Emmanuel Pharel Ndi Bessala : quand se nourrir touche à l’indicible

À cause d’un satané produit toxique qu’il a ingurgité l’an dernier, le gamin a le calibre de l’œsophage rétréci jusqu’à l’estomac. Ne pouvant plus rien avaler, sa nutrition reste suspendue à une sonde.

 

Se nourrir à l’aide d’un tube en caoutchouc ajusté dans une paroi de l’abdomen. Considérez, non pas comme évident, mais comme un fait étonnant. En tout cas, ce qui peut se dire avec le langage ordinaire appelle un récit d’une enfance contrariée. Débité par Joséphine Amana (30 ans) ce 3 mars 2023, ce récit-là est un discours qui met en scène, par le moyen des mots, une histoire, c’est-à-dire une suite chronologique d’événements au centre desquels se trouve Emmanuel Pharel Ndi Bessala. Beau bébé en pleine santé lorsqu’il naît il y a 3 ans à Yaoundé, le gamin ingurgite par inadvertance un fongicide au mitan de juillet 2022. En rendant compte des parcours chaotiques, mais aussi des stratégies déployées pour aménager le quotidien de son unique fils, Joséphine Amana se surprend dans des tâtonnements langagiers par rapport à une réalité qu’elle accepte stoïquement. Des multiples allées et venues dans des hôpitaux aux regards des autres, en passant par les argents dépensés, les multiples appels à l’aide via des médias ayant pignon sur rue au Cameroun et dans le monde, ainsi que d’autres démarches informelles en périphérie du strict cadre des soins, rien n’est qu’un détail.

Le malade et la maladie
Parmi les questions ouvertes par cette situation, il y a celle liée au diagnostic médical. Des spécialistes parlent d’une «sténose multi-étagée de l’œsophage». «L’affaire-là correspond à un rétrécissement du calibre de la gorge jusqu’à l’estomac. Donc, l’enfant ne peut rien avaler», renseigne un médecin-pédiatre. En tout cas, ce n’est pas la maladie qui est interrogée. Ici, c’est le sens du mal ressenti par le jeune Emmanuel Pharel Ndi Bessala. À l’écouter, il refuse d’accepter que le mal qui le tenaille l’expose à une mise en jeu de son capital santé, voire au risque de mort. À l’écouter encore, il se montre fort lors des consultations répétées d’un suivi chronique et de la gestion de sa dépendance à la sonde. Et par rapport à ce dispositif, Emmanuel Pharel Ndi Bessala sait qu’au moindre frottement, au moindre toucher ou même sans raison apparente, tout part en lambeaux, laissant un trou à vif sur son abdomen. Alors, il joue sans excès. D’ailleurs, jouer avec lui, c’est mettre à contribution un énorme potentiel d’affectivité.

Le parent et l’épreuve
Dur de ne pas être attentif quand on est un parent. Joséphine Amana fait bonne figure. Modeste pompiste chez dans une structure spécialisée dans la commercialisation des hydrocarbures, il lui faut garder vivante la fibre maternelle, malgré toutes les épreuves. Continuer de se réaliser par son travail et tenter de maintenir une carrière ascendante, elle dit avoir adapté son emploi de temps à la maladie de son fils. De fait, la constitution de son rôle de parent tend alors à s’orienter vers deux modalités sujettes à contradiction : une flexibilité à vivre au jour le jour et à maintenir son garçon dans un bon état de propreté selon les moyens disponibles. Au quotidien,

Bureaucratie
Pour espérer qu’il se «débarrasser» de la sonde, Emmanuel Pharel doit être réussi. Sur place, le plateau technique n’est pas des plus lourds. Joséphine Amana explore partout, en Tunisie, en Turquie, en Inde… Il s’agit notamment de contacter les hôpitaux d’accueil à l’étranger afin d’obtenir d’autres devis estimatifs d’hospitalisation et de soins conformément au diagnostic et aux suggestions de consultants locaux. Pour le cas de son fils, c’est du lourd : « 9 millions FCFA ici, 12 millions FCFA et plus par là…Elle raconte que, par choix raisonné, des médecins spécialistes et les personnels administratifs ou financiers ont été inclus dans la constitution d’un dossier médical soumis à l’appréciation du ministère camerounais de la Santé publique. Depuis des mois, Joséphine Amana est perdue dans le système de gestion des évacuations sanitaires». La, mon horizon c’est Dieu. Il est le seul capable d’assurer non seulement la guérison mais également la viabilité de mon bout de choux. Je souhaite qu’il touche toutes les âmes de bonne volonté pour sauver Emmanuel Pharel», dit-elle, une larme à l’œil.

Jean-René Meva’a Amougou

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