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Violences au Tchad: barreau, épiscopat et défenseurs des droits humains au créneau

Ils déplorent les pertes en vie humaine, les exécutions sommaires, les arrestations arbitraires et appellent à la libération des détenus.

 

Le Barreau du Tchad, dans un communiqué de presse, relativement aux événements malheureux de ces derniers jours, tout rappelant que le Tchad est un pays signataire de la déclaration universelle des droits de l’homme et autres instruments juridiques internationaux, déplore les pertes en vie humaine, les exécutions sommaires, les arrestations arbitraires et tortures, les enlèvements et déportations ainsi que les destructions des biens tant des personnes privées que de l’État.

Le Barreau du Tchad, tout en condamnant dû cette violence, rappelle aux autorités de transition qu’il est une obligation régalienne de l’État d’assurer la sécurité des personnes et de leurs biens et que rien ne saurait justifier des tirs à balles réelles sur la population.

Par ailleurs, le Barreau constate que cette situation de trouble a curieusement, permis à des individus, de faire usage d’armes à feu sur la population tant à N’Djamena que dans les provinces.

Le Barreau, en appelle enfin, à la communauté internationale de peser de tout son poids pour qu’une enquête indépendante soit diligentée afin, de situer de manière impartiale, les responsabilités.

 

L’épiscopat dénonce « des violences injustifiables » contre la population

Dans un communiqué publié le vendredi 21 octobre, la Conférence épiscopale du Tchad (CET) a condamné les « violences injustifiables » contre des manifestants qui protestaient la veille contre la prolongation de la transition.

Au moins cinquante personnes, dont un journaliste, ont été tuées et des centaines blessées, selon un bilan officiel.

La Conférence des évêques du Tchad a exprimé « son regret et son indignation » au lendemain des « violences injustifiables » contre des manifestants qui protestaient, jeudi 20 octobre, à N’Djamena et dans l’intérieur du pays, contre la prolongation de la transition de deux ans et le maintien au pouvoir de Mahamat Idriss Déby.

Dans un communiqué publié vendredi 21 octobre, l’épiscopat tchadien « constate avec douleur et amertume, qu’une fois de plus, le sang des filles et des fils du Tchad a coulé ce 20 octobre 2022 au cours d’une manifestation qui se veut pacifique mais qui a été violemment réprimée ». Il « proteste avec véhémence contre ces violations de la dignité humaine ».

Dans la journée du jeudi 20 octobre à N’Djamena, la capitale, et à Moundou, la deuxième ville du pays, des milliers de personnes ont été activées à l’appel des partis d’opposition contre la décision issue du dialogue national inclusif et souverain (Dnis) de prolonger la transition militaire de deux années avec le maintien de Mahamat Idriss Déby au pouvoir. Celui-ci est à la tête de l’État tchadien depuis le décès de son père en avril 2021.

Dialogue national inclusif

Ces partis de l’opposition avaient boycotté le Dnis ouvert le 20 août, en vue de trouver des solutions à la situation sociopolitique du pays. Suite à ce boycott, les Églises catholiques et protestantes avaient demandé de suspendre le Dnis le temps de tenter avec un groupe de guides religieux et des aînés de ramener les opposants à la table des discussions. Le refus des organisateurs d’accéder à cette requête avait entraîné la décision de l’Église catholique de se retirer du processus.

Jeudi 20 octobre, le premier ministre tchadien a annoncé la suspension de « toute activité publique des partis politiques et organisations de la société civile », dont celles des partis des Transformateurs, du Parti socialiste sans frontière et de Wakit Tamma, collectif de partis d’ oppositions et d’associations de la société civile.

Prier et privilégier le dialogue

Le regain de tension inquiète dans le pays et à l’extérieur où les condamnations de la sanglante répression des autorités de la transition se font entendre. À l’instar de ces chancelleries et organisations internationales, l’Église catholique du Tchad « exprime par ailleurs sa vive préoccupation et demande à tous les acteurs politiques et aux forces de défense et de sécurité de privilégier, dans toutes les circonstances, le dialogue sincère et le respect de la dignité de l’homme et de la sacralité de la vie humaine ».

La Conférence des évêques tchadiens invite toutes les communautés et les institutions chrétiennes catholiques, les fidèles du Christ, les croyants, les hommes et les femmes de bonne volonté à « prier sans cesser pour la réconciliation des cœurs afin de favoriser la paix dans notre pays » .

Manifestation du 20 octobre : plusieurs familles sont à la recherche de leurs proches portés disparus

Après les manifestations du 20 octobre courant où l’on note plus d’une cinquante de morts, des centaines de blessés légers et graves, plusieurs personnes sont portées disparues et leurs familles sont inquiètes.

Dans cette maison située à Abena, dans le 7e arrondissement règne un silence de cimetière. L’inquiétude a gagné la plupart des membres de la famille et des proches. Deux jours, l’un des enfants issu de la famille est sorti et est resté sans trace.

« Le 20 octobre au moment où nous étions encore dedans, il est sorti. A mon réveil, j’ai demandé où est Roblesque et on m’a dit qu’il est sorti. De là on a tenté d’appeler sur son numéro mais son téléphone est fermé. Depuis avant-hier et hier, on a fait des tours dans les arrondissements, les hôpitaux même la morgue mais on ne l’a pas trouvé », a indiqué le père du disparu, Mengar Charité. Âgé d’environ 18 à 19 ans, Djinguem Asra Roblesque est sorti depuis le 20 octobre pour prendre part à la manifestation créée par la société civile et des partis politiques notamment Les Transformateurs et le Parti socialiste sans frontière (PSF). Mais le bonhomme n’est pas rentré. Il n’a donné aucun signe, son téléphone est resté fermé depuis lors.

Au sein de sa famille, les parents serrent les coudes et espèrent retrouver leur progéniture. « On va le retrouver, il serait là dans les commissariats. Ça fait mal, mais on n’a pas le pouvoir », ajoute le père de Djinguem Asra Roblesque.

Comme la famille de Djinguem Asra Roblesque, plusieurs familles issues des quartiers reculés du

9e et 7e arrondissement ont fait partie de la disparition de leurs proches ou enfants. Au quartier Abena, la radio Fm Liberté a indiqué que deux des classes du Collège d’enseignement général ont été transformées en prison. Les militaires ont fermé des manifestants dans ces salles de classe. Pour rappel, la manifestation du 20 octobre transmise par la société civile Wakit Tama et les partis politiques notamment Les Transformateurs et Le Parti socialiste sans frontière (PSF) s’est soldé par une cinquantaine de morts et plus de 300 blessés selon le gouvernement.

Les défenseurs des droits humains exigeant la libération des manifestants détenus

Réunis en urgence au sujet de l’évènement du 20 octobre dernier à l’origine de plus de 50 morts, les 7 organisations membres de l’association de défense des droits de l’homme (ADH) se prononcent. Les ADH dénoncent dans un premier temps, la répression violente de la manifestation, la destruction des biens publics et privés, exigent une enquête indépendante, impartiale afin que les compétences soient déterminées.

Les associations de défense des droits de l’homme demandent également : « la libération immédiate des détenus, la cessation de la répression et la prise en charge des victimes. » Pour éviter d’en arriver à une guerre civile, elles exhortent les différentes parties à éviter le discours de haine et d’œuvrer sans relâche pour le retour rapide à l’ordre public afin de couper les germes du communautarisme.

L’ADH exige enfin la levée des mesures restrictives liées à l’instauration du couvre-feu à N’Djamena et certaines villes du pays.

Théodore Ayissi Ayissi / Source : Marac

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