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Vie chère : Le point de non-retour

À cause de la persistance du Covid-19, l’augmentation des prix installée et incorporée dans l’espace social semble désormais très difficile à combattre.

Au marché, tout coûte cher

Le prix du pain vient, une nouvelle fois, d’être placé sous les feux de l’actualité économique au Cameroun. Il y a quelques mois, le sujet portant sur son augmentation ne se présentait que comme une possibilité théorique évoquée par les meuniers et les boulangers. De manière sournoise, la menace brandie par ces acteurs s’est concrétisée depuis le début de la semaine dernière. Le coût de la baguette a fait un bond spectaculaire. Face à cette situation, le ministère du Commerce (Mincommerce) affiche une confiante tranquillité expliquant que la situation est maitrisée. «Jusqu’à nouvel avis, le prix de la baguette de 200 grammes reste inchangé à 125 FCFA, de même que celui du sac de farine de 50 kg qui continue de coûter 19 000 FCFA au stade du consommateur final», lit-on sur la page Facebook du Mincommerce ce 15 février 2022.

«Prix au piège»
Dans le cadre de la lutte contre les manœuvres spéculatives, les équipes de la Brigade nationale de répression et de contrôle des fraudes du ministère du Commerce veillent au grain. Sur la foi d’une vidéo postée par ABK Radio le 17 février 2022, Barbara Elemva Amana (chef de la BNRCF) a utilisé des éléments de langages forts pour contraindre les boulangers à maintenir le prix du pain à 125 FCFA. Selon l’économiste Paulin André Dadjo, «le consommateur camerounais est en train de faire l’expérience des seuils à partir de l’interprétation des signes qu’émet le nouveau prix du pain au Cameroun». En tentant de mettre en scène le problème, notre interlocuteur évoque le coût du transport sur certains axes routiers du pays. «Partir de Yaoundé pour Mfou (Mefou-et-Afamba, NDLR) revient à 700 FCFA, dans des conditions précaires. Sur ce trajet bitumé et long de 18 km seulement, il n’y a pas de péage. C’est désormais ainsi depuis mars 2020», constate Paulin André Dadjo.

De l’avis de ce dernier, «c’est un scandale pour l’esprit; vraiment aux antipodes d’une prétendue gestion de la crise sanitaire». Cela se vit sur les prix du poisson fumé par exemple. «Il faut avoir au moins 1000 FCFA pour acheter un tas qui ressemble à quelque chose, un tas qui sera au moins visible dans la marmite. Alors qu’avant avec 500 FCFA, tu achetais un bon tas de poisson et ça te permettait de faire un repas. Aujourd’hui certains commerçants ne vendent plus le tas de 500 FCFA», raconte Aline. Pour cette commerçante basée à Douala, classer le tas de 500 FCFA serait une grosse perte pour elle. «Je porte le carton des gros poissons qui coûte 23000 FCFA. Lorsque je finis de fumer, j’expose les tas de 2000 FCFA uniquement. Il y a des clients qui ne préfèrent que les tas de 2000 FCFA», explique-t-elle.

Roue difficile à stopper
Pour accompagner ce raisonnement, Daniel Kemayou (enseignant de macroéconomie) pense que beaucoup vendeurs de biens et services se sont servis du contexte de Covid-19 et l’ont articulé selon leurs projets propres. «Il faut bien admettre que le discours de ces acteurs, loin d’être une représentation iconique de la réalité, est enchâssé dans des pratiques des prix qui reproduisent leur façon de voir», postule Daniel Kemayou. Le phénomène est, par exemple, très net pour les tubercules cultivés localement. «Du fait de délais d’ajustement potentiellement longs des coûts du transport, le manioc, le plantain, le haricot, la tomate ont subi des hausses», enchaîne l’universitaire. Et ça devrait durer: «Je n’envisage pas de baisse des prix avant fin 2022; car la roue semble bien difficile à stopper et ce malgré des mesures fiscales mises en place par l’autorité publique», estime Paulin André Dadjo.

Diane Kenfack et Jean-René Meva’a Amougou

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