L’animateur-radio est mort des suites d’un assassinat, selon des sources non-officielles. Émoi et consternation à l’échelle mondiale.
Au départ, ce n’était qu’une rumeur diffuse : Martinez Zogo serait porté disparu. Sur les réseaux sociaux les mots coulent. Soudain, la disparition de l’animateur-radio entre en résonnance avec l’actualité. L’enlèvement de Martinez Zogo se raconte avec une tension constante et une puissance rare dans les milieux de la presse nationale et internationale. « Martinez Zogo a quitté la radio mardi 17 janvier, aux environs de 20h, pour regagner son domicile. Comme d’habitude je l’attendais ce mercredi matin pour la présentation de son émission. Mais avant le début de son émission, c’est son épouse qui est venue à la radio nous informer que son mari n’est pas arrivé mardi soir à la maison », confie l’un de ses collègues dans les colonnes du quotidien Le Jour du 18 janvier 2023. Selon Reporters sans frontières (RSF), il n’y a pas de doute : Martinez Zogo a été enlevé. « Un enlèvement brutal ; le drame s’est produit devant la gendarmerie de Nkol-Nkondi, en banlieue de Yaoundé », détaille RSF. Dans un communiqué, François Mboke, le président du Réseau des patrons de presse du Cameroun (Repac), donne une lueur sur les acteurs et la scène de l’enlèvement : des «hommes encagoulés roulant dans une Toyota prado, couleur noire, non immatriculée… C’est en rentrant hier soir autour de 19 h 40 qu’il a été pris en chasse par ledit véhicule. S’étant rendu compte, il a tenté de fuir dans un poste de gendarmerie où il sera rattrapé par ses ravisseurs».
Un cran de plus…
Sonnée par ces informations le 19 janvier 2023, l’épouse de l’animateur se dirige vers la police judiciaire pour y déposer une plainte. Sur place, il lui est conseillé de saisir la légion de gendarmerie. Le même jour, la grande une du quotidien Info Matin évoque la piste d’un assassinat. Le lendemain, 20 janvier, le gouvernement, via un communiqué signé par le René-Emmaniel Sadi (le ministre de la Communication) dit « suivre la situation avec tout l’intérêt qu’elle mérite » et que « des instructions ont été données afin que toute la lumière soit faite sur la disparition jusqu’à date, de Monsieur Zogo Martinez ».
Le 22 janvier 2023, des images diffusées sur la toile offrent au monde entier l’occasion d’une double mise en récit. D’abord sur lieu : le corps sans vie et en état de décomposition avancé de Martinez Zogo a été retrouvé à Ebogo 3 par Soa (Mefou-et-Afamba). Ensuite sur les circonstances probables de sa mort : Dans les images qu’on a devant soi, on voit des choses qui n’en finissent pas de lâcher l’insoutenable comme mot-clé. Le regard brouillé et l’esprit embrouillé, des commentateurs hurlent. Les mots sont lapidaires. « Nous ne lâcherons pas. Martinez Zogo a été assassiné », crache l’animateur Claudy Siar sur sa page facebook.
Profil
De son vivant, Martinez Zogo avait créé « Embouteillage ». Diffusée sur les ondes d’Amplitude FM (une radio émettant à Yaoundé), l’émission était un moment culte pour un certain public. À l’aide d’un style rudimentaire, Martinez Zogo avait donné une percussion inédite au concept en révélant les dessous des écuries présidentielles, des officines ministérielles et de bien d’autres cercles de pouvoir au Cameroun. Pendant plusieurs années, Martinez Zogo avait endossé le manteau du « censeur » chargé de dénoncer au peuple la corruption et les positions « anticiviques » de ses dirigeants. Pour cela il a dû, avec ses autres qualités, faire face aux risques du métier, aux réactions des personnalités visées par ses dénonciations et ses satires.
À quoi ressemblaient ces risques ou ces attaques ? On peut les diviser en deux catégories, assez larges : les attaques judiciaires d’une part et extra-judiciaires de l’autre. La première catégorie comprend les procédures multiples intentées contre lui pour calomnie et diffamation. La seconde catégorie est faite de provocations en duel et de menaces multiformes. En tout cas, Martinez Zogo ne pouvant pas plaire à tout le monde, ne pouvait pas s’empêcher de se faire des ennemis. Pourvu qu’ils fussent du bon genre – c’est à dire ennemis du bien public en même temps que ses ennemis personnels, ou plutôt ennemis personnels à cause de leur opposition aux bons principes.
Jean-René Meva’a Amougou