Home INTÉGRATION RÉGIONALE MANQUE D’OPPORTUNITÉS ÉCONOMIQUES : Autopsie d’un mal profond 

MANQUE D’OPPORTUNITÉS ÉCONOMIQUES : Autopsie d’un mal profond 

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Il tire sa source de la stagnation économique observée dans la région depuis une dizaine d’années et de pratiques controversées au sein de l’administration.

Les difficultés économiques  de l’Afrique subsaharienne remontent à l’année 2015, après la croissance enregistrée entre 2000 et 2014. La région n’a cessé depuis lors de se frotter à diverses crises mondiales : la crise des matières premières, l’expansion du terrorisme, la pandémie de Covid- 19, les restrictions des marchés financiers et une reconfiguration géopolitique majeure, la guerre en Ukraine et la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis. Tout cela entretient une contraction de la prospérité sur le continent noir, notamment la baisse du produit par habitant. Lequel s’est contracté à 1,8% depuis 2024. Et malgré quelques avancées économiques, les gouvernements peinent à répondre aux besoins de la population. « Les niveaux de pauvreté et d’inégalités restent élevés. Pour chaque augmentation d’un point de pourcentage de la croissance du Produit intérieur brut dans la région, le taux de pauvreté n’a diminué que de 0,4% et la part des travailleurs occupant un emploi salarié a augmenté de 0,04%, ce qui reste bien en deçà de la réactivité observée dans d’autres régions. En outre, si l’on considère des seuils de pauvreté légèrement plus élevés, les progrès ont été encore plus limités, seule une personne sur huit (12%) vit avec plus de 6,85 dollars par jour. Un chiffre qui a peu évolué en dix ans », relève le rapport Africa’s pulse. Cette situation conduit à l’exacerbation du mécontentement en Afrique subsaharienne et augmentent les risques de conflit dans la région. Cela a déjà été le cas au Cameroun, pays d’Afrique centrale, où l’insécurité a rapidement prospéré dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest après des revendications touchant en partie le développement dans cette partie du pays. Dans la partie septentrionale, la secte Boko Haram a pu tirer parti de la précarité des populations pour procéder à des recrutements parmi la population jeune. La situation sur le continent est plus compliquée du fait de l’indisponibilité des infrastructures nécessaires au développement et un accès réduit aux services de qualité. « Les tendances en matière d’égalité d’accès aux services sont à la traine et de nombreux citoyens à faibles revenus n’ont pas profité des investissements publics dans l’éducation et la santé.

Dans toute l’Afrique subsaharienne, l’accès des enfants aux services de base dépend fortement des circonstances dans lesquelles ils sont nés, comme la richesse des parents et le lieu de leur foyer », explique la Banque mondiale. Le tableau en la matière mêle : déficience de la fonction publique, la corruption, une planification budgétaire défaillante, une faible crédibilité, une gestion de la trésorerie opaque, une mauvaise surveillance des comptes, des marchés publics non concurrentiels, des contrôles financiers faibles et des audits inefficaces, entre autres. Toutes choses réunies qui conduisent au gaspillage des ressources financières des Etats. « La plupart des pays de la région ne fournissent pas d’informations publiques adéquates sur les opérations et la gestion financière des entreprises d’Etats et le contrôle exercé par les institutions d’audit et les parlements est souvent laxiste. Cela empêche les pouvoirs publics et les citoyens de demander des comptes aux entreprises d’Etat. Leur mauvaise gestion a des conséquences financières majeures pour les pouvoirs publics : de nombreuses entreprises d’Etat fonctionnent à perte, ce qui pèse sur les finances publiques. Les renflouements des entreprises d’Etat en Afrique subsaharienne ont couté en moyenne environ 3% du PIB en 2022 », selon le rapport. Celui-ci met également en évidence la faible mobilisation des recettes internes dans le chapitre des facteurs entravant la disponibilité des services essentiels ; et l’inaction des dirigeants dans l’amélioration des services publics quand ils n’affectent pas directement les riches. Seulement, la Banque mondiale ne se contente pas de dresser un simple constat de la réalité sur le continent. Elle y jette un regard critique, s’insurgeant contre les dirigeants qui tendent à faire perdurer les schémas actuels. « L’écart croissant entre l’Afrique subsaharienne et le reste du monde ne s’explique pas par l’absence de solutions techniques, mais par la difficulté à surmonter des incitations  biaisées qui ont maintenu la majeure partie du continent dans un équilibre de bas niveau. D’un point de vue technique, il existe une compréhension commune des types de politiques et d’investissements nécessaires pour mettre en place un système fiscal équitable et élargi, capable de financer les services publics. On sait aussi généralement quels types de réglementations sont nécessaires pour faciliter la mise en place d’un secteur privé compétitif, créateur d’emplois et d’opportunités économiques », lit-on dans le rapport Africa’s pulse. Pourtant, les taux de chômage restent élevés dans la région où le nombre d’entreprises employant du personnel reste très limité. 95 % d’entre elles étant des structures unipersonnelles dirigées par leur propriétaire-exploitant. Ce qui représente en valeur réelle 238 millions d’entreprises sur un total de 250 millions ; ouvrant ainsi peu la voie à des perspectives radieuses.

Louise Nsana

OPTIMISATION DU CONTRAT SOCIAL : la société civile en renfort

Un rôle plus accru de ces organisations est une opportunité d’optimisation du contrôle de l’action gouvernementale.

De l’avis de la Banque mondiale. Le rôle de la société civile est crucial pour un changement de paradigmes en matière d’équité sociale, ainsi que de transparence et de responsabilité dans la gestion des affaires publiques. L’institution appelle les Etats africains à garantir leur indépendance et à renforcer leurs capacités. « Une société civile indépendante, un appareil judiciaire établi et autonome et un organe législatif pluriel sont décisifs pour garantir que les gouvernements soient tenus de rendre des comptes sur leur mandat, qui est de servir les intérêts de la population. La société civile peut jouer un rôle important en soutenant l’action collective et la contestation. Elle peut également contribuer à encourager la participation citoyenne aux délibérations politiques ou budgétaires, dans le cadre de réunions publiques ou d’autres forums, et à renforcer la responsabilité sociale par le biais du contrôle des services par les citoyens », indique le bailleur de fonds. Il recommande par ailleurs le renforcement de la redevabilité pour réduire la corruption, afin de rétablir la confiance brisée des populations en leurs gouvernements. Un autre appel est lancé en faveur de la réinvention du rôle de l’État sur le marché afin de réduire les distorsions politiques et de créer des opportunités d’emploi. « Des politiques fiscales et de crédit et des réglementations plus transparentes et plus équitables, accompagnées d’une application plus juste des politiques existantes, peuvent favoriser un accès égal pour tous aux opportunités commerciales. L’accès aux tribunaux et leur intégrité sont de ce fait essentiels pour lever les obstacles auxquels se heurtent les entreprises et investisseurs plus modestes. L’implication de l’État sur les marchés peut également être utilisée de manière beaucoup plus inclusive. Des processus de passation des marchés et de partenariats public-privé plus transparents, compétitifs et axés sur les performances peuvent créer un accès plus équitable aux opportunités commerciales de l’État pour les acteurs du marché qui n’ont pas de relations politiques », lit-on. La liste non exhaustive des autres scénarios envisagés comprend également l’adoption d’une réglementation transparente équitable pour améliorer la compétitive des entreprises et élargir les possibilités d’emplois.

Louise Nsana

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