Rodly Saintine : Le journaliste tue la mort au quotidien

Chaque jour, le spectre de son assassinat agite l’homme de médias haïtien.

Rodly Saintiné dans son élément.

« J’ai très peur pour ma vie ». En revisitant son parcours d’homme et de journaliste, Rodly Saintine convoque les craintes qui sont désormais les siennes. Le présentateur d’une émission radiophonique sur AlterRadio, correspondant culturel pour RFI et enseignant en journalisme, à la suite de menaces de mort. Depuis le 20 juin dernier, il n’a pas soufflé. « Je suis présentement dans une situation très difficile. Et ma famille l’est également. Nous sommes tous cloîtrés dans un endroit différent, et évitons d’entrer en contact les uns avec les autres par sécurité », raconte-t-il.
Son histoire est celle d’un personnage érigé malgré lui en paria. Pour échapper à ceux qui ne jurent plus que par l’obtention de sa peau, sa méthode est simple : ne plus se faire repérer. Cette posture du collègue de Claudy Siar lui permet de tenir fébrilement face aux gangs de Cité soleil (quartier où il a grandi et réside toujours) qui l’accusent d’avoir livré de précieuses informations les concernant à la presse et à la police nationale d’Haïti (PNH), au lendemain de l’assassinat de l’inspecteur de police, Adolph Mirabel, le 5 juin, à Port-au-Prince.

Des bandits armés tentent à plusieurs reprises de faire irruption chez Rodly Saintiné qui habitait la zone de Drouillard, commune de Cité Soleil. Monsieur Saintiné appelle au secours les autorités policières et judiciaires et la Presse en particulier pour pouvoir sauver sa peau. Le jeune présentateur qui subit de fortes pressions de la part des gangs armés puissants du bas de Delmas est obligé de se mettre à couvert. Par ailleurs, Rodly Saintiné dit recevoir des appels inconnus venus de toute part lui proférant des menaces mortelles. La victime appelle les autorités policières, la presse nationale et internationale à son secours. « L’opinion publique est avertie. Je suis contraint de limiter considérablement mes déplacements. Je suis sur le qui-vive », lance Rodly Saintiné.

Ecce homo…
La presse haïtienne ne tarit pas d’éloges pour parler de l’homme. « Rodly Saintiné est né le 4 septembre 1990 à Cité-Soleil et y a grandi dans une famille monoparentale. Abandonné par son géniteur dès la conception, il a vécu une enfance précaire malgré l’incommensurable amour de sa mère. Rodly a toujours été fier et reconnaissant des efforts impayables d’une mère qui, en dépit de la misère, n’a jamais cessé de se battre en bonne guerrière pour inculquer à son fils les meilleures notions de base et qui n’a jamais hésité à se sacrifier pour son bonheur », écrit le National dans son édition du 8 mai 2018.

« Visage ouvert, un peu timide, très jovial, gai et enthousiaste, Rodly a toujours été très intelligent, brillant et motivé dès sa plus tendre enfance. Dans sa classe, il n’a jamais négocié sa première place. C’était pareil pour tous les concours auxquels il participait ». En raison de son incomparable intelligence, il a pu faire deux classes au cours d’une année. Rodly nourrit un orgueil le portant à la réalisation de ses objectifs. « Je ne me permets jamais d’être deuxième en quoi que ce soit; le deuxième est le premier perdant, je me bats toujours pour réussir et tenir très haut le flambeau », dit-il avec fermeté. Ses loisirs préférés ont été et demeurent la musique et la lecture. Depuis l’âge de six ans, Rodly développe une affinité pour la communication, particulièrement l’animation à la radio. Il a toujours eu cette grande envie de devenir un animateur célèbre.

Ses études classiques achevées quand il a eu l’âge de 17 ans, il a tout de suite décidé de faire des études universitaires. Rodly a fait d’une pierre deux coups en intégrant la faculté d’Ethnologie pour étudier la socio-anthropologie et COPRATEL pour étudier la communication. Rodly Saintiné a connu au cours de son existence une vie très mouvementée. Il n’a jamais cessé d’apprendre, soit sur Internet, soit à travers des formations qu’il a dû suivre au sein de différentes institutions en Haïti, notamment, au petit conservatoire où il a reçu des formations sur le théâtre, à « Fondasyon konesans ak libète » FOKAL, à l’Institut Français en Haïti (IFH) et tant d’autres. Rodly a dû poursuivre ses études en communication en Europe, précisément à École de France sur la réalisation, la production et l’animation d’émission à la radio. « Au fil du temps, à travers son incessante ambition de se former, il est devenu un journaliste multimédia », lit-on encore dans Le National.

Jean René Meva’a Amougou

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