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Tensions post – électorales: la rue s’embrase et Yaoundé s’enferme dans la peur

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Une rue déserte au lendemain de la proclamation

Les institutions électorales proclament la continuité, mais le peuple choisit la défiance. Yaoundé, la capitale, vit dans la psychose depuis une nuit de panique, où des citoyens ont couru sans savoir pourquoi.

Une rue déserte au lendemain de la proclamation

Une capitale sous cloche

Le Cameroun vit des heures d’incertitude. Deux semaines après le scrutin présidentiel du 12 octobre, présenté comme un “acte de renouveau démocratique”, le pays semble plus divisé que jamais. À Yaoundé, la tension est palpable. Les commerces sont fermés, les écoles désertées, et les habitants se barricadent chez eux, craignant une flambée de violence.

Dans la soirée du 28 octobre, plusieurs quartiers populaires de la capitale, Mokolo, Mélen, Essos, Ekounou, Awae Escalier, ont été le théâtre de scènes de panique. Des habitants affolés couraient dans tous les sens, fuyant un danger invisible. « Je vois des gens courir dans tous les sens. Je demande ce qu’il se passe et j’entends : ‘Ils sont déjà là !’ Je demande : ‘Ils, ce sont qui ?’ Un autre me répond : ‘Mon frère, ne cherche pas à comprendre, cours seulement.’ Et je me suis mis à courir sans savoir pourquoi », témoigne Michael, un jeune homme rencontré à Ekounou, encore tremblant.

Une rumeur, une peur, un peuple sur le fil

Ce simple mot, “ils”, a suffi à déclencher une panique collective. Selon plusieurs témoins, des rumeurs de descentes des hommes armés de machettes susceptibles de déclencher des affrontements avec les forces de l’ordre circulaient depuis l’après-midi. En quelques minutes, la psychose s’est propagée de bouche à oreille, amplifiée par les réseaux sociaux. « Personne ne savait ce qui se passait, mais tout le monde a eu peur », explique Nono T., commerçante au marché d’Ekounou. « On vit dans un climat où un cri suffit pour tout faire basculer ».

Le ministre de l’Administration territoriale a fait une déclaration officielle sur les incidents-électoraux ayant occasionné des arrestations et la mort de plusieurs camerounais. Il a tenté de “rassurer les populations” et de dénoncer “une campagne de désinformation orchestrée par des forces hostiles à la République”. Pour lui, le candidat Issa Tchiroma Bakary, déclaré deuxième de cette élection par le conseil constitutionnel est responsable de ce dérapage. Il soutient qu’il répondra de ces faits devant les juridictions compétentes. Une fuite en avant qui verse de l’huile sur le feu.

L’impatience du peuple

À Yaoundé, les institutions continuent d’afficher une sérénité de façade. Le Conseil constitutionnel a validé les résultats sans réserve. Le gouvernement promet « une nouvelle ère de stabilité et de cohésion nationale ». Mais sur le terrain, cette « stabilité » ressemble de plus en plus à un repli. Les rues se vident, les marchés se taisent, et les conversations s’éteignent dès qu’apparaissent le mot « manifestation ». « Ce qui se passe à Yaoundé, c’est la peur organisée », estime un diplomate africain en poste dans la capitale, sous couvert d’anonymat. « Les gens ne croient plus ni aux urnes, ni aux promesses. Ils attendent juste le prochain choc ».

Le Cameroun au bord du gouffre

Le contraste est saisissant : d’un côté, un pouvoir convaincu d’avoir refermé un cycle ; de l’autre, un peuple qui pense qu’il ne fait que commencer. La rue, longtemps silencieuse, semble redevenir l’espace politique par excellence : celui de la contestation, de la survie, du cri. « Quand les urnes ferment les portes du changement, la rue les enfonce », confie Sonia, une militante associative rencontrée à Essos. « Aujourd’hui, on ne manifeste plus pour voter. On manifeste pour exister ».

Une paix fragile, un avenir incertain

La capitale reste sous tension. Les habitants scrutent leurs téléphones, les commerçants attendent des jours meilleurs, et les enfants, eux, restent à la maison. L’État promet le retour au calme. Mais dans les quartiers populaires de Yaoundé, un mot revient dans toutes les conversations : « jusqu’à quand ? ».

Tom


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