En pleine retraite sur l’adoption du nouveau format de sa coopération avec l’Union européenne, l’Afrique reçoit un coup de pression de Bruxelles.
L’Afrique semble désormais le théâtre de l’affrontement des grandes puissances. Après l’Inde, l’Allemagne, la Grande Bretagne et le grand festival chinois à Pékin, l’Union européenne (UE) apprête ses biscuits. L’accord de Cotonou expirant en 2020, les ministres africains des Affaires étrangères sont réunis en conseil exécutif à Addis-Abeba pour adopter la position commune africaine sur le partenariat futur UE-ACP. Au même moment, l’UE, à travers le président de la Commission, Jean Claude Juncker, propose un accord de libre-échange de continent à continent pour renforcer la relation commerciale et financière.
Africa First
Alors que l’obsession européenne de l’immigration irrégulière semble se dessiner comme le principal point de blocage des négociations, l’Afrique paraît vouloir imposer ses priorités. Celles-ci ont davantage trait à la création d’emplois, à l’industrialisation, à l’investissement et au réinvestissement. Au lendemain du sommet de Beijing, l’Afrique détient son élément de comparaison pour mettre la pression sur ses autres partenaires. Au moment où les négociations sur le nouvel accord UE-ACP pointent à l’horizon, le timing est parfait pour tenter d’obtenir bien plus que du commerce.
Pour Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’UA, «il s’agit de construire une nouvelle alliance qui respecte les priorités africaines de développement contenues dans l’Agenda 2063. Et de ce fait, l’Afrique doit parler d’une seule voix pour négocier d’égal à égal».
Carlos Lopes, désigné Haut-représentant aux négociations pour l’UA, estime que «un no deal sur la migration pourrait empêcher la conclusion d’un nouvel accord de Cotonou. Mais ce dernier ne serait pas enterré. Cotonou a le potentiel d’être étendu». L’économiste bissau guinéen invite déjà les Européens au réalisme car «la migration joue un rôle relativement mineur dans l’accord de Cotonou actuel».
Libre-échange
A l’approche des élections européennes, le Parlement européen a connu son dernier débat sur l’état de l’union le 13 septembre dernier. Le président de la Commission européenne qui livrait
son dernier discours comme Chef du gouvernement européen, a fait une nouvelle proposition au continent africain. «Nous proposons aujourd’hui une nouvelle alliance entre l’Afrique et l’Europe, une alliance pour des investissements et des emplois durables. Cette alliance permettrait de créer jusqu’à 10 millions d’emplois en Afrique durant les 5 prochaines années».
Pour lui, l’Afrique n’a pas besoin de charité mais d’un partenariat équilibré. Le «continent cousin» à l’Europe effectue déjà 36% de son commerce avec l’UE ; «mais les échanges commerciaux entre nous ne sont pas suffisants». C’est à ce titre qu’il plaide pour «un accord de libre-échange de continent à continent avec l’Afrique» en lieu et place des APE. Une pression au projet de nouvelle de la soie qui prend progressivement corps sur le continent.