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Le professeur Joseph OWONA « .. mon long voyage s’achève et se termine aujourd’hui » parole dite…

Il n’est guère utile de s’étendre sur la stupeur qui a parcouru notre pays à l’annonce du  décès du professeur Joseph Owona.  

« Je ne suis ce que j’ai été et je ne suis ce que je fus que grâce à l’Etat du  Cameroun. » Parole dite. 

Bossuet s’étonnait que l’on s’étonnât de la mort d’un mortel – rien pourtant ne  témoigne mieux que cet étonnement de la condition humaine. Un poète japonais du  Moyen Âge l’a dit une fois pour toutes : « Qu’il y ait un chemin qu’il faut suivre, je le  savais, mais je ne pensais pas que ce serait aujourd’hui ou demain ». Est-ce moins  vrai de la mort des autres, quand elle n’est pas annoncée ? Ceci étant, « nous  n’abattrons la bête de l’événement qu’en consacrant toutes nos forces à la défense de  notre culture, de la poésie, des arts (non dégénérés), de la langue, de nos paysages,  de la beauté, de la gastronomie, de la courtoisie, de la galanterie et du charme, des  traditions populaires… » disait Camus. 

On ne peut, comme le relève Michel Maffesoli, « s’élancer vers l’avenir avec justesse  qu’à partir d’un enracinement dynamique dans notre passé, nos traditions et notre  histoire. 

Savoir voir, savoir entendre, savoir dire sont les préalables à pouvoir agir. » Telle fut  la tache, la mission de Yosep Owon ‘Ntsama de sa maman Elizabeth Ntsama une  noble Yanda cette tribu cousine des Etoudi, des Ngoé, des Mvële, des Fong, des Etenga et des Ntsinga lignée de ceux qu’on attendait mais aussi ceux qui attendent, primauté  des guérisseurs parce que fin connaisseurs du terroir et de ses ressources, certainement  aussi tribu des anciens propriétaires ou prêtres de la terre qu’ils ont le pouvoir de  rendre infertile en la maudissant. Yosep Owon’Ntsama le savait voilà pourquoi il avait  la consanguinité c’est-à-dire l’avuman chevillé au corps. 

Il avait choisi le droit en général et le droit constitutionnel en particulier qui est  « l’étude des règles qui régissent le fonctionnement de l’Etat et qui organisent les  rapports entre les pouvoirs publics ainsi que celles qui garantissent les droits et  libertés des citoyens. » Il a donc fallu construire, penser, créer, forger. Ce ne sont pas  des synonymes. En précurseur telle a été sa mission telle que nous l’entendons dans les  disciplines nôtres. Ce fut un gros morceau, il a su le dompter. 

Dans les mélanges qui lui ont été consacrés au mois de mars 2020, il a été  unanimement reconnu qu’il a su cultiver tout au long de ses 50 ans de carrière une  liberté que d’aucuns jugeraient atypique, il est devenu l’une des figures les plus  emblématiques du monde universitaire camerounais et de notre espace public et  politique tout court.  

Yosep Owon’Ntsama incarnait le professeur de droit. Pour ses étudiants, dont il avait  « le souci supérieur de la réussite, par estime d’eux. » Parole dite.

Faire le pari de leur intelligence, c’était leur raconter et leur rendre vivant ce pays et sa  relation au droit dont il était l’un des plus fins connaisseurs. Il incarnait le professeur  de droit dans les sphères du pouvoir. Son influence y a été considérable. Il habitait, il  était enfin le professeur de droit pour le grand public. Il se prêtait au jeu des interviews  et éclairait les débats politiques par l’étendue de sa science qu’il savait rendre simple  et concise. Habitude prise chez son maitre Charles Rousseau « champion du dire  simple et de la clarté dans un monde où le parler hermétique et compliqué prolifère. »  Parole dite. 

Dans chacune de ses activités, dans les murs ou hors les murs de l’Université, il était  un Professeur par nature. Il exerçait l’art de transmettre, qui est transmettre avec  passion. Je l’ai écouté aux obsèques d’abord de l’Abbé Lucien Manga à Nkoabe par  Ngomedzap puis de l’Abbé Louis Paul Ngongo en la basilique Marie Reine des Apôtres  à Mvolyé il y a quelques années. Yosep Owon’Ntsama a témoigné de lui-même au mois  de mars 2020 comme un soldat qui fait ses adieux aux armes , il est à ma connaissance  le premier enseignant camerounais à léguer sa robe de Professeur, à un autre dans  notre pays. À vous honneur et respect pour ce geste de transmission. 

Penser et convaincre, comme si la fin ultime de la pensée était d’œuvrer à la chose  publique, tel j’ai connu le professeur Josep Owon’Ntsama dans nos villages car ce sont  les Mvog Fouda qui firent de lui un patriarche en 2004. 

Il est arrivé que je sois assis une chaise derrière lui, les Ntsoung Mballa étant nos aînés  et la sagesse Ekang recouvre le devoir de transmission des ainés et l’obligation de  soumission, en même temps que de fidélité des cadets « Moan ya ndingui kë ai essia a  mekpa me zam, nye abi mvoé a soag » ! 

Owon’Ntsama fut un vir dans le sens latin du terme : 

rusticanus vir, sed plane vir — (Cicéron, Tusc. 2. 34) 

un homme rustique mais vraiment un homme 

En Ekang, comme nous le léga l’Abbé Léon Messi, il l’assuma jusqu’au bout, portant  l’amour portant le fer, sans reculer et toujours vainqueur. Alors pour lui qui était vie, il  ne pouvait y avoir de place pour l’ennui, pour les attitudes empruntées, les propos  convenus ou les idées corsetées. Il avait « la passion du droit » et la rendait  communicative. Il avait la passion de la vie et il la transmettait. Il m’est arrivé d’assister  à ses joutes verbales avec le très regretté l’Abbé Tsila Ottou Mon Zamba son alter ego. 

La clairière est habitée ! Tes ancêtres y sont de part et d’autres du Yom, 

Avance, avance droit devant toi, comme le 23 octobre 2023 dernier quand nous nous  retrouvâmes à l’aéroport de Nsimalen pour la dernière fois, oui droit avance. 

 

Ekang bëse bisso’o bisso’o elang elang ééé! 

Ééé éee! 

Ekang bëse bisso’o elang elang ééé! 

Ééé ééé!  

Beti benanga m’asug Ekang éée!  

Eée éée ééé ééé  

Melo’o m’eba’a 

Meba yi fo’o

Ekang mbolo’o  

Essagom  

Medzo nna’a Ekang mbolo’o Essagom  Mëne Ekang mbolo  

Esagom 

Esangom mbo betoa ba’a 

Yaaaaaaaaaa! 

Le vieux maitre s’en est allé 

Le vieux maitre s’en va, Adieux 

Vincent-Sosthène FOUDA MENYU M’EWONDO

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