Le parcours d’Ata DJABA illustre le lien direct entre manque de transparence, abus et vulnérabilité des femmes dans les zones minières. Originaire de l’Extrême-Nord, elle s’installe à Batouri en 2011 avec l’espoir de s’insérer professionnellement après un brevet d’élevage. Faute d’opportunités, elle se retrouve dans les mines artisanales d’or.

Sur le terrain, elle découvre un univers marqué par l’inégalité et l’ignorance :
« Les femmes minières travaillent dans le noir. Elles ne savent pas combien les entreprises payent, ni ce qui revient à la commune, ni les projets à financer. Sans accès aux données, nous sommes privées de nos droits », déclare-t-elle.
Elle souligne que même des personnes instruites ont du mal à comprendre les rapports complexes du secteur extractif. Pour des femmes analphabètes, l’écart est abyssal. D’où la nécessité, selon elle, de former des relais locaux, de vulgariser les informations et de traduire les documents en langues locales.
Un déclic : l’abus de trop
Un épisode marque profondément Ata DJABA :
« J’ai vu une femme se faire arnaquer par un collecteur d’or. Elle avait récolté 2 grammes au prix d’une journée entière de travail. Il lui a annoncé 1 gramme et l’a payée sur cette base. Elle ne savait pas lire la balance. »
Cette scène la pousse à agir. Une semaine plus tard, elle lance « l’École sous l’arbre », un espace d’alphabétisation et de formation pour les femmes minières. De sept participantes initiales, elle passe rapidement à une soixantaine.
Au-delà de l’alphabétisation, elle sensibilise les femmes sur :
• Leurs droits économiques et sociaux,
• Les compensations auxquelles les entreprises minières sont soumises,
• Les documents sectoriels, dont plusieurs initiatives comme celles de Resource Justice Network ou des groupes de travail genre du secteur extractif.
Cependant, comme elle le souligne :
« Lorsque les documents ne sont pas vulgarisés, ils finissent sous le lit. Il faut des sensibilisations régulières, des explications simples et adaptées. »
Aujourd’hui, Ata DJABA poursuit son combat pour que les femmes minières puissent accéder à leurs droits, mieux se protéger et participer pleinement aux bénéfices générés par les ressources naturelles.
Louise NSANA




