Home AMBASSADES Capitaine Mbaye Diagne : Oraison funèbre en grandes pompes à Kigali

Capitaine Mbaye Diagne : Oraison funèbre en grandes pompes à Kigali

67
0

En hommage au Sénégalais, Casque Bleu tué lors du génocide rwandais, un documentaire conçu par la journaliste camerounaise Christèle Avom a été présenté le 31 mai dernier dans la capitale rwandaise.

Il est rare que les Casques Bleus se laissent tirer le portrait. Quand ils sont en charge, ils s’obligent à une stricte discrétion. Hors de question d’apparaître en premier dans quelque récit, parce que retranchés derrière un prudent quant à soi. S’il avait quitté le Rwanda vivant, certainement, le Capitaine Mbaye Diagne ne serait pas devenu demandeur d’un documentaire retraçant son œuvre dans un pays qui, en 1994, vit le génocide le plus rapide du 20e siècle. 800 000 Tutsi massacrés en à peine trois mois par les Hutus, ethnie majoritaire, après la destruction en plein vol de l’avion du président Habyarimana. Au milieu de cette mer de sang, Capitaine Mbaye Diagne, un officier sénégalais, observateur militaire de la Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda (Minuar), sauve plusieurs centaines de personnes, avec pour seules armes, ses convictions et la force de son verbe. Avec ce dispositif seulement, il amène plusieurs génocidaires à prendre conscience du gâchis. Le 31 mai 1994, à un poste de contrôle, à Kigali, ce soldat épanoui dans la défense et la protection des Rwandais est foudroyé par un éclat d’obus. Il a 36 ans. Sa mort marque un tournant tragique dans la mission onusienne au Rwanda, qui suspend temporairement ses activités.

Contenu
Trente-et-un an après sa mort, des traumatismes resurgissent en essaim, à côté d’une résurrection qui a lieu. Pas à Dakar. A Kigali. Au Kigali Genocide Center, précisément. Ce 31 mai 2025, à l’occasion de la 4e édition de la commémoration officielle à lui dédiée, Capitaine Mbaye Diagne qu’on croyait évaporé à tout jamais reprend vie dans un documentaire de 26 minutes. Christèle Avom, la journaliste camerounaise qui le signe choisit de ne pas raconter la vie du Capitaine Mbaye Diagne par sa fin. Elle opte pour un récit articulé autour de ce qui est sans fin : le sacrifice pour les autres. Comme une passerelle entre mémoire, transmission et engagement, l’ensemble chargé d’émotion. Chaque petit mot contient une grande histoire sur le Capitaine Mbaye Diagne. D’où le titre : « Mbaye Diagne, un héros venu d’ailleurs ». En 26 minutes, Christèle Avom n’articule pas seulement le simple cours de ce qui est arrivé aux Tutsi en 1994. La journaliste nourrit également l’idée secrète de fixer durablement l’attention de l’humanité toute entière sur la bravoure d’un homme dans un contexte où deux ethnies se vouent une haine ancestrale. L’objectif est simple : éclairer l’un des faits les plus marquants du génocide rwandais, de leur conférer une force, une originalité. Bref, dire, à partir du réel, tout ce qui en lui pourrait sombrer dans la nuit de l’oubli.


Donner à entendre l’histoire du Capitaine Mbaye Diagne consiste alors, selon Christèle Avom, à rendre compte d’un humanisme égorgé. Ici, le terme est à entendre en deux sens complémentaires. Le premier évite de ne tisser que des linceuls pour la vie humaine. Le second : on ne tire pas la couverture à soi ; on reprend un fil qui n’est jamais tout à fait le sien pour sauver l’espèce humaine.

Bobo Ousmanou

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here