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Présidentielle d’octobre 2025

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Biya va-t-il perdre le « nord » … ?

Le mouvement de « 100 000 jeunes derrière Biya pour 2025 », le 10 mai dernier  à Maroua, ayant accouché d’une souris avec une faible mobilisation d’environ 1500 jeunes seulement, parmi lesquels les gamins de moins de 13 ans, malgré la présence effective du président de l’Assemblée nationale, le Très Honorable Cavaye Yeguie Djibril ; le passage mitigé du Premier ministre, chef du gouvernement, Joseph Dion Ngute, à Maroua, Yagoua et Mora (Tchakamari), pour apprécier les réalisations et chantiers routiers en cours les 28 et 29 avril dernier, ainsi que la visite éclair du ministre d’Etat, Ferdinand Ngoh Ngoh, secrétaire général de la présidence de la République, à Kousseri en février 2025, personnalité publiquement tancée et boudée par des élus locaux,…, trois événements majeurs qui ne rassurent pas les populations de l’Extrême-Nord, désabusées par des promesses fallacieuses et en proie à la pauvreté généralisée, aux effets du changement climatique et au déficit criard d’infrastructures routières. A chaque fois, les revendications ont refait surface lors de ces meetings et visites de personnalités de premier rang, au point de se demander comment les caciques du RDPC vont-ils battre campagne dans ces conditions pour leur champion à quelques mois de l’élection présidentielle d’octobre 2025. 

Maroua, chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord, pompeusement baptisée, la fille aînée du Renouveau, est au cœur de toutes les convoitises, ces derniers jours, de la part des acteurs politiques de tous bords. Elle le restera encore pour quelques mois, le temps que la présidentielle d’octobre se tienne. L‘intérêt est décuplé à l’approche de cette échéance. C’est ce qui explique le ballet des dignitaires du régime Biya et hauts commis de l’Etat au chevet de cette région, la plus éloignée des institutions. La plus belle des régions, mais la plus pauvre abandonnée à elle-même, retient son souffle et cristallise toutes les attentions. La dernière actualité qui donne une idée de l’intérêt que les acteurs politiques accordent à cette région est liée à la tenue, en grande pompe, du mouvement de 100 000 jeunes derrière Paul Biya en vue de l’élection présidentielle d’octobre 2025. Mobilisation ayant finalement accouché d’une petite souris, avec au final une participation d’environ 1500 jeunes, parmi lesquels des gamins de moins de 15 ans dans les rangs des participants. Le meeting, planifié et organisé par les sieurs Abdourahman Boukar, directeur du cabinet du PAN et Mohamadou Atikou Kalda, un sulfureux homme d’affaires ayant fait fortune avec l’affaire du Covid-19 aux côtés de son frère du village, Malachie Manaouda, ministre de la Santé publique, avec qui il n’est plus en odeur de sainteté, n’a pu obtenir l’onction des instances faîtières du parti RDPC, ceci malgré le parrainage officiel du très honorable Cavaye Yeguie Djibril. Les élites de la région de l’Extrême-Nord, ministres, directeurs généraux, députés, sénateurs, maires, présidents de section RDPC, et hauts cadres de l’administration publique et des entreprises privées ont boycotté l’événement. Mêmes les partis alliés n’ont pas envoyé de représentants à ce meeting. 

Le mouvement de 100 Jeunes derrière Biya, organisé sous la coupole du PAN, se voulait une réplique aux deux meetings géants, populaires et très médiatiques du FSNC du ministre Issa Tchiroma Bakary, tenus au début du mois d’avril à Maroua et Garoua. Une démonstration de force, grandeur nature orchestrée par le député Salmana Ahmadou Ali, de Maroua, un personnage pratiquement incontournable dans le landernau politique du Grand nord, qui a fait trembler les caciques du RDPC. « C’est raté, si c’est pour montrer et démontrer que le RDPC est fort. Le meeting de Maroua est un échec cuisant. On a mobilisé des gamins à la place des fêtes de Maroua, au lieu des vrais militants. Le RDPC est fini à Maroua, à l’Extrême-Nord », se gargarise Moussa, militant du MRC à Maroua. Les observateurs de la scène politique s’empressent à dire que ce qui s’est passé à Maroua le 10 mai lors du meeting présidé par le très honorable Cavaye est une sorte de procès du RDPC à l’Extrême-Nord où les clans ont profité de l’occasion pour se livrer une guerre feutrée et fratricide. Les batailles sont rangées entre élites dans les six départements de la région de l’Extrême-Nord. Le lamido de Maroua avait donné le ton en dénonçant publiquement les manœuvres sourdines orchestrées par le PAN lui-même et ses affidés pour déstabiliser et fragiliser les élites et personnalités du Diamaré. Le lamido de Maroua n’avait pas hésité un seul instant d’accuser publiquement le très honorable Cavaye d’être à l’origine des malheurs et des divisons des élites du Diamaré et lui avait demandé d’aller tenir son meeting à Mora, chef-lieu du département du Mayo-Sava, d’où il est originaire. Dans le Mayo-Sava natal de Cavaye, ce n’est pas non plus la grande sérénité. Son autorité est remise en cause. Le directeur du cabinet du PAN, l’homme-orchestre du meeting du 10 mai à Maroua, n’a jamais digéré le fait que le ministre Ibrahim Talba Malla soit désigné chef de délégation permanente départementale du RDPC pour le Mayo-Sava. Poste qu’il a publiquement convoité et qu’il n’a pas obtenu. L’on comprend pourquoi il y a eu des tensions et accroches violentes entre les partisans de Abdourahim Boukar et ceux du maire de Mora, Chetima Hamidou lors de la mobilisation des jeunes en vue du meeting de Maroua. Voilà pourquoi les jeunes de Mora n’ont pas pu effectuer le déplacement de Maroua le 10 mai.  Le ministre Malachie Manaouda, très populaire dans le Mayo-Tsanaga et proche des jeunes, avait déjà lui-même organisé en 2024, un méga meeting réussi à Mokolo, où des milliers des jeunes avaient appelé le président Biya à être leur candidat à l’élection de 2025. Ce dernier avait-il encore besoin de participer ou de mobiliser les mêmes jeunes pour un autre meeting à Maroua, qui n’est pas son fief, le 10 mai 2025 ? Aucunement pas. 

Et pourquoi les trois autres départements de la région de l’Extrême-Nord, à savoir le Mayo-Danay, le Mayo-Kani et le Logone et Chari, ont brillé par leurs absences, ou n’ont-ils pas envoyé leurs enfants pour le meeting du 10 mai dernier à Maroua ? Elites et populations locales s’accordent à dire que Cavaye Yeguie Djibril est un has-been qui se comporte en chef de village de Mada-Kolkoch. Lui-même et ses partisans ne voient pas plus loin que leur famille. Son action est limitée à sa famille nucléaire et à Tokombéré. Face aux défis immenses, il n’est plus l’homme de la situation. « Pendant les 33 ans que Cavaye Yeguie Djibril a passé le temps au perchoir, qu’a-t-il fait de bon pour sa région d’origine ? On ne l’a jamais vu aux côtés des populations sinistrées par les inondations de Yagoua, Maga, Kaikai… On ne l’a jamais aperçu à Kaélé pour tenir un meeting de rassemblement. Pire encore, il n’est jamais allé à Kousseri pour prêcher l’apaisement entre les communautés Kotoko et Musgum ou Kotoko et Arabe-Choa, en proie à la guerre civile récurrente liée aux questions de pâturages, des terres arables, des eaux… D’où vient-il qu’il se découvre un costume de leader de l’Extrême-Nord au soir de sa carrière au point de demander aux jeunes de soutenir encore Biya ? », s’interroge Yerima A., signataire du mouvement des Partisans pour le Changement du Grand Nord (PCGN). 

 Et la visite du Premier ministre, Joseph Dion Ngute, chef du gouvernement, dépêché de Yaoundé, les 28, 29 et 30 avril dernier, pour inaugurer le Pont de Mbongor sur le Logone, avec son homologue tchadien, pouvait-il permettre de sauver les meubles et redorer le blason du régime Biya, taxé d’avoir abandonné les populations de cette partie du pays dans la misère, les souffrances, l’insécurité de Boko haram… ? Le PM s’est rendu à Tchakamari dans la localité de Mora pour accélérer les travaux de construction de la Nationale numéro 1 Mora-Waza-Dabanga-Kousseri, une route qui cristallise actuellement toutes les frustrations des commerçants, usagers et opérateurs économiques qui se plaignent des pertes en termes des millions, voire des milliards de francs. Entre l’accélération des travaux en cours et la détente du PM dans les lamidats de l’Extrême-Nord, les populations s’impatientent de voir du concret, des actions palpables et des projets plus ambitieux pour les sortir du marasme économique et social actuel. Joseph Dion Nguté a-t-il pris la pleine mesure de la situation dans la région de l’Extrême-Nord, considérée comme le fief électoral du président-candidat Biya ? Mais, la météo politique de l’Extrême-Nord s’est particulièrement assombrie et crispée lors de la visite éclair du ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, en février dernier. L’homme à la punk avait été pris à partie, et tancé publiquement par des élus locaux qui n’ont pas caché leur colère de voir que le ministre d’Etat voulait rentrer sur Yaoundé le même jour sans attendre que ces dernières lui égrènent les doléances des populations. Le porte-parole des maires lui avait demandé de voyager par route sur l’axe Kousseri-Mora – Maroua, pour apprécier le mauvais état de la route et le calvaire des populations locales. Ferdinand Ngoh Ngoh a été contraint de passer une nuit pour écouter les problèmes des élus et des populations de cette partie du pays, malgré le fait que son calendrier était chargé. 

Les émissaires de luxe de Yaoundé, qu’il s’appelle Joseph Dion Nguté, PM et chef du gouvernement ou Ferdinand Ngoh Ngoh, ministre d’Etat et secrétaire général de la présidence de la République ont-ils désamorcé le péril jeune de l’Extrême-Nord qui a ouvert les yeux, et prête une oreille attentive aux sirènes de l’opposition ? Le président de l’Assemblée nationale, le très honorable Cavaye Yeguie Djibril, qui cumule 33 ans au perchoir, déconnecté des réalités locales, biberonné aux analyses farfelues et décousues de son directeur de cabinet qui lui fait croire que les élites de l’Extrême-Nord seraient en train de comploter contre lui pour proposer un natif de Mora, Mokolo ou Kousseri, au prestigieux poste de Premier ministre, est-il encore capable de mobiliser les jeunes derrière Biya ? Rien n’est sûr. On ne perd rien à attendre de voir comment Biya va-t-il battre campagne dans un tel contexte. Biya qui ne s’est pas encore prononcé sur sa candidature, va-t-il perdre le Nord ?

Wait and see..      

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