Sillonnant quartiers et villages pour reconduire, donner de nouvelles puces ou encore procéder à des identifications, des préposés exerçant pour le compte des compagnies de téléphonie mobile profitent des circonstances pour pirater les comptes et cloner des puces.

Le samedi 29 mars 2025, Nathalie, professeur de lycée, rédige le rapport de fin de trimestre. Concentré dans son travail, la dame entend une notification venant de son téléphone portable. Le message lui fait comprendre qu’elle vient de faire un dépôt avec succès à une tierce personne. Croyant rêver, elle attend quelques minutes et lit à nouveau. Prise de panique, l’enseignante montre le message à son compagnon. Ce dernier éteint le téléphone et le rallume 30 minutes plus après, « si on vérifie le solde, l’argent va partir. En éteignant, on annule la transaction », croit-il. Il est trop tard. En allumant et en vérifiant, la somme de 17 500 FCFA vient d’être retirée sans la moindre manipulation du téléphone par son propriétaire. Le départ pour le service prévu la veille est reporté pour le mercredi suivant. Le temps de trouver de l’argent pour le transport et se rendre dans une agence Orange pour comprendre ce qui se passe : le numéro de téléphone de la Nathalie est cloné.
Le clonage de la puce a lieu lorsque Nathalie, fait l’identification. Sa puce répondant au nom de son fils, elle profite de la présence des agents mobiles d’Orange. Son fils va scanner sa carte nationale d’identité et l’envoyer via WhatsApp. Aux agents de se mettre au travail. Sauf qu’il ne font pas le job, ils sont entrain de manœuvrer pour clonage. Après 30 minutes, il lui demande de mettre son code secret. Ce processus est répété 3 fois, « combien ça coûte ? », demande la dame. « Donnez ce que vous avez. Mais le travail était dur ». Contente de disposer d’une puce identifiée à son nom désormais, Nathalie remet 3 000 FCFA aux deux hommes.
Doriane n’a pas échappé à ces agents véreux. Trésorière d’une tontine, elle a sécurisé le magot dans un compte Mobile Money MoMo. Il ne s’agit pas d’une petite somme vu le statut d’étudiante de cette dernière. On parle de 400 000 FCFA. Selon la dame, cette somme a été dérobée lorsque les agents mobiles de MTN lui faisaient l’identification, « ils ont mis du temps pour me faire l’identification. Après, ils ont commencé avec certaines manœuvres, me demandant de confirmer mon compte. Cette demande a été faite au moins 4 fois. Je crois que c’est là qu’ils ont soutiré cet argent », explique-t-elle. Comme Nathalie, elle saura qu’elle n’a plus d’argent dans son compte que lorsqu’elle reçoit le message d’avoir viré la quasi-totalité de l’argent à un inconnu. Sonnée, elle se rend dans un guichet de retrait dans son quartier à Essomba. « Ils vous ont eu Madame. Appelez seulement le service client ou bien vous vous rendez à l’ANTIC ».
Mama Cécile, une retraitée habitant Mvan, a eu beaucoup de chance. Dans son compte MoMo, elle n’avait que 1 500 FCFA lorsque les agents mobiles l’identifient. Mais ses petits-fils ont eu pour leur grade. Habitués à dérober du crédit dans son téléphone, la sexagénaire va les accuser d’avoir vidé son compte. L’un de ses petits-fils étudiant en informatique qui vérifie et lui fait comprendre qu’elle est victime de clonage : « Grand-mère tu as été piratée. On va seulement changer ta puce sinon les gars d’orange et MoMo vont toujours retirer ton argent », lui dit-il. Mais la colère de cette femme âgée vient du fait qu’elle perd ses contacts. « J’ai ma puce depuis 2003 ; me demander de l’abandonner c’est me tuer », sanglote la retraitée. Elle ne sait pas si elle pourra s’habituer à une autre puce. Pour finir elle maudit les pirates en Ewondo.
André Gromyko Balla