Vision minière africaine : 30% d’implémentation au Cameroun

C’est ce qu’on retient du rapport d’étude publié par le Centre régional africain pour le développement endogène et communautaire (Cradec), portant sur « la domestication de la vision minière africaine au Cameroun ». Il a été présenté le 12 avril dernier à Yaoundé.

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Le niveau d’implémentation de la vision minière africaine au Cameroun est insuffisant. C’est ce qui ressort du rapport du Cradec portant sur le niveau d’implémentation de cette vision au Cameroun.

Selon Michel Bissou, membre du comité de rédaction dudit rapport, la domestication de la vision africaine par le Cameroun est partiellement implémentée. Elle est estimée à «78 % options implémentés partiellement et globalement», mentionne-t-il. Un niveau fort appréciable. Cependant, le secteur minier camerounais peine encore à décoller, à cause du manque de finalisation des mesures prises.

Effectivement, les actions entreprises par le Cameroun dans le cadre de l’application de la vision minière africaine et des défis y relatifs, n’arrivent pas à leurs fins. Selon les experts, cette implémentation partielle est due au choix de la politique publique du pays. «C’est le cas du fond intergénérationnel pour le secteur minier qui n’est pas mis en œuvre ou alors des questions relatives au code minier sous régional qui n’est pas encore effectif», dixit un expert.

Par conséquent, pour que l’Afrique en miniature bénéficie pleinement des revenus de son secteur minier, il faut mener des réflexions sur le code minier et le fond intergénérationnel. Et, tous les acteurs du secteur doivent être pris en compte, y compris les populations autochtones.

De plus les pays africains doivent s’investir pour transcender la simple mise en œuvre de la vision minière africaine.Parce que, celle-ci n’est qu’un guide sur lequel doivent s’appuyer sur les politiques minières des pays africains. Son rôle est de s’assurer que l’exploitation des ressources minières africaines profite aussi bien aux Etats, qu’aux communautés riveraines des exploitations minières.

Joseph Julien OndouaOwona, Stg

 

Réactions

Jean Mballa Mballa, Directeur du Cradec

«Le Cameroun a réalisé un certain nombre d’actions qui ont été recommandées par la vision minière africaine»

 

Vous avez présenté un exposé lors de l’atelier de formation des médias africains sur les flux financiers illicites. De quoi s’agit-il ?
Le Cradec a présenté un rapport sur le suivi de la domestication de la vision minière au Cameroun. La vision minière africaine est une stratégie continentale qui a été adoptée par les chefs d’Etat et de gouvernements africains en 2009 et qui vise à rationaliser l’exploitation des ressources minières pour un développement cohérent et durable de l’Afrique. Nous avons eu le souci d’évaluer le niveau d’internalisation de cette vision continentale au niveau national.

Quel est l’état d’implémentation de cette vision au Cameroun ?
Il ressort que de manière globale, que le Cameroun a réalisé un certain nombre d’actions qui ont été recommandées par la vision minière africaine, en termes de recherche de l’atteinte des objectifs concernant la vision minière.

Par ailleurs, dans le cadre de la vision minière africaine, les chefs d’Etat ont développé un certain nombre de défis auxquels certains pays peuvent faire face dans la mise en œuvre de cette vision. Pour cela, ils ont proposé des options qui vont dans le sens de relever lesdits défis. A ce niveau aussi, le Cameroun a implémenté plusieurs options estimées à 78%, pour les options implémentés partiellement et globalement. Mais, nous relevons qu’il y a un potentiel dans le cadre juridique camerounais qui pourrait permettre à ce que le Cameroun exploite au mieux les cadres qui sont développés dans cette vision. J’en veux pour preuve, le code minier adopté au Cameroun en 2016 et qui prend en considération, un certain nombre de facteurs qui participent de la promotion de la transparence dans le secteur extractif.

Le régime fiscal est-il concerné ? Si oui, à quel niveau se situe-t-il dans le processus de mise en œuvre de cette vision ?
En ce qui concerne les questions du régime fiscal, il est impliqué dans la gestion des revenus. Actuellement, il y a un certain nombre de dispositions qui sont mises en place dans le cadre de l’initiative pour la transparence dans les industries extractives.

Est-ce qu’il existe des lois qui régissent la gestion de ce secteur ? Quelles sont-elles ?
Oui, il y en a deux. Une loi qui a été votée en portant sur la transparence et la bonne gouvernance dans les finances publiques votée en 2018 ; et celle portant code minier 2016. Si ces deux lois avaient des décrets d’application, le cadre juridique serait sérieusement amélioré au Cameroun. Mais malheureusement, toutes les dispositions qui font une appréciation de partiellement fait ou non relèvent du fait qu’il y a ces deux décrets d’applications qui sont encore en examen.

Vous avez dit que beaucoup reste à faire. A votre avis, que faut-il pour amorcer la croissance dans ce secteur ?
Je le redis, il y a encore beaucoup à faire. On peut par exemple évoquer les dispositions qui permettent qu’il y ait des transferts infranationaux au niveau des communes et des communautés. Cependant nous sommes dans un système à unicité de caisse au niveau du trésor et donc on ne peut pas différencier les ressources qui proviennent des mines et qui vont vers les communes ; et ça aussi c’est un point sur lequel nous devons travailler au niveau national en rapport avec les ministères des finances et mines. Je l’ai évoqué dans mon rapport.

 

François Nestor Konde, service de la direction générale de la planification au Minepat

«Nous avons évalué la mise en œuvre de ce DES et nous avons relevé un certain nombre d’insuffisance»

 

J’ai apporté des éclaircis sur la politique minière au Cameroun pour dire que le Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi (DSCE) qui a été élaboré en 2010 et qui a une durée de vie de 2010 à 2019, avait prévu que le secteur minier était l’un des secteurs qui devaient contribuer à la relance de la croissance et de l’emploi au Cameroun. Nous avons évalué la mise en œuvre de ce DSCE et nous avons relevé un certain nombre d’insuffisances. Lesdites insuffisances, nous ont servis de base pour élaborer des documents post-DSCE, qui sont en cours, et qui vont partir de 2020 à 2027. Actuellement, nous menons des concertations auprès des universitaires, des membres de la société civile, des parlementaires, des partenaires au développement, bref tout le monde. A partir de là, avec le soutien du Minmidt qui s’occupe du volet minier, nous avons fait une refonte des programmes. Ceux-ci nous permettrons de ressortir des programmes cadres qui vont permettre que ce secteur se développe et contribue à faire de notre pays un pays à revenu intermédiaire.

 

Michel Bisssou, consultant membre de l’équipe de rédaction du rapport d’étude

«Le Cameroun doit finaliser et publier le décret d’application de son code minier en vigueur»

 

La contribution du secteur minier reste faible et effectivement, les attentes formulées à l’endroit de ce secteur restent légales. Le Cameroun attend beaucoup de son secteur minier. Mais l’effectivité de ces attentes-là tient aussi compte de l’effectivité des projets ; et ces projets tiennent compte des investisseurs étrangers. Les projets miniers sont des projets à forte demande capitalistique. Mais le Cameroun indépendamment des limites constatées, du point de vue des investisseurs, est interpellé à finaliser sa politique minière nationale. C’est l’un des éléments clés de la stratégie du ministère des mines actuellement qui consiste à finaliser ladite politique.

Le Cameroun doit également repenser les différents secteurs opérationnels qui doivent concourir à une mise en œuvre efficace de sa politique minière à définir. Autre mesure c’est que le Cameroun doit finaliser et publier le décret d’application de son code minier en vigueur ainsi que son décret d’application de la loi portant code de la transparence qui a été signée.

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