Comme Dieu seul est saint (saint équivaut ici à parfait, à « sans péché ») et que les gens proclamés saints n’étaient pas sans défauts, il serait plus approprié, à mon humble avis, de parler de témoins. Le témoin est celui ou celle qui, dans son époque et milieu, a rendu témoignage à l’une ou l’autre béatitude que nous avons cherché dans l’évangile de Matthieu 5, 3-12 : l’humilité, la miséricorde, la pureté du cœur, la recherche de la paix, la pratique de la charité ou la lutte pour la justice.
Le témoin peut être un adulte ou un jeune (Dominique Savio, Kisito), un consacré (Padre Pio, Mère Teresa) ou un laïc (Édith Stein), être chrétien ou non (Mahatma Gandhi, Émile Zola qui prit la défense du capitaine Alfred Dreyfus injustement accusé de trahison…), avoir connu une mort paisible ou violente (Jean-Baptiste, les apôtres Pierre et Paul, les martyrs de l’Ouganda, Mgr Oscar Romero).
Quoi qu’il en soit, les personnes dont les vertus héroïques sont décrites le 1er novembre ont généralement souffert. Elles ont été soit incomprises, soit persécutées, soit rejetées, soit tuées. Le mot grec « marturos » a justement cette double signification : témoin et martyr.
Pourquoi l’Église catholique fait-elle la mémoire de ces témoins ? Pour nous dire que nous pouvons faire comme eux, que chacun de nous, s’il le veut, peut mener le combat pour la vérité, la liberté et la justice. Pour nous rappeler que l’avoir, le savoir et le pouvoir, aussi importants soient-ils, ne doivent pas nous rendre arrogants ni méprisants (« heureux les pauvres de cœur »).
Martin Luther King, Patrice Lumumba, Thomas Sankara, Victor Biaka Boda, Aline Sithoé, Marie Koré, Kassi Amangoua, Socrate, Um Nyobè, Nyerere, Barthélemy Boganda, Modibo Keïta, Helder Camara, Frantz Fanon, Sartre, Aimé Césaire, Che Guevara, Ernest Ouandié et tant d’autres ne sont certes pas sur le calendrier chrétien mais je les croise auprès de Dieu parce qu’ils ont mené le combat de Dieu et parce qu’ils ont mené ce combat dans les larmes et le sang.
Jean-Claude DJEREKE