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Univers carcéral: l’autre visage de l’échec du développement durable en Afrique !

Une plongée dans les maisons d’arrêt et autres locaux de privation de liberté sur le continent africain… Voilà, selon Florence Bernault, une autre réalité de l’échec du décollage de l’humanisation du développement en Afrique. C’est aussi l’un des piliers de l’enracinement des haines sur le continent.

 

L’histoire des réclusions en Afrique tend à démontrer que la prison a perdu son sens sur le continent. Elle s’est transformée en lieu de déshumanisation et d’ensauvagement. Elle n’est plus cette enceinte de remise en cause, ce purgatoire des hommes pour une resocialisation !

Cartographie d’une frayeur
Les chiffres parlent d’eux-mêmes et les organisations internationales le reconnaissent. La surpopulation carcérale représente un véritable défi de développement sur le continent. Depuis 2017, la Zambie, selon l’institut World Prison Brief, bat le record des prisons les plus surpeuplées, avec un taux d’occupation de plus de 300 %. En 2017, l’institut a dénombré plus de 25 000 détenus pour 9 000 places disponibles sur l’ensemble du territoire zambien. Le Cameroun, la même année, comptait 27 997 détenus pour 17 000 places officielles. En Angola, au Tchad, au Burundi, au Nigéria et en Afrique du Sud, les maisons d’arrêt contribuent fortement au taux de mortalité. Sur le continent, seuls le Rwanda, le Niger, la Namibie, le Lesotho, l’Algérie et le Botswana ont un taux d’occupation inférieur à 100 %.

L’atteinte de ce résultat dépasse largement la seule compétence de l’administration pénitentiaire. Les conditions de détention sur le continent dévoilent de manière mécanique une insuffisance du système judiciaire. Dans la grande majorité des pays d’Afrique, plus d’un prisonnier sur deux est en détention provisoire, souvent pour une durée indéterminée, rapportait Human Rights Watch en 2018. Ainsi, plus de 70 % des prisonniers en République centrafricaine, en République démocratique du Congo, mais aussi au Bénin, n’ont pas encore été jugés par la justice.

Au bord de l’implosion
En Afrique, il est commun de vivre des mutineries dans les prisons. Les évènements survenus à Yaoundé le 22 juillet, et à Buea le lendemain sont monnaie courante. En 2017, les détenus de la prison de Natitingou au Bénin ont manifesté leur colère. Du fait de la diminution de leurs rations alimentaires, ils ont refusé de regagner leurs cellules pendant plusieurs jours. En réaction à cette grogne, le gouvernement béninois a annoncé la création d’une agence pénitentiaire, la construction d’une maison d’arrêt à Cotonou et a promis une amélioration des services d’alimentation et de santé.

À la surpopulation carcérale se greffent, de manière mécanique, évidente et logique, le manque d’accès aux soins, des épidémies de gale ou de malaria, une chaleur ou fraicheur excessive, la pénurie d’eau et de nourriture… Plusieurs détenus ont vu leur situation sanitaire, déjà fragile, s’aggraver. Le taux de mortalité des détenus sur le continent est alarmant. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a décrié l’ampleur du phénomène à maintes reprises.

Indicateur de développement
La réclusion en Afrique est très souvent synonyme de condamnation à mort même pour des petites peines. Il est question de surpopulation, insécurité, violence, insalubrité, trafics en tout genre, manque de nourriture et de médicaments entre autres. La qualité du séjour carcéral est pourtant au cœur du développement durable dans le fameux agenda 2063. La préoccupation est transversale et intègre pas moins de 7 objectifs de développement durable (ODD). Ainsi, l’on a : le 2 (être à l’abri d’une situation de faim) ; le 3 (favoriser la bonne santé et le bien-être de tous à tout âge) ; le 4 (possibilité de bénéficier d’un apprentissage tout au long de la vie) ; le 5 (égalités de chances) ; le 6 (vivre dans un environnement assaini et pourvu en eau) ; le 10 (pouvoir être intégré après un séjour carcéral) ; le 16 (jouir d’une justice impartiale et respectée).
Il y va de la stabilité, de la durabilité et de la sureté du continent !

Zacharie Roger Mbarga

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