AMBASSADESEDITORIALINTÉGRATION NATIONALE

Juste un peu de volonté… politique face à la contrebande et la contrefaçon

Il y a quelques semaines, une quantité énorme de boissons alcoolisées contrefaites, fabriquées dans des conditions d’hygiène exécrables, a été saisie à Bafoussam.

 

Dans la même ville, une usine de fabrication clandestine de faux vins, liqueurs et autres spiritueux a été démantelée en janvier dernier au quartier Toungang. Ce n’est pas tout. Le mois dernier, plus de 14 000 litres de carburant illicite ont été repérés et confisqués par les autorités chargées de la lutte contre la vente de produits pétroliers de contrebande dans la région de l’Est. En décembre 2022, 680 litres de formol de contrebande ont été saisis à Ekok, dans la région du Sud-Ouest. En novembre 2022, des médicaments contrefaits d’une valeur estimée à 117 millions FCFA ont été brûlés à Bertoua…

Portées par l’appât du gain et/ou par la misère, contrefaçon et contrebande sont là. Provocantes, insolentes, effrontées, elles s’étalent au grand jour, dans la boutique du plus modeste brocanteur, comme dans l’hôtel princier du grand marchand. Partout, contrefacteurs et contrebandiers ont une maxime: «Nous ne choisissons pas les affaires, mais les affaires nous choisissent». La logique de l’entreprenariat criminel et la vision des parrains sont empreintes d’un ultralibéralisme radical. Les règles sont dictées et imposées par les affaires, par l’obligation de faire du profit et de vaincre la concurrence. Le reste ne compte pas. Le reste n’existe pas. Ne pas payer ses impôts, copier secrètement des procédés de fabrication et vendre sous une marque usurpée, voilà désormais la «norme».
C’est ainsi que «le système» accroît ses profits, conforte sa toute-puissance et se pose en avant-garde criminelle de l’économie nationale, sous l’effet de l’internationalisation des échanges et des mutations technologiques. D’après un rapport publié en début décembre 2017 par le ministère camerounais des Finances, le Cameroun perd annuellement plus de 100 milliards FCFA en raison de la contrebande et la contrefaçon, lesquelles touchent à tous les secteurs d’activités du pays.

La lutte contre ces fléaux constitue donc un défi majeur, dont les enjeux dépassent largement la seule profitabilité des entreprises pour concerner désormais l’emploi dans notre pays et la sécurité des consommateurs. Sur le plan national, des moyens importants ont été mis en place. Cependant, l’ampleur du phénomène, ses répercussions sociales et économiques, appellent à poursuivre l’effort. Elles appellent surtout à éclairer et relever le défi politique représenté aujourd’hui par la contrefaçon et la contrebande. Elles nous suggèrent que notre capacité à évoluer dans le monde avec sécurité se fonde sur le contrat social, et que notre meilleur allié contre ces fléaux reste la mise sur pied d’un environnement contraignant. Alors que l’on a toujours l’impression d’être confronté à de l’inédit, les pratiques du contrôle actuelles montrent chaque jour leur inefficacité. Les permanences ou la répétition d’expériences antérieures facilitent la compréhension des situations et permettent de nuancer le caractère exceptionnel de la situation actuelle et de souligner le changement d’échelle. Ailleurs, on l’expérimente déjà. Là-bas, à l’aide d’un téléphone, un consommateur peut vérifier l’authenticité d’un produit, en vérifier la provenance et la date de péremption. Pour tous, cela pourrait être salutaire à court terme; puisque administration fiscale et consommateurs y gagneront. Juste un peu de volonté… politique.

Jean-René Meva’a Amougou

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *