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Tabaski 2020 : La Covid-19 gangrène le marché du mouton

À quelques jours de la plus grande fête musulmane, les vendeurs tiennent une chronique commerciale suspendue à la pandémie.

Arrivée des moutons au marché 8e

Marché 8e (Yaoundé 2), ce 11 juillet 2020. Gamat et Yacouba sont assis sous un hangar à boire du thé. De la Tabaski de cette année, les deux hommes n’ont encore qu’une idée confuse. «On ne sait pas encore comment on va faire», marmonne le premier. Manifestement plus averti, le second lie la fête à l’évolution de la pandémie du coronavirus. «L’affaire de la maladie qui est dehors-là gâte le marché», dit-il. Tenant à faire des comparaisons avec ses «bonnes affaires» à l’approche de l’évènement dans les années antérieures, Yacouba affirme: «Le marché est mort cette fois. Regardez! c’est presque vide. Il n’y a pas assez de moutons; aucune voiture n’est venue du Nord; pas de clients. Quand le marché tourne normalement, je peux vendre 5 à 8 moutons par jour. C’est compliqué pour nous maintenant».

Comme pour expliquer la situation, Gamat la lie à la fermeture des frontières avec certains pays voisins. Il parle notamment de la forte réduction des expéditions de moutons du Sahel vers le Cameroun. Dans son argumentaire, le «seigneur du mouton» (comme il se fait appeler) évoque le désengagement de nombreux intermédiaires courtiers qui, par le passé, ont souvent garanti les opérations et ont facilité les opérations de vente et d’achat des bêtes, suivant des axes généralement orientés du nord vers le sud avec, dans certains cas, des bretelles est-ouest. «Ces gens ont tout laissé quand le corona est venu», se désole notre interlocuteur. Pour tout comprendre, la crise sanitaire actuelle gangrène la mobilité commerciale du bétail.

«Et du coup, cela a une incidence sur le marché», appuie Léon Djida, vétérinaire chargé du contrôle des petits ruminants au marché 8e. Près de lui, un véhicule se gare. Il n’a transporté que quelques moutons. Le conducteur raconte être allé près de la frontière avec le Nigéria pour revenir bredouille, bien qu’ayant investi près de 4 millions FCFA pour acquérir 160 bêtes. «À l’approche de chaque Tabaski, nous faisons un suivi du marché en recensant quotidiennement les animaux qui sont amenés ici. Actuellement, les moutons viennent petit à petit.

Certainement le coronavirus a des répercussions sur le nombre de sujets attendus. Économiquement, peut-être que les populations n’ont pas assez de moyens pour s’approvisionner dans les pays limitrophes. Et même si les moutons viennent, leurs prix pourraient être très élevés, puisque le nombre escompté peut ne pas être atteint. Vous comprenez que pour la Tabaski, le marché risque répondre uniquement à la demande des riches» prévoit Léon Djida. En tout cas, tout semble lié selon lui: «à chaque Tabaski, l’offre en moutons s’inscrit dans un marché de masse peu élastique. Elle s’adresse à l’ensemble des consommateurs, et la moindre hausse du prix se traduit immédiatement par une baisse sensible des ventes».

À l’approche de la célébration de la fête du sacrifice, les prix des béliers passent souvent du simple au double dans les marchés de Yaoundé.

Jean-René Meva’a Amougou

 

Covid-19 en Afrique

La côte d’alerte

D’après l’OMS, le continent a passé la barre des 500 000 cas d’infection à la Covid-19. L’Afrique du Sud à elle seule en compte près de la moitié (238 339).

L’Organisation mondiale de la santé prévient: «la situation s’aggrave dans le monde». Depuis Genève, le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a indiqué le 6 juillet dernier que «la plus grande menace est désormais le laisser-aller», ajoutant que «la plupart des gens dans le monde sont encore susceptibles d’être infectés». Et de compléter: «Nous en sommes à six mois depuis le début de la pandémie, ce n’est pas encore le moment de lever le pied». En Afrique, on atteint la barre du demi-million de cas cumulés (540 207 cas confirmés en tout, à ce jour), avec l’Afrique du Sud comme épicentre de l’épidémie. La nation arc-en-ciel compte en effet 238 339 cas cumulés soit près de 45% de l’ensemble de l’Afrique, suivie très loin derrière par l’Égypte (79,254 cas), le Nigéria (7,23 % des cas africains), le Ghana (5,52 %), l’Algérie (4,19%), le Cameroun ( 3,51%), et la Côte d’Ivoire (2,71%).

«L’Algérie, l’Égypte, le Ghana, le Nigéria et l’Afrique du Sud représentent environ 42% des cas de Covid-19», admettait encore la branche africaine de l’OMS dans un communiqué, il y a encore quelques jours, avant le nouveau bond sud-africain. Plus encore, les cas ont plus que doublé dans 22 pays de la région. Des tendances jugées «préoccupantes», par l’OMS, relevant notamment «la fragilité des systèmes de santé sur le continent», avec quelque 12 000 décès au total (bien que seules l’Égypte et l’Afrique du Sud comptent plus d’un millier de décès).

Selon l’ONG Alima (Alliance for International Medical Action et son directeur Augustin Augier (cité par Radio France Internationale le 10 juillet 2020), «la plupart des pays africains ne seront pas en mesure de prendre en charge les 15% des cas les plus sévères et les 5% des cas qui nécessitent une réanimation». Ce qui, selon lui, en comparaison avec l’Europe, «multiplierait au minimum par cinq, le taux de mortalité en Afrique». Alima demande donc aux États de faciliter l’accès des ONG au terrain en rouvrant les frontières qui ont été fermées.

L’une des complications pour les États africains confrontés à la violence ou au terrorisme sera de lutter contre l’épidémie tout en maintenant sa posture de riposte militaire. Ainsi au Nigéria, où les attaques de Boko Haram ne cessent pas (encore 70 militaires tués lundi), ou au Burkina Faso face aux djihadistes (le pays du Sahel qui recense le plus de cas de Covid-19.

Le continent africain a déjà été traumatisé par l’épidémie Ebola (plus de 11.000 morts en trois ans avec un taux de mortalité de 40% parmi les cas traités). Il reste également frappé par la persistance de plusieurs autres maladies infectieuses comme le choléra, la méningite et la fièvre jaune.

Ongoung Zong Bella

Team Europe

Ces États partenaires du Cameroun contre la Covid-19

Membres de l’Union européenne et acteur de la TeamEurope, l’Allemagne, la France et l’Italie ont pesé de leur poids dans le cadre de l’aide européenne au Cameroun pour lutter contre la Covid-19.

 

Face aux ravages causés par la pandémie du coronavirus, ces trois États ont, chacun en ce qui le concerne, mobilisé des fonds pour soutenir le Cameroun.

Allemagne
Le gouvernement fédéral allemand fournira, à travers le programme de coopération bilatérale GIZ au Cameroun, 1 million d’euros. Soit 656 millions FCFA pour lutter contre la Covid-19. La priorité est mise sur certaines actions : campagnes de sensibilisation, matériels de protection et d’analyses, etc. Dans ce cadre-là, la GIZ, l’Institut Pasteur et bien d’autres institutions sont en pourparlers avec le gouvernement camerounais. Ce n’est pas tout. L’Allemagne a également apporté un soutien à la police camerounaise, au travers des dons en matériel de protection et de désinfection estimés à près de 13 millions FCFA (20 000 euros).

France
Présente au Cameroun depuis plusieurs années, la France s’investit pour soutenir le Cameroun dans la lutte contre la pandémie planétaire. Pour la réponse rapide au Covid-19, le pays a va offrir 6,5 milliards FCFA (10 millions d’euros). Réorienté sous la forme d’une aide budgétaire ciblée sera usité par le ministère de la Santé selon deux des axes de son plan de riposte. Il va couvrir les dépenses liées à la recherche active des cas, au dépistage sur l’ensemble du territoire et à la prise en charge des cas positifs.

Italie
L’Agence italienne pour la coopération au développement (AICS) a réaffecté certains fonds initialement destinés à des interventions mineures sur l’instrument de gestion directe, aux actions de lutte contre la pandémie. AICS procèdera à la fourniture d’équipements médicaux, des dispositifs de protection individuelle, des équipements hospitaliers et de laboratoire pour faciliter la réalisation des tests de confirmation de positivité au virus. L’agence va également renforcer les structures hospitalières pour la prise en charge, en offrant une enveloppe de 164 millions FCFA (250 000 euros).

Synthèse de Joseph Julien Ondoua Owona, stagiaire

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