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Les ailleurs de la pensée

Père Maât Ngimbus 

Le mont Nkol Nyada au Cameroun a été le lieu témoin d’un évènement. Face à un continent en ébullition, l’urgence n’était-elle pas d’oser gravir la montagne afin de pouvoir rentrer en alliance avec ce qui sans cesse nous désirant, serait tombé dans l’oubli. Gravir la colline, ce nouvel exode inaugure la passion pour des montées profondes dans les audaces du penser. Monter, voilà l’évènement ! Parce qu’il ya eu évènement, alors quelque chose s’est passé. Quelque chose s’est passé, alors quelque chose est arrivé comme cela qui a l’arriver pour droit et devoir. Face aux défis de l’aujourd’hui ce qui est de droit et de devoir se fait audace pour les autrements. La fécondité de notre texte social traversé par les urgences se pose comme l’assiette des nouveaux appétits pour la dégustation du sens à créer.

 

Qu’est-ce-qui est donc arrivé pour que quelque chose se soit passé ? Déchirure anthropologique, anémie axiologique, brouille de sens construisant l’histoire ? Une question… des questions. Là où retient une question, quelque chose se passe et donne de passer. Aller à la pensée en alerte donne à un peuple de commencer à gravir la montagne de son humanité. C’est alors que la pensée en lorgnant les altitudes, devient une tâche exaltante. L’exaltation de la pensée est une prise de conscience. Cependant la prise de conscience est-elle également une conscience de prise ? Prendre conscience pour quelle conscience pour prendre ? Il ne s’agit pas ici d’un simple jeu de mots, ou s’il est question d’un jeu, il nous installe dans les temps de l’annonce. Annoncer, donner à notre monde de humer le parfum de notre densité anthropologique est acte créateur. Le jeu de mots est ainsi liberté et la liberté est créatrice. S’il y a du dense, du dense en tant que tâche, la véritable conquête du sens pour faire chemin et construire l’histoire n’est pas exclusivement dans la prise de conscience mais également dans la conscience de la prise. Et, effet, je ne prends conscience que parce que ma conscience est prise-sur.

 

Développer une mentalité neuve, idéal de la pensée de Njoh Mouelle, sorte d’éthique de la traversée comme l’avait pensé Bidima, se veut l’aube de la nouvelle écriture. Seule une énergie créatrice, grande passion pour des nouvelles phrases de sens, inaugure les passages en bâtissant les ponts. Tout se passe donc comme s’il fallait sortir des liturgies des ratures dans l’écriture, ratures qui ont longtemps nourri et structuré nos imaginaires. La frélation des intelligences et les rationalités de seconde main ont distrait les Africains de leurs ambitions d’être les patrons et les propriétaires de leurs rêves.

 

La pensée nouvelle n’est pas un restaurer ce qui n’a jamais été activé, elle se veut une audace de parcourir tous les sites d’être à partir de l’Africain a été non seulement disqualifié mais aussi s’est auto exclu du processus des grands efforts créateurs. Il s’agit de gravir cette montagne afin de révéler à l’Africain distrait l’inédit et l’inouï de sa capacité. La nouvelle pensée est une philosophie devra donc être i,e réflexion de la montée guettant et quant aux origines. N’est-ce pas ici la fécondité d’une pensée de l’assomption, la pensée des ouvertures toujours ouvertes nourrissant la richesse des vents d’idées arrivant des horizons pluriels ? S’il s’agit de monter, ce sera pour voir mieux et plus loin.

 

Toute montée porte les peuples à de nouvelles poésies. À partir des origines hospitalières et de profonds tremblements qui n’ont jamais cessé de les désirer plus que ce qu’ils osent désirer, l’histoire est natte que tissent des de-scissions pour être. Toute assomption est un habiter les rêves fertilisant la prise en charge de notre contexte pour en faire le texte d’une histoire. Aller à la création, c’est attiser la flamme des fondations ayant donné les grandes universités de Tombouctou et d’Alexandrie. Se fonder à ces racines consiste donc pour les peuples africains désormais en appétit pour la nouvelle pensée de déployer une philosophie de pyramide. C’est la capabilité à monter qui construit une osirification ontologique. Être, est un naitre. Des lors, l’histoire, champ par excellence des montées est la trace des pyramides. Ici, il est question d’un positionnement et d’une stratégie.

 

Passer de la crise des valeurs aux valeurs de la crise ne débouche que sur une activité des intelligences ronronnantes. L’indépassable traumatisme s’étant comme sédimenté, a fini par anesthésier les consciences africaines désormais complices de leur annihilation ontologique. N’est-ce-pas le pire qui puisse arriver à un peuple : sombrer dans l’ignorance de sa destinée avortée et se faire collaborateurs des différents systèmes de stérilisation des oniriques condamnant un peuple à répéter au quotidien ce qu’il disqualifie dans de non-paroles. C’est parce des ailleurs se font annonce que la nouvelle pensée fait des autrements, son sacrement. Tout est désormais à l’appel des aubes nouvelles. Travailler à la création des intelligences créatrices, c’est faire option pour la déchirure des voiles du temple.

 

Travailler à libérer les imaginaires saturés par des idéaux de zombification n’est pas tant une action de rupture, elle est une option-pour. Vivifier les imaginaires consiste à ruiner en eux, la logique du contre. La grande errance des intelligences africaines ne réside-t-elle pas là où elle n’aurait jamais dû habiter ? Fonder le « Pour » à partir de ce qui ne donne pas de jeter un regard au loin, est une véritable déroute de nos intelligences. Des intelligences dont l’irruption ne font pas trembler le monde ne sont rien d’autres que des intelligences bruismes. Toute pensée parce qu’elle est enceinte de nouveauté, provoque un séisme dans le monde. Quitter les concepts sans conception, c’est-à-dire ceux-là qui ne respirent pas les préoccupations des hommes et des femmes du monde d’en-bas, se veut une tache de décolonisation des savoir.

 

Décoloniser, c’est coloniser au sens où l’on fait de la pensée la décision de faire et d’être son monde et dans son monde. Il urge donc d’aller à ce qui fonde dans un peuple, les appétits de l’effort de penser encore. Nourrir l’ambition de pénétrer dans les choses pour en déchiffrer le sens en gestation commande de parler un langage qui dit ces choses comme horizon du monde. L’horizon du monde est la gestion d’un futur qui sans cesse se pro-nonce et s’annonce. Face à une pensée fondée sur ce qui ne la fonde pas, retrouver les assises qui instiguent l’homme africain, devient l’instant décisif. Où aller quand il s’agit vraiment d’aller ? N’est-ce pas l’unique question qui jaillit au cœur des intelligences désormais brouillées par un contexte monde devenu un non-monde ?

 

Le déclin se fait clin d’œil pour des nouveaux repartirs. La nouvelle pensée devra traverser tous les sites dans lesquels quelque se dit. Prendre assises, c’est s’inventer une parole au sein laquelle notre monde vient au monde dans l’articulation d’un sens. En habitant notre langue, le monde devient également notre monde. La langue devient alors la matrice nourricière des aubes nouvelles de la pensée. Un peuple qui n’est pas d’une parole dans laquelle est inscrite sa vision du monde, ne peut ni se créer, ni inventer. Il urge donc de parler à son monde à partir de la verbalisation née dans un faisceau de relations.

 

Tout se passe donc comme si la véritable déroute de la pensée était dans le fait de parler à notre monde qu’on habite en aspirant un monde autre : celui de notre non-présence. La réappropriation de notre monde passe par la capacité d’être patron de sa bouche. La nouvelle pensée sera une respiration de son monde dans l’habiter d’une une parole matrimoniale. Parler est penser et penser est l’acte de porter son monde au sens pour en faire l’intelligence de l’existence. C’est la maitrise de la langue qui permettra à la pensée nouvelle africaine de commencer des voyages gonflés de fécondité pour les ailleurs. La langue, l’Africanophonie est un acte d’enracinement. Un peuple qui ne mange pas sa langue stérilise ses racines. La révolution dans la pensée en tant que nouvelle idée de nous et vision par nous du monde devra être africanophone.

 

Le son devra être le ton de l’Afrique. La pensée neuf est aussi un trajet nouveau dans le monde. C’est assis dans sa langue que les mythes fondateurs deviennent une mémoire vive. Ici, la nouvelle pensée se fait tradition, grande énergie créatrice annonçant par la parole, les grandes aventures de l’esprit. Aller à la langue comme matrice nourricière des horizons du nouveau provoque un changement de paradigme. D’une pensée de la résistance à un discours de confiscation de notre droit à être, il faut aller au sacrement des annonces. Ce qui annonce, crée nécessairement. Parler est une déchirure du temps qui doit rendre les Africains les créateurs de leur présent et des concepteurs des projets des sociétés du futur. La langue est d’essence nationale. L’essence nationale donne à naitre. Toute naissance commence une imagination des autrements dans le monde. C’est le monde comme culture et civilisation qui est ici pris en charge.

 

Puisque la Parole embrasse toute l’activité humaine, la nouvelle pensée est une tache holistique. Ce sont la religion, l’économie, l’éthique, la morale, les arts que doivent réarticuler une pensée ouverte aux épiphanies du neuf. Il n’y a de neuf dans le monde que si la parole y retentit. Si c’est la parole qui fait le monde, il est tout aussi vrai que c’est le monde qui donne à penser. Toute pensée s’habille d’une parole qui créant le monde, signale la présence de l’homme comme de l’ouvrir. L’histoire n’est alors que la mémoire du travail de l’homme s’inventant en créant son monde. Créer la pensée, c’est penser le créer. La création est le symbole du monde à naitre comme le monde est le lieu de retentissement d’un évangile pour des nouveaux rêves. La capacité de rêver est une indocilité à l’origine. C’est au cœur des rêves que la parole se fait transgression. La nouvelle pensée est motivée par des u-topies et mobilisée par des u-chronies : les ailleurs des lieux sont aussi des autrements du temps.

 

Créer est l’acte d’une fierté d’être. La fierté d’être est l’ad-venir d’une ancestralité et l’ancestralité d’un surlendemain. Il nous faut donc aller à une herméneutique du crâne à jamais perdu pour oser inaugurer une pensée glissante. La pensée glissante se fonde sur un langage en situation de pont et jamais en état d’arrivée. La nouvelle pensée se refuse de militer pour un homme désaliéné pour être la forêt sacrée de l’homme africain créateur. Le nouvel homme africain ne sera tel que s’il est pris dans une spiritualité de l’ex-scellence. La fécondité de la pensée est là : non pas l’enfer éclaté mais la terre éclairée par la liturgie des audaces. Face à la crise, ne faut-il pas aller aux rêves de la parole et non aux fantasmes des cris ?

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