Processus ITIE : Le Cameroun menacé de suspension

A quelques jours de l’échéance de validation, le pourcentage de mise en œuvre des mesures correctives se situe à seulement 14%.

«Le risque que le Cameroun soit suspendu de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) après le 29 décembre prochain est de 86%». C’est la principale conclusion de la pré-évaluation par la Société civile camerounaise du niveau de mise en œuvre des mesures correctives adressées au Cameroun par le Conseil d’administration de l’ITIE. Dans la perspective d’attirer alors l’attention des pouvoirs publics sur cette forte probabilité de suspension, la Plateforme de représentation et de redevabilité des organisations de la société civile impliquées dans la gouvernance du secteur extractif au Cameroun (OSCC-ITIE) a donné une conférence de presse le 23 décembre dernier à Mvolyé. On en retient notamment que  depuis 2017, le Conseil d’administration de l’ITIE avait en effet relevé des manquements et formulé le 28 juin 2018, des mesures correctives à mettre en œuvre jusqu’en la fin 2019. Selon la Société civile camerounaise toutefois, les choses n’ont pas beaucoup évolué et plusieurs éléments peuvent expliquer cet état des choses. Au rang des choses non corrigées, il y a des lenteurs à constituer le Registre des licences ; la non-publication en ligne des données sur les activités de production et le silence sur les transactions des entreprises d’Etat, bien que le rapport ITIE de 2016 donne quelques renseignements. La plateforme regrette  aussi l’inefficacité dans le traitement des transferts infranationaux ; le défaut de communication sur les informations relatives à la répartition des revenus et la difficulté à présenter les résultats et l’impact de ladite mise en œuvre.

Interpellation

Pour éviter l’humiliation d’une suspension, la plateforme a préconisé à l’intention du gouvernement, du collège des compagnies extractives et du Comité ITIE Cameroun, un certain nombre de mesures à court terme. Parmi celles dépendant du gouvernement, on peut retenir la réorganisation du Comité pour donner plus de liberté de gestion à la société civile conformément à la Norme et la promulgation du décret d’application de la loi portant code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques au Cameroun. Quant au Comité, il doit améliorer sa gouvernance interne en se dotant le plus tôt possible d’un organigramme, d’un règlement intérieur et de manuels de procédures. Il s’agira par exemple de régulariser la situation du personnel du Secrétariat permanent et de clarifier son statut, cet aspect ayant constitué l’une des principales préoccupations du Conseil d’administration de l’ITIE lors de la première validation. Pour sa part, la Plateforme s’engage à veiller à ce que le processus ITIE au Cameroun soit conduit dans le respect de la norme, à mener un plaidoyer pour la prise en compte dans le plan de travail du Comité des interventions réalisables par la Société civile et à mettre à jour la liste de ses besoins en renforcement de capacités.

Dans le cas d’une suspension, le Cameroun devrait probablement perdre les acquis de son statut de pays conforme à L’ITIE chèrement conquis en octobre 2013. «En plus de son image, le pays pourrait perdre la confiance des partenaires au développement. Le Congo Brazzaville a dû produire un rapport ITIE pour bénéficier du programme en cours du FMI. Quant au Niger, son retrait volontaire de l’ITIE a entraîné la suspension de plusieurs programmes et financements. Aujourd’hui le pays cherche à être réintégré», a lancé en guise de mise en garde Eric Bisil de Publiez Ce Que Vous Payez (PCQVP Afrique centrale).  Tout de même, il reste encore au Cameroun via le Comité, la possibilité de demander une prorogation, ce qui serait déjà d’ailleurs fait, même si là-dessus les membres de la plateforme ne sont pas tombés d’accord. Quoi qu’il en soit pour Dupleix Kuenzob, modérateur de la conférence de presse, «il faut généralement des circonstances exceptionnelles pour qu’une telle demande puisse prospérer et le Cameroun ne se trouve pas dans ce cas de figure». Au demeurant, il appartiendra en dernier ressort au Conseil d’administration de L’ITIE qui se réunira à Oslo, en Norvège, de décider du sort du Cameroun.

Théodore Ayissi Ayissi (stagiaire)

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