécuriser leurs chaînes d’approvisionnement et réduire leurs coûts d’importation. »

Des accords de distribution sont envisagés avec les pays voisins pour rationaliser les approvisionnements et faciliter la création de réseaux logistiques interconnectés. « Il s’agit d’une opportunité unique pour créer un marché pharmaceutique intégré », souligne Ursula Maffo, économiste camerounaise. « Les synergies entre production locale et demande régionale pourraient rendre les médicaments plus abordables et améliorer l’équité en santé. »

Un projet aligné avec les politiques nationales

Le complexe s’inscrit dans le cadre du Plan National de Développement Sanitaire (PNDS) et de la Stratégie Nationale 2030 (SND30), visant à renforcer les infrastructures de santé et promouvoir l’innovation pharmaceutique. « Nous sommes en train de bâtir non seulement une usine, mais une stratégie nationale et régionale de souveraineté sanitaire », insiste Mme Maffo.

Le projet illustre également la volonté de l’Afrique centrale de réduire sa dépendance aux importations et de renforcer sa résilience face aux crises sanitaires. « La pandémie a montré l’urgence de développer des capacités locales », rappelle Dr Amina Nguema. « Meyo est une réponse concrète et ambitieuse à cet enjeu ».

Perspectives

Dès 2027, le Cameroun pourrait devenir un modèle de production pharmaceutique locale, offrant aux pays de la CEMAC des médicaments fiables, accessibles et produits selon les normes internationales. Ce complexe pourrait transformer durablement le paysage sanitaire et économique de la sous-région, tout en affirmant la capacité de l’Afrique centrale à produire pour ses citoyens.

« Le complexe de Meyo n’est pas seulement une usine ; c’est une vision stratégique pour la santé et l’économie de toute l’Afrique centrale », conclut Ursula Maffo. « Il marque le début d’une nouvelle ère où le continent cesse de dépendre exclusivement des importations et affirme son rôle dans la production pharmaceutique régionale ».

Flux financiers, circulation des biens et des personnes

Au-delà de l’emploi et de la production, le complexe de Meyo est appelé à devenir un moteur économique régional. Selon Dr Léonard Ngomo, expert en économie régionale, « la mise en place de ce hub va générer des flux financiers significatifs, à travers l’investissement direct, les échanges commerciaux et la taxation des opérations logistiques. Cela renforcera les budgets nationaux et facilitera la circulation de capitaux entre les pays de la CEMAC. »

La production locale induira également une circulation accrue des biens et des personnes. Les médicaments produits seront exportés vers les pays voisins via des corridors logistiques bien définis, stimulant le transport, la douane et les services de stockage. « Le complexe va créer un véritable réseau de circulation de marchandises et de personnel qualifié », précise Mme Fatou Bissiri, spécialiste en commerce et transport régional. « Des techniciens, pharmaciens et logisticiens circuleront régulièrement entre le Cameroun et ses voisins, renforçant l’intégration économique de la sous-région. »

Cette dynamique favorisera aussi la création de clusters industriels autour de Meyo, attirant fournisseurs de matières premières, sociétés de transport et laboratoires d’analyses. « La complémentarité entre production locale, distribution et expertise humaine est un atout pour faire émerger un véritable marché pharmaceutique intégré », insiste Dr Amina Nguema.

Ongoung Zong Bella

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