Du fait de la concurrence des producteurs alternatifs des informations et nouvelles, le professionnel des médias est à la croisée des chemins et doit trouver sa voie.
Déjà un an pour le journal «Lignes d’Horizon». Un jour anniversaire que le promoteur du magazine a voulu marquer par le lancement de «Le débat des lignes d’horizon». Loin des mondanités, Valentin Siméon Zinga a convié les professionnels du journalisme et enseignants à un échange autour du thème: «Ce qu’être journaliste veut dire aujourd’hui au Cameroun». Un thème fort interpellateur visant à redéfinir qui est journaliste dans un contexte marqué par la concurrence d’autres sources d’information. «Nous vivons en effet des temps extraordinaires, où l’identité du journaliste est soumise à une instabilité plus lourde qu’il paraît, en tout cas plus lourde qu’avant, avec notamment la montée en puissance de ce que j’ai appelé par ailleurs les producteurs alternatifs de nouvelles.
Ce sont les internautes inspirés, compulsifs. Ce sont des institutions en crise, ce sont des opérateurs politique en campagne permanente, ce sont des communicants proactifs, c’est aussi des lanceurs d’alerte», fait savoir le directeur de publication de Lignes d’Horizon, Valentin Siméon Zinga. «Nous voici sur une scène occupée de part en part par d’authentiques gladiateurs et animés par des francs-tireurs, où tous mécènes généreux et dangereux d’une part, mercenaires stipendiés se déploient de manière tout à fait décomplexée, devant des publics qui pour la plupart ont abdiqué leur sens et leur devoir critique», a-t-il renchérit.
À travers «Le débat des lignes d’horizon», Valentin Zinga entend faire une introspection de manière à questionner jusqu’où vont les dérives de ce concubinage évoqué supra. Tout en reconnaissant la complexité du problème, qui s’entremêlent, se chevillent et s’entrechoquent, il propose quelques pistes de sortie. Elles portent sur «la nécessité de l’autorégulation, du financement et de la formation. Ceci peut paraître défensif, je pense qu’il faut intégrer une approche plus globale, systémique de ce problème pour qu’au bout du compte dans les dynamiques sociales ou sincères du journalisme, que le jeu des acteurs soit particulièrement rigoureux. Ce n’est pas le cas chez nous, puisque vous voyez que des journalistes sont devenus des porte-voix, sont des hommes politiques, des acteurs économiques, comme on l’a dit, la préoccupation est globale. Il faut des solutions globales», plaide Valentin Zinga.
Ainsi le promoteur à travers cette plateforme de réflexion jette un regard rétrospectif sur les pratiques du journalisme au Cameroun. Valentin Siméon Zinga s’arrache dès lors de la logique d’observateur résigné des dérives constatées au quotidien. «Nous devons susciter la réflexion en permanence pour qu’à tout le moins, à défaut d’être des vigiles, qu’on s’institue comme des spectateurs engagés. C’est-à-dire des gens qui ont un mot à dire, c’est-à-dire creuser chaque fois pour savoir quels sont les points d’introspection qui sont susceptibles de nous améliorer, et sans doute améliorer les contenus et les productions», conclut le directeur de publication de Lignes d’Horizon.
Olivier Mbessité
Le journalisme camerounais en quête d’un idéal
Parmi les solutions envisagées, il y a la nécessité pour le professionnel de repenser la pratique journalistique et de l’adapter au nouvel environnement.
De nombreuses mutations sont en cours dans la société actuelle et elles affectent divers secteurs. Le constat est consigné dans l’ouvrage «L’écriture journalistique, stratégies rédactionnelles, multimédia et journalisme narratif, 2ème édition». Il y est précisé que «l’écriture journalistique est en profonde mutation, tout comme les métiers de l’information. D’un point de vue pragmatique, il est légitime d’éprouver d’une sorte de codification des usages.(…)». Dès lors, la collecte doit être ciblée sur la base de trois éléments fondamentaux. À savoir, la formation et l’équipement, l’administration et la justice. C’est ce qu’il ressort de «Le débat des Lignes d’horizon» organisé par Valentin Siméon Zinga. Le directeur de publication de «Lignes d’horizon» a convié à ces échanges plusieurs personnalités du monde des médias. Et c’est au cours de ceux-ci que Christian Wangue a pour sa part procédé à la distinction entre «le journalisme de qualité à celui du caniveau».
Plusieurs problématiques restent cependant à date sans réponses: le journalisme aujourd’hui au Cameroun est-il en danger? Le problème vient-il des acteurs de cette profession? Ou est-il ailleurs? Au vu des faits, le journaliste serait-il un danger pour sa société? Des interrogations auxquelles se sont succédé quelques certitudes. Notamment que «le journaliste a une base et une formation, il se cultive, il peut être considéré comme un lecteur actif. Face aux manquements de ce secteur, il ne faut pas oublier que le journaliste évolue dans un environnement macrocosmique et s’il faut lui apporter des solutions, il faut étendre cet élan consciencieux auprès des autres secteurs et acteurs qui l’entourent. Il vit dans le même environnement et est influencé par ces derniers», a fait valoir le panel.
Loin des dépendances auxquelles le journaliste d’aujourd’hui est touché, «je propose qu’il exerce comme les avocats», détaille Christian Wangue. Et pour arriver à ce stade de liberté, «la sphère médiatique doit évoluer en chaîne. C’est-à-dire que le responsable de média, le personnel et les lecteurs doivent évoluer ensemble».
La ligne de défense du Pr. Ambroise Nkom n’est pas très différente. Le responsable de la librairie des peuples noirs fait en effet savoir que «le journalisme n’est pas un monde à part. La presse est un service autant important que la santé, l’éducation ou la justice. Il a lieu d’exister».
Les interactions avec le public ont également permis aux uns et aux autres d’être fixés sur les contours de l’idéal du journalisme au Cameroun. Et à ce propos, Christian Wangue relève «tout d’abord que la base de ce métier est de dire ce qui se passe. Ensuite, il faut avoir la technique pour rendre cette information digeste. Enfin, le journaliste doit avoir une exigence personnelle: c’est un métier de contact dans lequel il faut savoir garder de la distance».
Presvualie Ngo Nwaha (stagiaire)