Entre tensions post-électorales et querelles autour des boissons et des fonds, les associations locales de Yaoundé transforment chaque réunion en véritable champ de bataille. Prudence, suspicions et votes houleux : bienvenue dans le théâtre impitoyable des petites manœuvres… version quartier.

À Yaoundé, dans le paisible monde des associations locales, 2025 restera marqué par une tension digne d’un thriller politique… mais version réunions de quartier. Madame Abanda, chargée de la réunion du samedi 1er novembre 2025, a proposé un compromis jugé « prudence moderne » : organiser la rencontre en ligne. Son argument ? Le climat de tension qui règne dans le pays, et le risque supposé de se déplacer depuis Odza ou Simbock vers Nkolmesseng. « Le dehors est dangereux , insiste-t-elle, prudente. À cela, les membres ont répliqué comme des critiques gastronomiques face à un plat tiède : « Faux ! Yaoundé est sécurisée ».
Certains vont même plus loin, insinuant que Madame Abanda aurait des comptes à cacher. « Elle est la trésorière et c’est la dernière réunion avant la cassation de décembre. Renvoyer la réunion compliquera la suite. Elle a peut-être utilisé l’argent et ne veut pas qu’on découvre la supercherie », murmure un membre dans un message privé. Hortense, autre figure du groupe, ajoute sa touche épicée : « C’est une fuite en avant. Reçois-nous comme d’habitude et distribue la boisson ! » Une phrase qui fait mouche et enflamme le groupe WhatsApp, transformant l’application en véritable agora digitale. Pour trancher cette bataille digne d’un conseil de guerre, un vote est organisé.
Résultat : le camp du présentiel l’emporte. « Il ne faut pas céder à la peur », résume Nina, en s’adressant à sa sœur Christine, qui doit recevoir la réunion du dimanche 2 novembre. Christine, prudente, hésite : reporter ou non ? Elle penche pour le 9 novembre afin de laisser retomber la tension. Nina, ironique, suggère une solution intermédiaire : avancer la réunion et finir avant 17h. « Il faut faire les choses correctement, sinon les gens penseront que tu ne veux pas dépenser de l’argent en les recevant », lance-t-elle, rappelant subtilement à sa sœur que l’hospitalité locale se mesure aussi au contenu de la ration distribuée.
Pendant ce temps, à Tropicana (Yaoundé 4), la scène se répète, mais avec une teinte de désolation. Après leur marché, les membres de l’association de Marie Louise décident collectivement de boycotter la réunion prévue le 9 novembre. La peur a parlé : le climat délétère les pousse à rester chez eux, prudent mais frustrant pour la trésorière en chef. « Je suis à plus de 60 000 FCFA de dépenses, j’aurais gardé mon argent et fait autre chose », se plaint-elle, visiblement vexée. La situation est d’autant plus piquante qu’elle devait recevoir la ration des membres, respect du règlement oblige. « Comment récupérer mes 50 % ? On ne remet cet argent que lorsque la réunion a lieu », regrette-t-elle, entre colère et consternation.
À travers Yaoundé, le paysage post-électoral transforme donc de simples réunions en enjeux quasi diplomatiques, où les comptes, les rations et la peur s’entrelacent dans un ballet aussi sérieux que ridicule. Les habitants oscillent entre prudence et suspicion, tandis que les applications de messagerie deviennent tribunaux et conseils à la fois. Et si la prochaine réunion se faisait vraiment en ligne, avec un petit apéro virtuel pour apaiser les esprits ? Rien n’est moins sûr, mais l’humour reste la meilleure arme pour survivre aux tensions… et aux
et aux rations manquantes.
André Gromyko Balla





