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Maroua : la nouvelle scène des «mercenaires politiques»

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À quelques mois du scrutin présidentiel prévu pour le 12 octobre 2025, la ville de Maroua devient le théâtre d’un étrange ballet de meetings politiques où les mêmes visages défilent de parti en parti. Entre mobilisation artificielle et stratégie de communication, les jeunes sont devenus des figurants rémunérés de la campagne.

Des meetings à la chaîne

Depuis le début de l’année, Maroua, capitale régionale de l’Extrême-Nord, est le théâtre de plusieurs rassemblements politiques. En mai dernier, la Plateforme des jeunes de l’Extrême-Nord pour l’émergence, porté par le directeur de cabinet du Président de l’Assemblée nationale, a rassemblé à la place des fêtes de Maroua plusieurs milliers de jeunes en faveur d’une candidature de Paul Biya.

Le 22 juillet, Yérima Dewa lance le All Cameroonians Congress (ACC) à la place des fêtes de la ville éponyme par un méga-meeting lors duquel il appelle directement les jeunes à voter pour Paul Biya le 12 octobre prochain. Il y a quelques mois, Salmana Amadou Ali, lui aussi transfuge du Front pour le Salut National du Cameroun de l’ancien ministre Issa Tchiroma, organisait un meeting sous les couleurs de son ancien parti.

Les mêmes visages, les mêmes promesses

Un constat saute aux yeux : les mêmes jeunes apparaissent d’un meeting à l’autre. Recrutés à la journée, souvent pour un billet de 1 000 francs ou un tee-shirt, ces participants improvisés sont plus attirés par le gain que par le discours politique. « J’ai déjà pris part à deux manifestations. À chaque fois, j’ai reçu 2.000 francs, un tee-shirt. Je repars toujours avec de quoi acheter du savon. Ce qu’il se dit lors de ces manifestations ne m’intéresse pas. Je suis là comme les autres. Je suis la foule », témoigne Sali Méité, brouettier au marché Abattoir. Ces rassemblements sont devenus une véritable industrie informelle. Les jeunes vendeurs à la sauvette, élèves en vacances, enfants des rues ou simples chômeurs deviennent, le temps d’un après-midi, des mercenaires politiques.

Leur mission : remplir les gradins, danser au rythme de slogans et donner l’illusion d’une base populaire convaincue. Le tout sous le regard des caméras. Derrière cette mise en scène, l’enjeu est clair : montrer que l’Extrême-Nord, région stratégique sur le plan électoral, est acquis à la cause qu’on souhaite mettre en vitrine.

Le business de la mobilisation politique

Pour Dr Kellou, native de Maroua IIème, il ne faut pas se laisser tromper par l’apparente ferveur : « Maroua est une ville de plusieurs millions d’habitants, avec 70 % de jeunes. Ces derniers sont facilement mobilisables. Il suffit d’un appât alléchant et d’une promesse de pécule pour les voir affluer ». Mais cette facilité de mobilisation n’est pas sans risques : promesses non tenues, frustrations, débordements, autant de signes d’un malaise profond que masquent mal les bains de foule téléguidés.

Alors que les partis se livrent à une course à la foule en cette période de pré-campagne, une question demeure : ces mobilisations témoignent-elles d’un engagement électoral sincère ou ne sont-elles que les signes avant-coureurs d’un théâtre politique bien rôdé ? Seul le verdict des urnes dira si cette ferveur affichée à Maroua se traduira en suffrages réels. D’ici là, les jeunes « mercenaires politiques » continueront de faire la tournée des meetings, au gré des cachets et des promesses.

Tom

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