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Souveraineté monétaire : l’Afrique cherche sa voie après l’assassinat de Kadhafi

Le projet de monnaie unique africaine devrait franchir un nouveau palier. Du 4 au 8 mars prochain, Yaoundé (Cameroun) accueille le troisième comité technique de l’UA spécialisé sur les finances, les affaires monétaires, la planification économique et l’intégration. Les experts et les ministres devront aborder le projet de monnaie unique africaine. 

Deux moments forts vont meubler ces échanges. De prime abord, la présentation du rapport de l’association des banques centrales africaines. Ledit rapport présentera l’état de la coopération monétaire en Afrique. Il est également attendu que les dirigeants des banques centrales africaines proposent un cadre de suivi de la convergence macroéconomique accompagné d’un mécanisme d’évaluation par les pairs. De manière précise, les experts évoqueront le raffinement des critères de convergence du Programme de coopération monétaire en Afrique (PCMA). Ils vont présenter l’évolution des réflexions sur l’agence de notation africaine.

Défis
L’examen du rapport du Comité des ministres africains des finances (F15) constituera le second temps fort de ces échanges. Il montrera la préparation des États à la mise en œuvre de l’union monétaire et reviendra sur le fonctionnement du Fonds monétaire africain (FMA). Pour que cette institution, dont le siège a été fixé à Yaoundé, soit opérationnelle, il faut qu’au moins quinze des 54 États que compte l’Afrique ratifient ses textes fondateurs. À ce jour, aucun pays africain ne l’a fait.
«En raison de quelques difficultés financières (salaires impayés et non disponibilité d’un budget de fonctionnement), le comité de pilotage du FMA mis en place en septembre 2009, ne fonctionne plus depuis 2011: les experts et personnel qui le composaient sont rentrés dans leur pays respectif (Nigeria, Côte d’ivoire, Mali, Tunisie, Éthiopie)», révèle l’ancien ministre camerounais Gankou Fowagap, dans la «Lettre de la Recherche» de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) publiée le 3 janvier 2019.

Lors de leur dernière assise, les banques centrales africaines ont repoussé l’échéance d’une monnaie unique africaine à l’horizon 2045. Les dates préalablement retenues et sans cesse repoussées étaient 2020 puis 2025, 2030. L’Association des banques centrales africaines (ABCA) a présenté l’incompatibilité des modèles économiques des États africains et la persistance des chocs exogènes. Mais l’on sait que le projet est regardé avec méfiance par les puissances occidentales. Selon un courriel confidentiel adressé à Hillary Clinton, l’intervention de Nicolas Sarkozy en Libye aurait été motivée par la décision de Mouammar Kadhafi de créer une monnaie panafricaine vouée à se substituer au franc CFA et menaçant donc l’influence française.

Dynamisme
Le courriel est daté du 1er avril 2011, figure dans le train de courriels divulgués fin décembre 2015 dans le cadre du «e-mailgate» de Clinton Hillary. Il évoque l’existence d’un stock d’or (143 tonnes) et d’argent (143 tonnes également) -soit une valeur de 7 milliards de dollars- accumulé par Kadhafi dans le but de lancer le projet de monnaie panafricaine. Difficile de dire à ce jour où se trouve cet argent.

Aujourd’hui, plusieurs unions monétaires à l’échelle des communautés économiques régionales sont sur le point de voir le jour. En Afrique de l’Ouest, la Cedeao veut réussir le pari de sa monnaie unique en 2020. Le 1er février dernier, au terme de son 20ème sommet ordinaire, la communauté d’Afrique de l’Est (CAE) a annoncé la mise en eau de sa monnaie unique en 2024.
Au moment où la mise sur pied du FMA piétine, il est légitime de s’interroger si la stratégie du traité d’Abuja sera respectée. À savoir, des unions monétaires régionales qui fusionneraient pour ne créer qu’une seule union monétaire continentale.

Zacharie Roger Mbarga

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