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Mboriko Bane’ka (Moungo) : un village au péril des «merveilles» foncières

CamScanner 09-30-2023 19.55

Sur les ruines de la Compagnie pastorale africaine (CPA), un ranch privé aujourd’hui fermé, certains se la coulent douce, tandis que d’autres endurent le mépris.

 

De loin, on le dirait paisible, presque alangui. Peut-être à cause de ses platanes et de ses rondeurs. Ou alors de ses portiques forestiers enveloppés dans le brouillard. Juste une impression. À l’intérieur, Mboriko Bane’ka (village situé dans l’arrondissement de Nkongsamba 3e) s’époumone. Une seule anecdote suffit pour comprendre: «Notre village baigne dans un mélange de colère et de frustration depuis l’installation de la CPA pendant l’époque coloniale… Nous avons choisi de ne pas interroger cette affaire sur son sens, mais sur sa cause», renseigne Thomas Moukala. «Les colons blancs sont venus chasser les villageois de leurs terres, érigeant une longue clôture de 50 kilomètres environ. À l’aube de l’indépendance du Cameroun en 1960, les colons partis, vint un certain Mohamadou Catche à la tête de la CPA. Après la mort de ce dernier, il y a quelques années, l’un de ses fils, soit disant héritier de son père et ex-ouvrier de la CPA, tente de fonder sa légitimité sur quelques compléments solennels à première vue à savoir, les titres fonciers N°640 d’une superficie de 121 hectares 42 ares et N°69 d’une superficie de 250 hectares 90 ares.

Immatriculé le 24 décembre 1941, le premier est conforté par l’acte notarié du 29 septembre 1949. Le second a été immatriculé le 15 novembre 1960 suivant un acte administratif signé à Yaoundé le 24 janvier 1963. Le troisième titre foncier reste introuvable à ce jour. Et il y a pire: se prévalant propriétaire exclusif de nos terres, un présumé membre de la famille Mohamadou Catche se livre déjà à la vente avec la complicité des gens aux visages masqués, auxquels il offre gracieusement des lots et qui constituent son paravent», explique le mandataire et porte-parole des populations de Mboriko Baneka.

Démesure et esseulement
Plongées dans l’épaisseur tragique de la spoliation (entre 1949 et 1963) de près de 370 hectares de terrain appartenant à leurs ancêtres, Thomas Moukala et ses congénères jettent un regard nouveau sur le passé, et s’inscrivent dans un mouvement de restitution de la vérité. À travers leurs mots, ils sont totalement déterminés par les conditions limites de vie auxquelles ils sont soumis. Parce que classés (selon eux-mêmes) au rang d’êtres ni d’ici ni d’ailleurs, ces hommes et femmes, jeunes et vieux de Mboriko Baneka crient contre une démesure qui leur est imposée, et un esseulement qui n’en finit pas de les exaspérer. «Les titres fonciers brandis de façon ostentatoire par ceux qui revendiquent leur appartenance à la lignée Catche sont douteux, car n’ayant respecté aucune voie légale. Et par conséquent, il devient suspect de fonder la vérité de cette affaire sur cela. C’est ce que nous dénonçons», clame Thomas Moukala. D’hier à aujourd’hui, à l’échelle de tout Mboriko Baneka, cela constitue un dossier de première importance, d’où la nécessité de négocier de bonne foi et de façon pacifique pour dégager «l’occupant», et trouver une issue, si ce n’est une solution à la conciliation difficile des divers intérêts en jeu.

En attendant…
Selon Thomas Moukala, des démarches ont été entreprises. Bien qu’étouffées, poursuivies et criminalisées, les populations de Mboriko Baneka ont adressé des correspondances au Premier ministre (voir fac-similé) afin que les verrous et verrouillages qui barricadent cette affaire soient démantelés. À ce jour, un gain important a été obtenu: la mise sur pied d’une commission ad hoc, à laquelle prendront part, outre les parties, le délégué régional des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières du Littoral et le délégué départemental du Moungo, à l’effet de réexaminer les procédures d’établissement des titres fonciers N°640 et N°69.

Jean-René Meva’a Amougou

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