Chuchotements et confidences ont révélé une Afrique déterminée à avancer avec audace, mais toujours avec style, diplomatie.

Yaoundé, 27 novembre 2025. Dans les salons feutrés d’un hôtel de la capitale camerounaise, des délégations venues des quatre coins de l’Afrique se pressent autour de tables garnies de dossiers, de tablettes et de cafés si corsés qu’ils pourraient réveiller un continent entier. L’enjeu : l’opérationnalisation de l’Institut Monétaire Africain (IMA), futur tremplin de la Banque Centrale Africaine. Officiellement, les réunions sont strictement techniques. Officieusement, elles ressemblent parfois à une partie d’échecs où chaque geste est pesé et chaque mot scruté.
Le sujet le plus délicat ?
Le calendrier. Les débats sur le chronogramme ont parfois tourné à la comédie involontaire. Une matinée entière a été consacrée à discuter de la date exacte de mise en place d’un comité technique : certains la voulaient en mars 2026, d’autres en décembre, tandis qu’un pays insistait pour une formulation vague afin de ménager les marchés. « Si on ne peut pas se mettre d’accord sur un simple calendrier, imaginez une monnaie », murmure un diplomate camerounais en souriant, ce qui provoque un éclat de rire discret mais significatif. Derrière l’humour, la tension reste palpable. « Qui veut avancer trop vite risque de froisser les collègues, et qui temporise trop inquiète les investisseurs », confie un banquier central ivoirien. La question de la date exacte d’opérationnalisation de l’IMA a généré des débats qui se sont prolongés au-delà des horaires prévus, avec des pauses-café transformées en négociations diplomatiques. Les délégations du nord et de l’ouest africain insistaient pour fixer 2026 comme échéance ferme, tandis que d’autres plaidaient pour une marge de manœuvre, craignant les réactions des banques centrales occidentales. « Avancer trop vite, c’est comme crier ‘on se passe de vous !’ dans le monde financier international », plaisante à mi-voix un consultant sénégalais, déclenchant des sourires nerveux autour de la table.
La peur de froisser les partenaires étrangers est omniprésente. À chaque proposition d’accélération du calendrier, un silence mesuré s’installe, suivi de murmures : « Et si les marchés étrangers se vexent ? » La prudence est de mise : il s’agit de réaffirmer la souveraineté africaine tout en gardant des relations stables avec les institutions financières mondiales. Selon Dr Amina Diallo, analyste financière à Bamako : « L’IMA est un exercice de funambulisme : avancer avec audace sans perdre l’équilibre diplomatique. Chaque mot, chaque date, chaque échéance doit être pesé. »
Les pauses-café sont devenues des zones stratégiques. Entre deux cafés, des alliances se nouent, des compromis se dessinent, des conseils prudents se glissent. « Ne précipitez rien face aux Occidentaux », chuchote un banquier central nigérian. « Mais ne retardez pas non plus, sinon vous perdez toute crédibilité. » Chaque geste, chaque sourire, chaque soupir compte dans ces discussions où la souveraineté africaine se joue autant dans le calendrier que dans les chiffres.
Le soir venu, les participants se retrouvent autour de repas informels. Les confidences se multiplient : petites anecdotes sur des divergences mineures, plaisanteries sur les tempéraments nationaux, et surtout, l’assurance que malgré les tensions, tous partagent la même vision : une Afrique capable de gérer sa monnaie, de coordonner ses politiques économiques et d’affirmer sa voix face aux grandes puissances financières. « À ce rythme, notre monnaie naîtra sur fond de café fort, de débats interminables et de diplomatie raffinée », remarque un consultant sénégalais, suscitant des rires complices. Au bout du compte, L’IMA devient autant un exercice de patience qu’un projet technique. Certains veulent montrer leur influence, d’autres testent la résistance des collègues. Mais chacun sait que la crédibilité monétaire se gagne dans ces salons, à coup de compromis et de petites victoires.
Jean-René Meva’a Amougou
L’Afrique est à un moment décisif
L’Afrique est sur le point de frapper un grand coup. En 2026, l’Institut Monétaire Africain (IMA) deviendra opérationnel, et avec lui, l’ambition de créer une véritable Banque Centrale Africaine. Après plus de vingt ans de planifications, de rapports et de conférences à répétition, le continent semble enfin prêt à passer du rôle de spectateur à celui de joueur actif sur le grand échiquier monétaire mondial. Et, soyons honnêtes, certaines banques centrales occidentales vont probablement sortir le pop-corn.
Jusqu’ici, la planète financière africaine s’était construite sur des bases imposées de l’extérieur : parité avec l’euro, surveillance des institutions internationales, dépendance aux marchés étrangers. Mais l’IMA, c’est le signal clair que le continent souhaite reprendre les commandes. Les banques centrales africaines se positionnent désormais face à leurs homologues occidentales comme des élèves qui, après des décennies d’observation studieuse, annoncent : « Merci pour le cours, maintenant nous passons à l’examen final. »
Ce rapport de force inédit n’est pas que symbolique. Il s’agit de souveraineté économique pure et dure : stabiliser nos monnaies, faciliter le commerce intra-africain, réduire la dépendance aux devises étrangères et, accessoirement, montrer que l’Afrique n’est pas qu’un terrain de jeu pour les investisseurs étrangers. Les sceptiques diront que le défi est immense : harmoniser 55 pays, coordonner des politiques fiscales disparates, convaincre des populations parfois sceptiques. Certes. Mais si le continent avait renoncé à chaque défi colossal, nous serions encore en train de négocier des clauses sur des bananes et du cacao.
L’IMA a donc une double mission : technique et stratégique. Il s’agit de bâtir une institution crédible, capable de résister aux turbulences financières, tout en envoyant un message clair aux grandes puissances : l’Afrique compte désormais parmi les acteurs qui définissent les règles du jeu. Et si tout cela peut se faire avec un peu d’humour et de panache, pourquoi pas ? Après tout, observer certaines banques centrales occidentales froncer les sourcils face à nos ambitions sera un spectacle que personne ne voudra manquer.
Alors, oui, 2026 s’annonce comme l’année où l’Afrique se lèvera, non plus pour demander la permission, mais pour imposer sa vision monétaire. L’IMA n’est pas juste un projet institutionnel : c’est le premier acte concret d’une Afrique qui dit au monde : « Nous jouons désormais selon nos règles ». Et, entre nous, on a hâte de voir la tête des sceptiques.
L’Afrique entend reprendre la main… et la monnaie !
IMA, discuté à la 47ᵉ réunion des gouverneurs des banques centrales africaines, n’est pas qu’une institution technique : c’est un pari historique. Après des décennies à subir les caprices du dollar et de l’euro, l’Afrique pourrait enfin décider de sa propre monnaie. Mais attention : entre ambition et réalité, le fossé est large, et certains risques pourraient prêter à sourire… jaune. La réussite de l’IMA repose sur la discipline budgétaire, la confiance mutuelle entre États et la capacité à transformer un rêve en institution solide. L’harmonisation des politiques, la supervision des flux financiers et la gestion de la future monnaie sont loin d’être de simples formalités. Sans rigueur, l’IMA pourrait se transformer en joli concept, imprimé sur papier glacé, qui ferait rire… ou pleurer.
L’élection de M. Yvon Sana Bangui à la présidence de l’Association des Banques Centrales Africaines (ABCA) lors de la 47ᵉ réunion annuelle à Yaoundé marque un tournant dans l’histoire financière du continent. Gouverneur de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC), il se voit confier la lourde responsabilité d’opérationnaliser l’IMA en 2026, un projet vieux de plus de vingt ans et considéré comme la pierre angulaire de la future Banque Centrale Africaine.
Sous la présidence de Sana Bangui, l’ABCA devra veiller à la convergence des politiques budgétaires et monétaires, à la mobilisation des expertises, et au renforcement des partenariats continentaux. Mais le chemin est semé d’embûches : disparités économiques, endettement élevé et fragilité institutionnelle restent des obstacles majeurs.
Pourtant, l’espoir est réel. L’opérationnalisation de l’IMA pourrait fluidifier le commerce intra-africain, renforcer l’attractivité des investissements et poser les bases d’une monnaie qui reflète réellement les dynamiques économiques du continent. Diallo insiste : « Il ne s’agit pas seulement de créer une monnaie, mais de bâtir une crédibilité collective. »
Le défi est donc double : technique et politique. Si les États membres réussissent à s’aligner, l’Afrique pourra enfin conjuguer souveraineté et stabilité monétaire.
Pourtant, les bénéfices sont considérables. Une monnaie stable et une coordination efficace fluidifieraient le commerce intra-africain, attireraient des investisseurs et offriraient un cadre sécurisé pour le développement économique. Fatoumata Diallo, économiste sénégalaise résume : « Si l’Afrique consacre autant d’énergie à coopérer qu’elle en dépense à critiquer le voisin, l’IMA peut réussir. Sinon, on aura une monnaie… avec des éclats de rire jaune garantis. »
L’IMA est donc plus qu’un outil financier : c’est un test de maturité politique et économique. S’il réussit, il symbolisera une souveraineté africaine réelle et concrète. S’il échoue, ce sera le rappel brutal que vision et action sont deux mondes différents. Le destin de la monnaie africaine est désormais entre les mains des gouverneurs et des États : il est temps de transformer l’ambition en réalité, ou de risquer un échec historique que personne n’oubliera… et dont on parlera avec un sourire amer.
Bobo Ousmanou





