La performance sera au rendez-vous, malgré le trou de 1000 milliards de FCFA enregistré au mois de juillet et aout dernier. Le Gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) se montre très optimiste sur les réserves de change appelées à augmenter jusqu’à 9500 milliards Fcfa en 2028. La sortie de Yvon Sana Bangui au cours d’une conférence de presse organisée le 29 septembre 2025, au sortir du troisième Comité de pilotage monétaire.

Je voudrai faire un rappel de l’évolution récente des réserves de change. Puis, je mobiliserai deuxièmement les facteurs explicatifs des évolutions constatées ces derniers mois. Ensuite, je vous ferai part troisièmement des actions entreprises immédiatement par la Banque centrale à l’effet de jumeler les facteurs de risques sur la dynamique des réserves. Pour enfin clôturer mon propos par une exposition des perspectives d’évolution de nos réserves de change à moyen terme.
1-L’évolution récente des réserves de change de la Cemac
Ces réserves se situent 6556 milliards, soit 10,81 milliards d’euros au 31 août 2025. Il s’agit bien entendu d’une donnée provisoire, enregistrant une légère baisse de 0,09% comparativement au 31 août 2024. Après la hausse tendancielle enregistrée entre octobre 2024 et mars 2025, soutenue par des décaissements de prêts et la bonne tenue des rétrocessions des devises, les réserves de change se sont inscrites sur une tendance baissière, avec une vitesse plus prononcée entre juin et août 2025.
Sur la même période, le taux de couverture de la monnaie (qui mesure la capacité de la monnaie à être échangée contre des devises étrangères) est passé de 69,8% à 61,6% au 31 août 2025. Ce niveau est supérieur à l’objectif de la banque centrale en termes de stabilité externe de la monnaie, qui est fixé au moins à 20% à chaque instant. Les réserves en mois d’importations des biens et services sont situées quant à elles à 4,24 mois des importations au 31 août 2025 contre 4,28 au 31 août 2024. Les normes en la matière préconisent un niveau minimal de trois mois d’importations des biens et de services.
Pour la fin de l’exercice 2025, les estimations des services de la banque centrale montrent que les réserves de change se situeraient à 7 101,7 milliards au 31 décembre 2025, correspondant à un taux de couverture extérieur de la monnaie de 73, 2% après 74,9% en fin 2024. En mois d’importation des biens et services, les réserves des échanges couvriraient un peu plus de 4,59 mois, contre 4,82 en 2024. Bien qu’en légère baisse, le niveau des réserves d’échanges reste donc confortable au regard des objectifs en matière de stabilité externe de la monnaie.
2-Facteurs explicatifs de la situation actuelle
En ce qui concerne les facteurs explicatifs des évolutions observées au cours des derniers mois, l’on peut retenir que le niveau des réserves d’échanges, a été soutenu en 2025 par quelques facteurs positifs dont entre autres : la capitalisation des revenus de porte – feuille, la dynamique des rapatriements du secteur extractif, et l’appréciation de l’or.
Toutefois, depuis quelques mois, les réserves de changes pâtissent de plusieurs facteurs dont essentiellement la diminution des appuis budgétaires dans un contexte de fin des programmes financiers de plusieurs pays avec le FMI. Deuxièmement, la hausse des payements extérieurs ordonnés par les Etats pour le règlement du service de la dette et des travaux de construction. Troisièmement, la hausse des règlements des produits pétroliers, des produits pharmaceutiques, et certains produits alimentaires, notamment le blé et le poisson, synonymes de la dépendance de la sous-région vis-à-vis de l’extérieur. Quatrièmement, la détérioration des termes de l’échange à moins 13,4% en lien essentiel avec la baisse des coûts des principaux produits d’exportations notamment le pétrole, le coton, le bois et j’en passe. Sixièmement l’augmentation des règlements des dividendes des investisseurs étrangers. Et pour terminer, l’accroissement des transferts rapides et de la couverture des soldes monétiques.
À propos des actions entreprises au sein de la banque centrale, il faut souligner que face à cet état des lieux, la banque centrale, dans le périmètre de ses attributions, mène des actions qui aident à consolider le suivi du respect de la réglementation des changes par les acteurs. Il s’agit particulièrement du renforcement quantitatif et qualitatif des équipes techniques affectées au suivi de la réglementation des échanges. Il s’agit aussi d’améliorer les outils permettant d’effectuer un contrôle permanent du respect de la réglementation par tous les acteurs, notamment la vérification de l’effectivité des rapatriements et des rétrocessions.
Aussi, il s’agit de la facilitation des échanges avec les opérateurs économiques y compris les fintech et établissements de payement à l’effet de les sensibiliser sur les aspects réglementaires.
Toutefois, les solutions mises en œuvre par la banque centrale ne sauraient suffire à inverser la tendance. Il est primordial de développer des politiques économiques favorisant la réduction de la dépendance de la sous-région vis-à-vis de l’extérieur. Dans ce sens, les autorités régionales ont mis en place une stratégie d’import – substitution qui permettra à terme de remplacer les importations de biens étrangers par une production locale pour renforcer et diversifier l’économie locale, tout en allégeant la pression sur les réserves de change.
3-Enfin, en termes des perspectives d’évolution à moyen terme des réserves de change
Elles sont plutôt favorables de 2026 à 2028. En effet, après 7101, 4 milliards en fin 2025, soit une couverture de 4,59 mois d’importation des biens et services, les réserves de change devraient atteindre 7707 milliards soit 4, 91 mois d’importation en 2026, puis 8372, 5 milliards en 2027 et 9475,9 milliards en 2028.
Cette évolution est à mettre en relation avec la hausse prévisible des investissements directs étrangers dans les secteurs stratégiques aujourd’hui, comme les mines, le gaz, l’industrie du bois… et aussi les tirages publics à l’extérieur pour financer les besoins fondamentaux des investissements et surtout des besoins en infrastructures de base dans la sous-région.
Sur la même période, le taux de couverture extérieur de la monnaie devrait se situer en moyenne annuelle autour de 79,6% après 73,2% en 2025. Ces perspectives sont néanmoins susceptibles d’être affectées à la volatilité des prix des hydrocarbures dans un contexte géopolitique que nous savons tendus ainsi que par la conjoncture économique en Chine, principal déboucher des matières premières de la sous-région.
Propos rassemblés par Thierry Ndong Owona