Offensive diplomatique en Afrique centrale: passe d’armes au Cameroun entre Macron et Lavrov

Selon certaines sources et sauf nouveau changement, le ministre russe des Affaires étrangères est annoncé dans les prochaines heures à Yaoundé. Il vient prendre la place encore chaude laissée par le président français également en tournée de ralliement en Afrique.

La Russie et l’Europe n’entendent pas se faire de cadeaux depuis le déclenchement de la Guerre en Ukraine. Et la récente tournée entreprise simultanément sur le continent africain est là pour en témoigner. Elle a conduit le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, le 24 et 25 juillet dernier au Congo Brazzaville. Tandis que le président français, Emmanuel Macron, se rendait du 25 au 26 juillet 2022 au Cameroun. À en croire D’ailleurs une publication du journaliste Polycarpe Essomba sur sa page Facebook officielle, le chef de la diplomatie russe est également sur le point de faire à son tour escale au Cameroun. «À peine Emmanuel Macron parti, Sergueï Lavrov, le tout-puissant ministre des Affaires étrangères russe, est annoncée dans les prochaines heures à Yaoundé», peut-lire. Ce qui place encore un peu plus le Cameroun et l’Afrique centrale au cœur d’une âpre bataille géostratégique et en fait, en même temps, un nouveau théâtre d’opérations pour ces grandes puissances.

Ralliement

Le Cameroun et le Congo présentent à peu près les mêmes profils pour ces puissances en guerre froide. D’un côté, il faut considérer que le Cameroun est le pays leader de la sous-région et qu’il occupe une position centrale dans le Golfe de Guinée. Mais de l’autre, les deux pays sont en effet producteurs d’hydrocarbures et ils ont tous les deux affiché leur neutralité face aux deux blocs en opposition. Ce sont à cet égard des pays stratégiques d’Afrique centrale que chaque camp espère encore rallier à sa cause. Non seulement pour mettre un terme à la guerre à son avantage. Et en attendant, pour pouvoir régler d’une manière qui arrange chacun d’eux, la crise alimentaire mondiale. Il reste à savoir ce que viendra promettre au gouvernement camerounais, le chef de la diplomatie russe.

Sécurité alimentaire

La guerre en Ukraine et la sécurité alimentaire ont en effet fait partie des sujets abordés par Emmanuel Macron au cours de sa visite officielle à Yaoundé. Aux côtés de son homologue camerounais, Paul Biya, il a évoqué «la volonté d’avancer ensemble en matière de sécurité alimentaire». À en croire le président français, «la hausse des cours des matières premières et les difficultés d’approvisionnement dans un contexte d’inflation étaient pour une partie, due à une reprise non coordonnée. Mais elles ont été largement aggravées par la guerre lancée par la Russie en Ukraine et qui n’épargne ni l’Afrique, ni le Moyen-Orient, ni l’Europe». Achevant de tirer à boulets rouges sur la Russie, l’hôte du Cameroun indique: «et alors-même que nous sortons de la crise liée au Covid-19, ce conflit met à l’épreuve directement nos économies et en particulier la vôtre».

C’est donc pour faire face à ces conséquences en Afrique, qu’une initiative est envisagée. Elle devrait permettre «d’une part de faire circuler les denrées alimentaires, mais surtout de produire davantage dans les pays qui en ont besoin. En particulier les pays d’Afrique». Emmanuel Macron met ainsi en avant «l’objectif de formation, de production agricole et de grande autonomie africaine en matière d’engrais. C’est un partenariat public-privé que nous voulons ainsi établir».

Le ministre russe des Affaires étrangères se veut également rassurant de ce point de vue. Tout en continuant à rejeter la faute de la situation actuelle sur les sanctions imposées par l’Occident, il laisse entendre que son pays a ouvert une soupape de sécurité pour permettre aux pays africains de respirer. Il s’agit de «l’accord récemment obtenu sur les couloirs sécurisés pour les exportations de céréales», a-t-il réitéré au président Denis Sassou Nguesso le 25 juillet dernier. Après l’avoir fait au Caire en Égypte. Le chef de la diplomatie russe était censé ensuite se rendre en Ouganda et en Éthiopie.

Terrain militaire

Les aspects sécuritaires et de lutte contre le terrorisme offrent également aux puissances en présence une occasion de s’affronter en Afrique centrale. La Russie a déjà marqué son territoire avec deux belles prises. En Centrafrique où elle a évincé la France et au Cameroun avec lequel des accords de coopération militaire viennent d’être renouvelés. «Nous avons signé avec ce pays un accord de coopération qui était venu à expiration et on l’a renouvelé», indique le président camerounais. Paul Biya souligne toutefois que «le voyage de mon ministre en Russie n’avait pas de rapport avec la situation en Ukraine. C’était un acte dans la routine des relations diplomatiques entre nos deux pays».

De son côté, la France est certes en perte de vitesse, mais garde une certaine influence. «Nous avons évoqué la situation d’autres pays de la sous-région, notamment de la RCA, et notre préoccupation commune à l’égard des ingérences», a laissé entendre le président français. Avant de pointer un doigt accusateur sur «les mercenaires russes». Pour enfin annoncer le renforcement d’une «coopération qui va permettre d’agir contre le terrorisme dans le Bassin du Lac Tchad». Et Emmanuel Macron de préciser : «nous avons ensemble évoqué de le faire en lien avec tous les pays de la région qui sont touchés par ce phénomène, comme d’ailleurs la France».

Théodore Ayissi Ayissi

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