Les pays au sud du Sahara restent grandement confrontés à cette problématique. La production agricole est grandement composée d’exploitations familiales.
Un système communautaire qui peut s’avérer couteux pour le processus d’industrialisation. En effet, faire passer un cap au système agricole de bon nombre de pays africains nécessite un certain niveau d’investissement avec mécanisation et l’association d’une certaine ingénierie. Le processus industriel, particulièrement l’automatisation de la succession des opérations, doit être maîtrisé dans la production agricole. Des attelages sont montés derrière les tracteurs pour exécuter plusieurs opérations en une seule.
Le labour, l’offsettage, la préparation du lit de semis et le semis peuvent se faire en une seule opération pour le riz ou le blé. Cette technologie a le mérite de réaliser en un seul jour une opération qui se faisait en 4 jours, ce qui donne la possibilité de multiplier les superficies cultivées au moins par trois. La production de la tomate dans les serres a boosté les rendements qui passent de 10 tonnes en moyenne dans une agriculture traditionnelle à 800 tonnes à l’hectare. C’est une performance jamais égalée par une culture, du fait seulement de l’industrialisation de la production dans la serre. Cette dernière reçoit toutes les technologies combinées dans une usine classique (propreté, process, qualité, normes, standards, maîtrise de l’énergie, systèmes opérationnels et maîtrise des couts).
Contextualisation
La production agricole de plusieurs pays africains est en majorité détenue par des exploitations familiales agricoles (EFA). Les individus ou les regroupements de producteurs (GIC) sont les seigneurs de la terre. La problématique de la réussite du tournant de l’industrialisation passe ainsi par l’optimisation des procédés qui sont les leurs. Toute chose qui implique la revue des stratégies et politiques agricoles de plusieurs pays africains.
Les défenseurs et partisans de l’Agrobusiness accusent les exploitations familiales d’être à l’origine de la faible compétitivité de l’agriculture africaine. Malheureusement, dans leur plaidoyer, ils font souvent l’amalgame entre intensifications des investissements ou la concentration des capitaux et/ou des terres au profit d’une minorité et, professionnalisation et intensification des cultures d’autre part.
L’agriculture familiale est présentée comme synonyme de «culture extensive», «méthodes traditionnelles», «absence de professionnalisme», «économie de subsistance» et autres qualificatifs qui ont tous pour objet de figer les producteurs dans des caractères stéréotypés d’ignorance et de conservatisme. Ce qui ouvre l’Afrique à l’abandon de son modèle d’économie agricole qui est son ADN.
L’agriculture familiale a montré sa capacité à accroître significativement sa productivité même sur des petites superficies pour peu que les conditions soient réunies. Les cultures maraîchères, la riziculture, la culture de coton et l’arboriculture fruitière sont des exemples patents démontrant la capacité des exploitants familiaux à s’adapter et à adopter la «modernité». Cela se vérifie dans la mécanisation (culture attelée, motoculteur, tracteur), l’utilisation des engrais minéraux, des semences sélectionnées et des méthodes intégrées de lutte contre les ravageurs, la maîtrise des circuits et réseaux d’irrigation plus ou moins complexes, bref à travers une multitude de techniques et technologies qui reflètent une certaine modernisation de l’agriculture.
Au moment où le continent africain s’engage dans la Zone de libre-échange continentale, il est temps pour nos dirigeants de penser à la dimension anthropologique de l’économie africaine. Il est possible de ne pas se laisser aspirer par le «tout libéralisme» en tirant les leçons de ses échecs chez les peuples qui l’ont conçu.
Zacharie Roger Mbarga