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En arrière les déboires

«Des choses à dire»

3-7 octobre 2023, Douala vibre au rythme de la première édition du Salon international de l’entrepreneuriat féminin. À cet événement 11 pays membres de la Communauté des États d’Afrique centrale (CEEAC) prennent part. Entre temps, l’on annonce le Fafe (Forum Africain des Femmes Entrepreneures). Ce sera du 13 au 19 novembre au Palais Polyvalent des Sports de Yaoundé, avec de grandes figures de l’entreprenariat féminin d’Afrique et d’ailleurs. Selon des observateurs, cet enchaînement est moins futile qu’il ne paraît. «Les femmes entrepreneures ont des choses à dire dans un environnement qui leur est particulièrement hostile», souffle Anne Bapeck. À entendre cette économiste camerounaise, sur le marché du travail comme dans l’entrepreneuriat, la participation des femmes à l’économie est longtemps restée invisible. Leur situation a certes évolué mais des déséquilibres existent toujours. Bien plus, le portrait quantitatif de l’entrepreneuriat des femmes reste difficile à dresser en Afrique centrale. Dans cet espace géographique, l’écosystème du financement des entreprises reste majoritairement masculin, et la surreprésentation masculine parmi les décisionnaires influe sur la manière dont ces fonds sont attribués. Et pour ne rien arranger, le plafond de verre auquel se heurtent les entrepreneures a une autre clef de voûte: les stéréotypes.
En Afrique centrale, cela est davantage vrai que pour celles qui entreprennent, toujours bien moins nombreuses que les hommes. Quels sont les défis et enjeux auxquels sont confrontées les femmes désirant se lancer en entrepreneuriat? Quelles actions peuvent être mises en œuvre par le secteur privé et les milieux gouvernementaux afin d’accompagner l’entrepreneuriat féminin? Autant de questions qu’aborde le présent zoom.

 

Des experts signent sur une réelle volonté de dépasser la fatalité et d’agir.

Des femmes entrepreneures en session d’échanges au Salon international de l’entrepreneuriat féminin à Douala

«Nous savons que les femmes en Afrique sont davantage susceptibles de devenir entrepreneures mais elles sont aussi confrontées à bien plus d’obstacles que les hommes pour créer et diriger leurs entreprises». Plusieurs fois, cette phrase de Kristalina Georgieva, la directrice générale de la Banque mondiale a été reprise par des experts lors de la première édition du Salon international de l’entrepreneuriat féminin tenu récemment à Douala. Au cours d’une prise de parole devant la presse, Esther Nkolo Abomo estime qu’ «en Afrique centrale, le temps d’agir conte cette situation est venu». Peut-être voulait-elle dire que la lutte qui se mène depuis des lustres dans la sous-région ne serait pas achevée, c’est-à-dire pas suffisamment victorieuse pour qu’il ne faille pas recommencer avant d’obtenir gain de cause. Et parmi les arguments qui font scintiller un autre monde possible, Édith Fokou parle de «prise de conscience». «Prise de conscience des femmes d’Afrique centrale elles-mêmes; parce que si l’entrepreneuriat africain est salutaire pour les femmes, il l’est également et surtout pour les femmes de la sous-région».

Action
Et pour cela, «il ne faudrait plus attendre, attendre que ça bouge du côté de ceux qui veulent maintenir l’ordre et les ordres des choses», appuie Ufea Kouemou, socio-économiste camerounaise. D’après cette dernière, les femmes des femmes entrepreneures doivent désormais imposer leur désir d’exercer le pouvoir économique en Afrique centrale. Mieux: «elles ne doivent plus incarner la contradiction entre jouer les premiers rôles et se conformer aux normes de la féminité imposées par la société». L’explication centrale est que «les femmes entrepreneures sont devenues actrices à la fois formelles et informelles de la vie économique, avec une extension progressive de leur compétence dans le monde des affaires en Afrique centrale». Ce qu’il y a à décrypter dans ce propos de de René Owone Ekodo (ingénieur-statisticien camerounais), c’est le «comment faire pour passer de l’effacement de la femme entrepreneure à la visibilité accrue de son rôle au sein de l’espace sous régional».

Selon des experts, la réponse se trouve à une double échelle: «en haut, il y a les femmes entrepreneures elles-mêmes. En bas, il y a le contexte généré par la Zone de libre-échange continentale», selon l’analyse de Daniel Minla’a, sociologue gabonais. Pour aller vite, ce dernier affirme que c’est cette conjonction qui autorise une personnalisation beaucoup plus forte du pouvoir économique de la femme entrepreneure en Afrique centrale.

Jean-René Meva’a Amougou

 

Ce qui doit changer

Trucs et astuces pour construire l’image des femmes entrepreneures plus dignes dans la sous-région.

 

Si, selon la Banque mondiale, deux fois plus d’hommes que de femmes se sont lancés dans l’entreprenariat en Afrique centrale après le ralentissement économique lié au Covid-19 en 2021, il n’est pas sûr que cela reflète un différentiel de motivation. En réalité, cela témoignerait plutôt, disent les experts, des obstacles rencontrés par la gent féminine.

Parmi les facteurs bloquants, la charge mentale familiale caracole en tête. «Nous avons remarqué que les femmes entrepreneures redoutent effectivement de gérer de front leurs obligations de mère et de cheffes d’entreprise. Cela se recoupe avec le manque de temps lié à la gestion des obligations familiales», établit Dieudonné Essomba, ingénieur-statisticien camerounais.

L’autre frein avancé est les préjugés à l’égard des femmes entrepreneures. «Dans bien des pays d’Afrique centrale que j’ai visités, c’est cela qui les empêche de mener à bien leur projet», affirme Dieudonné Essomba. Il s’intéresse plus spécifiquement aux obstacles survenant dans les milieux d’affaires considérés comme masculins. Ce qui revient le plus fréquemment dans sa démonstration, c’est la peur de ne pas bénéficier de la même considération face à des hommes. La crainte des remarques sexistes persiste dans nos communautés; ce qui peut conduire à ne pas tenter l’aventure dans ledit domaine. Mais alors, comment peut-on imaginer dépasser ces barrières? Dieudonné Essomba pose la question. Dans les solutions évoquées, le soutien financier, par le biais d’un fonds d’investissement dédié, est plébiscité. Pour pallier les problèmes, pourraient être envisagées de la même façon, une aide ciblée, ainsi qu’une politique publique visant à favoriser l’égalité des genres dans l’entrepreneuriat.

JRMA

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