Mondialisation: Black Panther, une arme pour l’Afrique

C’est un truisme, le nouveau combat de la mondialisation est culturel. Dans cette bataille, l’Afrique perd pied car faible en proposition et fertile en consommation.

Et pourtant, comme le martelait Aimé Césaire, Sédar Senghor et autres Gontran Damas, la culture africaine devrait s’élever vers l’universel. Objectif : faire rayonner sa richesse singulière au carrefour du donner et du recevoir.

La Négritude, ce courant littéraire qui a inspiré et accompagné un certain combat pour l’émancipation de l’être de couleur noire, vient peut-être d’influencer le dernier chef d’œuvre du petit écran. Hollywood et les studios Marvel viennent de créditer l’Afrique d’un nouveau royaume : le Wakanda. Un territoire imaginaire dans une Afrique équatoriale où on retrouve neige et vibranium. Rien que le concept en vaut le détour ! «Tchalla», prince héritier, doit conquérir puis reconquérir le trône. Les avancées technologiques mises en scène dans cette Afrique plonge le spectateur dans un afro-futurisme sans pareille. Face à l’exhumation et à la modernisation du débat afro-nihiliste qui nie au continent toute prouesse, toute originalité culturelle et dont toute emprunte historique. La production cinématographique afro-américaine à plus de 600 millions de dollars de recettes apparait comme une réponse du berger à la bergère.

 

Africanité

Même s’il faut craindre le melting-pot des coutumes et les libertés technologiques, le mérite de Black Panther c’est le dévouement et la rigueur à honorer les codes. Ainsi, totems, rites initiatiques, herbes médicinales, grands guérisseurs, grand prophète, reine-mère, royaume des morts, animaux de combats, commando féminin… sont quelques éléments de la tradition et de la royauté africaine qui n’ont pas échappé aux réalisateurs afro-américains du nouvel opus cinématographique.

Au plan symbolique, les hommes et femmes de couleur noire représentent 90% des personnages sollicités et 99% des rôles principaux. On y retrouve la construction théocratique des sociétés africaines faisant du Chef, le gardien des traditions et de la religion. Une conception que veut renverser un autre ordre postulant.

Le film nous replonge également dans la réalité des amazones du royaume de Behanzin dans le Dahomey ancien (actuel Bénin). Le roi au totem de la panthère noire confie sa sécurité à une garde rapprochée essentiellement féminine. Toutes ces scènes sont non sans rappeler le régime institutionnel, les traditions (us et coutumes) d’une Afrique originelle. Plus loin, c’est la théâtralisation d’une Afrique de la tolérance. Où l’étranger à la peau blanche est un hôte privilégié et un allié de la défense des intérêts de la communauté.

 

Valeur ajoutée

Le pays africain du Wakanda est un accident géologique. Il est construit sur un immense gisement de vibranium. Un métal précieux aux propriétés incroyables pouvant permettre une révolution technologique. Encore une fois, rien de très fantasmagorique !

Voilà donc un continent a-historique et sans génie mis à nu dans une production cinématographique. Voilà un pan d’une civilisation millénaire qui nous est vendue autrement. Le monde ouvert, où s’expriment plus que jamais les individualités, commande à l’Afrique de vendre davantage sa singularité. L’Occident s’est endormi un jour et s’est réveillé avec la Chine comme deuxième puissance. Cette montée en puissance n’a toujours pas fait l’objet de reconnaissance. En témoigne le dernier discours du secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson à l’Université Georges Mason à Fairfax en Virginie. Ou encore les révélations françaises sur l’espionnage chinois de l’Union Africaine. Qui ne se rappelle pas de la percée du kungfu chinois au cinéma ? Un levier actionné après l’offensive de la porcelaine chinoise. La sympathie provoquée a donné lieu à des financements puis à l’apprentissage de la langue et à l’installation des centres Confucius dans le monde. Oui la culture est une arme géopolitique !

Et si au-delà de la culture, black panther se révélait comme la scénarisation de la trajectoire Africaine de l’âge d’or à celui de la dépendance? Invitant implicitement le continent noir à reconquérir sa noblesse? Et si le Wakanda était l’Afrique ? Et si le Wakanda parlait à l’Afrique?

 

 

Zacharie Roger Mbarga

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