Derrière son plaidoyer se dessine la volonté de faire des femmes rurales non plus de simples bénéficiaires de projets, mais de véritables actrices de la transformation économique, sociale et environnementale des campagnes francophones.
Le Cameroun a officiellement présenté, cette semaine, un manifeste dédié aux femmes rurales à l’Organisation internationale de la Francophonie, plaçant au centre du débat le rôle stratégique de ces actrices souvent invisibles mais essentielles à l’économie et à la cohésion sociale. Par ce geste politique, Yaoundé entend porter la voix de millions de femmes qui nourrissent, soignent, produisent et résistent, parfois dans l’ombre, toujours dans l’effort. Dans les villages comme dans les zones enclavées, elles constituent l’ossature silencieuse des économies locales, assurant la survie des ménages tout en transmettant des savoirs agricoles, culturels et sociaux qui structurent les communautés depuis des générations.
Sur le fond
Le document met en lumière une réalité têtue : dans les campagnes, les femmes assurent l’essentiel de la production vivrière, de la transformation artisanale et du petit commerce, tout en restant les premières victimes de la précarité. Accès limité à la terre, faibles garanties pour le crédit, formation encore insuffisante, lourdes charges domestiques : la liste des obstacles demeure longue, malgré les progrès enregistrés ces dernières années. À cela s’ajoutent la persistance de normes socioculturelles contraignantes et la faible représentativité des femmes dans les instances locales de décision, qui freinent leur pleine reconnaissance économique.
Face à ces contraintes, le manifeste plaide pour une action plus coordonnée au sein de l’espace francophone. Il appelle à des politiques publiques mieux ciblées, à un financement renforcé des projets féminins et à l’intégration systématique des femmes rurales dans les chaînes de valeur agricoles. L’objectif affiché est clair : passer d’une reconnaissance symbolique à une autonomisation économique réelle, mesurable et durable. Il s’agit notamment de favoriser l’entrepreneuriat féminin, de structurer les coopératives et de garantir un meilleur accès aux marchés nationaux et sous-régionaux.
Au-delà de l’économie, le texte insiste sur la dimension sociale et environnementale. Les femmes rurales sont en première ligne face aux effets du changement climatique, à la dégradation des sols et à l’insécurité alimentaire. Leur donner les moyens d’innover, d’accéder aux technologies et de sécuriser leurs moyens de production devient alors un impératif de développement autant qu’un enjeu de justice. Elles sont également au cœur des stratégies d’adaptation climatique, entre diversification des cultures, gestion de l’eau et transmission de pratiques agricoles résilientes.
En portant ce manifeste à l’échelle francophone, le Cameroun cherche aussi à fédérer les partenaires techniques et financiers autour d’une vision commune. L’ambition est de transformer les engagements en programmes concrets, capables d’impacter durablement les territoires ruraux.
Ongoung Zong Bella
