Troisième dimanche de Pâques/ Année C. Les Apôtres avaient été fouettés parce qu’ils avaient désobéi à l’interdiction de parler de Jésus que les Juifs avaient « exécuté en le suspendant au bois du supplice mais que le Dieu de nos pères a ressuscité », parce que l’un d’entre – eux, Pierre, avait osé déclarer au grand prêtre : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. »

Libérés, ils retournèrent chez eux tout joyeux « d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus », relate Luc dans le livre des Actes des Apôtres.
Pierre et ses compagnons étaient dans la joie, probablement parce qu’ils n’avaient pas oublié la parole du Maître : « Heureux êtes-vous quand les hommes vous haïssent et vous excluent, quand ils vous insultent et rejettent votre nom comme méprisable à cause du fils de l’homme… C’est ainsi en effet que leurs pères traitaient les prophètes ! » (Lc 6, 22-23).
Le mot clé ici est « prophètes ». Le prophète n’est jamais bien traité. Il est rarement applaudi et adulé parce qu’il est soucieux de plaire à Dieu et non aux hommes, parce qu’il parle pour les laissés-pour-compte, parce qu’il proclame la vérité et la justice de Dieu, parce qu’il dérange les puissants qui écrasent, affament ou tuent, parce qu’il attaque les hommes qui attendent de leurs semblables silence et soumission.
Lorsque, à trois reprises, Jésus demande si Pierre l’aime, il veut savoir si le fils de Jean aime Jésus le crucifié, Jésus qui n’avait pas sa langue dans la poche, Jésus qui ne confondait pas respecter les autorités et se prosterner devant elles, Jésus qui était sans feu ni lieu. Pour le Christ, seules les personnes capables d’affronter Hérode, capables de souffrir pour la vérité et la justice, peuvent paître son troupeau.
À trois jours de l’ouverture du conclave, il est bon que ces textes soient entendus et médités par les cardinaux et par celui d’entre – eux qui sera choisi pour succéder à François.
Évêques, prêtres et fidèles laïcs ne sont pas moins interpellés. Car, tous, nous avons à retrouver le sens de notre baptême : être des signes de contradiction dans un monde où « sont nombreuses les voix à faire la propagande de modèles de vie fondés sur l’arrogance et la violence, le succès à tout prix, l’apparence et les possessions matérielles au détriment de l’être » (Benoît XVI, discours prononcé devant 500 000 jeunes à Lorette en septembre 2007).
Pour sûr, le futur pape devra jeter des ponts à l’intérieur de l’Église, entre cette dernière et le monde, mais le plus important, et c’est mon vœu, est qu’il parle et témoigne à temps et à contretemps. Comme les prophètes.
Jean-Claude Djéréké