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Gouvernement de la Commission de la Cemac: le point à cinq mois de la fin du mandat

En ce 15 juin 2022 au siège provisoire de la Commission de la Cémac à Malabo, l’effervescence est perceptible. Pour la première fois de son histoire, la Commission de la Cemac accueille un invité de marque venu du Royaume d’Arabie Saoudite, avec à l’évidence de bonnes nouvelles. Ahmed bin Abdul-Aziz Kattan, Conseiller à la Cour Royale Saoudienne, est reçu en audience par le maitre de céans, Daniel Ona Ondo. Une rencontre aux perspectives prometteuses pour les deux parties, qui n’occulte pas pour autant la fin du bail du patron des lieux et de son équipe en début novembre prochain. L’occasion pour votre journal de vivre l’ambiance de fin de mandat dans les couloirs du Parlement de la Cemac, qui héberge la Commission. Le Pr Daniel Ona Ondo accepte d’éclairer notre lanterne sur les sujets sensibles de la Communauté. Synthèse

Taxe communautaire d’intégration : ça coince… malgré tout
Vous parlez d’un problème un peu particulier : la Taxe communautaire d’intégration (TCI). Pour fonctionner, il faut le carburant ; ici, le carburant c’est de l’argent. S’il n y a pas d’argent, on ne fonctionne pas bien. Toutes nos difficultés aujourd’hui, c’est parce qu’il n’y a pas suffisamment de ressource. C’est vrai qu’il y a plusieurs raisons à cela. Les Etats sont en crise. Il y a moins de ressource. Qu’à cela ne tienne, les chefs d’Etats ont décidé d’attribuer 1% d’importation à la TCI. C’est la principale ressource de la Commission. Nous avons également quelques petites ressources internes, les aides extérieures, etc. Cette TCI n’est pas reversée parce qu’elle est collectée au corridor douanier de chaque Etat-membre de la Communauté ; malheureusement, elle rentre au trésor public. Et une fois au trésor public, elle a du mal à sortir. C’est pourquoi les chefs d’Etats ont demandé à ce qu’on change de process. Qu’on fasse en sorte que la Commission récolte la TCI au corridor. Nous avons commencé au Gabon, ils ont acté cela. Et aujourd’hui, nous avons déjà quelques miettes qui arrivent. Compte-tenu de la situation que je viens de vous décrire, c’est pratiquement devenu comme une faveur de verser la TCI, alors que ça doit être une obligation. Ce qui est gênant, c’est que quand vous regardez l’Uemoa, la TCI est versée à 90%, alors que en zone Cemac on est dans les 30%. C’est dérisoire et ça nous pose problème. Pour le contrôle, nous avons la Cour des comptes qui a fait une descente remarquée et remarquable au sein de la Commission. Nous devons non seulement contrôler, mais éduquer ceux qui ont la charge de gérer les deniers publics. Pour la TCI, ce n’est pas parce qu’ils ne veulent pas exécuter les contraintes de l’heure qui font que ça ne grimpe pas. Nous faisons appel à la bonne volonté et la volonté politique. En tout cas, à la conférence des chefs d’Etat, c’est revenu de façon pratiquement permanente qu’il faut reverser la TCI à la Communauté, car sans elle la Communauté ne peut pas marcher. Mais il faut encore le bien-fondé de la Communauté ; et ça, c’est un travail ; c’est pourquoi je fais appel à vous pour un travail de communication. Je suis convaincu que si l’intégration était mieux assumée, les crises multiformes de la zone Cémac pourraient être mieux résolues. L’intégration sous régionale est la solution à l’essentiel de nos problèmes.

Libre circulation : le bout du tunnel…
Il n’y a plus de problème à la libre circulation des biens et personnes dans notre espace communautaire. Il y a un acte additionnel qui confirme la libre circulation des biens et des personnes dans les corridors et l’espace Cemac. Par conséquent, le problème est derrière nous. Il y a eu des difficultés au début parce que nous, Africains, croyons toujours que lorsqu’on va ouvrir les frontières, les autres vont nous envahir. Le Nigeria n’a pas envahi le Cameroun. Chaque citoyen aime rester chez lui. Au niveau de la sensibilisation, il y a un principe juridique qui dit nul n’est censé ignoré la loi. Vous devez savoir et chercher. Maintenant, il y a de petites pesanteurs, mais il faut du temps, l’éducation et la formation des individus pour qu’on arrive à l’optimalisation. Encore l’optimum n’est pas de ce monde. Avant on avait cinq passeports biométriques Cemac, aujourd’hui on en a six. La volonté politique est bel et bien affirmée.

Projets intégrateurs : mise en œuvre à plusieurs vitesses
Quand on parle d’intégration, c’est mettre ensemble. Aujourd’hui, nos Etats individuellement sont des pays de petites dimensions économiques, en dehors du Cameroun qui a une dimension trop importante. Le fait d’être intégré fait en sorte qu’on se retrouve avec près de 50 millions d’habitants qui donnent déjà une bonne masse critique. Parce qu’en économie, pour impulser l’industrialisation, il faut être à peu près à 10 millions d’habitants, très peu de pays le font en Afrique centrale. Dans les six pays, il y a cinq qui sont pétroliers et deux pays sont enclavés. Il faut relier les deux pays enclavés aux autres pays. Ça pose le problème des infrastructures économiques et sociales, les routes, les ponts, ça pose le problème des infrastructures de télécommunications. Le problème de projet intégrateur, nous en avons près d’une centaine. Nous nous sommes dits, c’est difficile de trouver des financements pour 100 projets. A Douala, nous avons réuni tous les experts de notre région pour qu’on choisisse les projets les plus urgents, chaque pays a donné son avis et nous avons retenu 13 projets. Nous sommes allés voir les bailleurs de fonds à la demande des Chefs d’Etat. Nous sommes allés à Paris. Nous avons récolté plus que nous avons demandé de financement. Ce sont des promesses de financements. Au retour, nous avons ces dossiers suivis par le Pref-Cemac. Et aujourd’hui, il y a quatre dossiers qui sont entièrement bouclés en financement.

Les sept autres dossiers non cités ont des promesses de financement, mais il faut complètement boucler le dossier. C’est en cour, ce travail se poursuit. Quand nous avons des investisseurs comme le Royaume d’Arabie Saoudite, c’est de leur poser le problème de financer nos projets intégrateurs.

Des pétrodollars pour investir
Aujourd’hui, nous avons bon espoir que les autres sept projets obtiennent entièrement des financements bouclés. C’est un travail d’approche. Les dossiers sont bien tenus en main. Nous avons des projets importants, comme le Projet de développement intégré de la zone des trois frontières. Nous avons une zone des trois frontières qui est florissante pour une raison simple : la Guinée Equatoriale a fait un Port en eaux profondes qui pratiquement n’est pas beaucoup utilisé. Ils ont des voies d’autoroutes. Ils ont un aéroport de classe internationale. Et de l’autre côté de la frontière, vous avez la multinationale Olam. Il y a un projet de Port sec dans la zone des trois frontières, les interconnexions entre Mongomo-Oyem, et Ebibiyim-Bitam. Une étude sur la zone des trois frontières, c’est les différents marchés des appels d’offres. Nous avons d’autres bailleurs de fonds traditionnel qui financent d’autres projets. On n’attend pas. Il n y a pas que la table ronde des bailleurs de fonds.
Nos amis d’Arabie Saoudite sont venus à leur demande. Vous savez que c’est un pays riche et qui a des institutions de financement de très haut niveau. On peut profiter de cette ouverture. Il faut aussi dire que l’Arabie Saoudite travaille déjà avec beaucoup de nos pays. En matière de coopération, c’est comme dans la vie : pour avoir quelque chose, il faut demander. Notre travail d’approche, c’est d’abord établir le contact et montrer avec les dossiers que nous sommes crédibles. Ils ont l’habitude de financer les Etats, c’est le bilatéral. On leur dit qu’il y a pas que le bilatéral, il y a aussi les Communautés économiques régionales (CER). Ils ont accepté qu’on leur porte nos projets structurants. Et je peux vous dire qu’ils sont prêts au niveau de la Cemac ;

Réforme du Franc CFA : la Commission et la Béac en eau trouble
Dans le public on a tendance à croire que les Chef d’Etats ne réfléchissent pas sur la zone Franc, vous avez tort. Ca fait partie de leur préoccupation, je peux vous le dire. Avant d’arriver à la Conférence des chefs d’Etat de Yaoundé, ce dossier était déjà sur la table. J’étais à Ndjamena, le président Deby avait déjà posé ce problème, avait mis déjà en place une commission. A Yaoundé, on a remis la commission sur le chantier en responsabilisant la Beac et la Commission de la Cémac. Nous travaillons sur ce dossier. Je suis en parfaite symbiose avec le gouverneur de la Beac. Nous étions à la rencontre du Trésor et de la Banque de France. On a fait une réunion, il y a un procès-verbal dessus. Le travail se poursuit. Nous avons tous les gens qui font du bruit autour en parlant d’un problème colonial. En Afrique de l’Ouest, ils ont avancé, mais pas tellement que ça. Tout ce qui est arrivé, c’est qu’ils ont retiré leur argent aux comptes d’opération. Lorsque l’argent est au compte d’opération et lorsqu’il est créditeur, il y a les intérêts. Il y a donc un manque à gagner pour les banques centrales. Ils ont accepté, le compte d’opération va être supprimé. Est-ce qu’il y a plus de développement dans ces Etats de l’Afrique de l’Ouest parce que le compte des opérations a été supprimé ? Les gens croient que ça va être un miracle quand on va changer le nom de FCFA. Je crois que cette réflexion ne mérite pas ce populisme, c’est une réflexion sérieuse. La monnaie, c’est un problème de souveraineté. Battre la monnaie, c’est un problème de pouvoir. La Guinée Equatoriale avait sa monnaie, mais elle est revenue au FCFA. S’ils étaient si bien seuls, pourquoi ils sont revenus avec les autres ? Parce qu’unis, vous êtes forts. Seul, vous êtes faible et vous ne pouvez pas tenir. Le compte d’opération est un compte indivis. Tout le monde met ses 50%. Le compte d’opération permet justement à ceux qui n’ont pas de devises de pouvoir importer. Parce qu’ils profitent des devises des autres. La réflexion se poursuit, elle est bien menée. Mais nous avons une clause de confidentialité, je ne peux pas me permettre sans avoir rendu compte au chef de l’Etat, ni moi encore moins le gouverneur, d’en parler et de donner les grandes lignes.

Des états généraux de la Commission pour clôturer en beauté
Quand on fait les états généraux, c’est faire le point du présent et se projeter dans l’avenir. Ce n’est pas seulement faire des critiques. Je crois que c’est bien de faire les états généraux à la fin de mandat qu’au début. Parce qu’au début, vous prenez les dossier en main, vous ne connaissez pas les tenants et les aboutissants, ni les problèmes. Lorsque je commençais il y a 4 ans et demi, les gens me roulaient, aujourd’hui ce n’est plus le cas parce que je connais comment fonctionne la machine. Instruit par ça, je dois léguer à la Commission qui arrivera un bon dossier qui soit propre et qui leur permette de bien travailler dans de bonnes conditions. Ce n’est pas seulement la Commission, mais toutes les institutions de la Communauté. Nous avons la Cour des comptes, la Cour de justice, le Parlement communautaire, la Commission et d’autres institutions qui sont présentes dans l’espace communautaire. Il y en a plus de treize et ils vont dire des problèmes qui se posent à eux. Pour essayer de trouver des solutions à ces problèmes. Ainsi, certains dossiers pourraient être soumis au conseil des ministres de l’UEAC pour qu’on avance. Un des problèmes important, c’est le consensus de Fort Lamy qui a été rompu en 2010. La rotation s’est faite par ordre alphabétique, mais il y a des problèmes parce que les gens ne lisent pas les textes. Il ne faut pas un cumul de poste, il faut une bonne gouvernance, un Etat ne doit pas accaparer e tous les postes… Un pays qui accueille pas une institution ne doit pas avoir son représentant à la tête d cette institution. C’est pourquoi le Cameroun ne pourra jamais diriger la Beac, le Congo ne peut pas diriger la BDEAC…

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De notre envoyé spécial à Malabo, Thierry Ndong Owona

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