L’essentiel est d’être humain et vrai

En réécoutant quelques anciennes interviews accordées par Mgr Jacques Gaillot décédé le 12 avril 2023, je suis tombé sur des phrases dont je me suis vraiment délecté.

 

Ça m’a fait un grand bien d’entendre de sa bouche que le message de Jésus est subversif et que le Nazaréen est venu apporter le feu sur terre, à la religion, à la société, à tout ce qui déshumanise l’homme, que ce message a malheureusement perdu sa saveur. J’ai été heureux quand Gaillot a rappelé que «le racisme n’est pas compatible avec l’Évangile». Ce rappel m’a aussitôt fait penser au tribalisme de certains évêques africains qui réservent les paroisses juteuses et prestigieuses aux prêtres de leur ethnie ou région. Quelle joie d’apprendre que l’ancien évêque d’Évreux était prêt à foncer partout où il y avait un combat pour les droits de l’homme, et que pour lui, l’Évangile devait être porté dans des endroits inattendus! Je compris alors pourquoi, en 1985 à Tunis, il rencontra Yasser Arafat qui, plus tard, sera accueilli par Jean-Paul II. Rome voulait qu’il signe sa démission en 1995 s’il voulait percevoir la pension des évêques émérites, ce qu’il refusa.

Cet évêque, qui en 1996 était avec les 300 sans-papiers africains occupant l’église Saint-Bernard (dans le 18e arrondissement de Paris), n’avait de cesse de proclamer que l’important n’était ni de faire carrière, ni d’occuper des postes, mais d’être vrai. Les gens qui sont vrais, combien sont-ils de nos jours? Mais que signifie, d’abord, être vrai? Si je pense ou ressens quelque chose et que je ne suis pas capable d’agir en conséquence, je ne suis pas vrai, ni avec moi-même, ni avec les autres.

Qu’est-ce qui nous empêche d’être vrais? La peur de déplaire aux personnes qu’on aime et de qui on désire être aimé, la peur de leur réaction, la peur de perdre quelque chose (estime, poste, etc.). C’est la peur d’être grondé ou bastonné qui conduit, par exemple, un enfant à cacher ses mauvaises notes scolaires à ses parents. C’est la peur d’être démis de ses fonctions qui pousse un prêtre ou un évêque catholique favorable au mariage des prêtres, et ayant lui-même maîtresses et enfants, à défendre publiquement le célibat adopté seulement au XIIe siècle. Bref, on refuse d’être vrai parce qu’on craint de souffrir. Et le paradoxe, c’est lorsque l’Église fait mémoire des prophètes tout en persécutant les hommes et femmes qui veulent parler et agir comme eux. C’est cette hypocrisie que dénonçait Jésus chez les scribes et pharisiens car, quoique bâtisseurs des sépulcres des prophètes et décorateurs des tombeaux des justes, ils étaient aussi meurtriers que leurs pères qui versèrent le sang des prophètes” (Mt 23, 27-32).

Jean-Claude DJEREKE

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *