Crise anglophone : Des options constitutionnelles comme voie d’extinction

Un groupe de Camerounais ayant une expérience dans les domaines de la paix, des droits de l’homme et de la résolution des conflits politiques propose une série de mesures structurelles, de nature politique, juridique et éducative.

Scène de violences dans le NOSO

Peut-on envisager des itinéraires de pardon et de réconciliation dans le cadre de la crise sociopolitique qui secoue les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest du Cameroun depuis 2016 ? Comment la dynamique du pardon et de la réconciliation peut-elle être porteuse d’une action de réconciliation sociale et politique dans ces zones ? L’initiative désignée « Projet sur les options constitutionnelles » aide à comprendre les tensions spécifiques à l’Afrique et montre comment la réconciliation est une urgence et une nécessité aujourd’hui. Paul Nana Simo, son coordinateur, utilise la métaphore de «l’arbre à palabre». « Nous sommes convaincus qu’en distribuant et en échangeant pacifiquement nos points de vue différents, sur les questions importantes qui touchent le pays, nous pouvons trouver un terrain d’entente », assure-t-il d’emblée.

« Passages obligés »
Pour le spécialiste camerounais, la crise anglophone est à inscrire dans un schéma de rivalités politico-culturelles. Sur le terrain, la situation a dépassé le simple point de vue historique ou politique pour s’imbriquer dans le microcosme de la quête de l’identité culturelle et sociale. «La crise a été causée principalement par des plaintes sur le respect des institutions anglo-saxonnes (dans l’utilisation des langues, officielles, l’éducation et la justice) et non par le sous-développement socio-économique», avance Paul Nana Simo.

Au terme de l’étude qu’il a coordonnée, il ressort que la construction de la paix au Nord-Ouest et au Sud-Ouest exige une série de mesures structurelles, de nature, juridiques, politiques et éducatives. «Pour que les lois camerounaises répondent aux besoins des droits français et anglo-saxon/Common Law, elles doivent être rédigées par des experts juridiques, simultanément dans les deux langues officielles et leurs langues juridiques (bijuridisme législatif); elles ne doivent pas être écrites dans une langue et puis traduites dans l’autre», propose-t-il.

Bien plus, les transformations opérées par le contexte de guerre dans la partie anglophone du Cameroun impliquent la surveillance de l’éducation en tant que source de conflits. Paul Nana Simo tient pour vrai l’idée selon laquelle « les systèmes éducatifs et les écoles classiques francophones et anglophones présentent des différences dans leurs méthodes d’enseignement ». Alors, « pour faire la paix en préservant les spécificités des systèmes éducatifs, il faut valider et confirmer ces différences ».

Dans un autre développement, l’étude montre que les instruments majeurs de la restauration de la paix au Nord-Ouest et au Sud-Ouest du Cameroun restent des institutions politiques dont le devoir essentiel est la mise en place et la gestion d’un ordre sociale décentralisée. « Dans plusieurs pays du monde, les compétences et attributions sont distinguées aux régions de manière différente, en tenant compte de leurs spécificités linguistiques, culturelles, historiques ou autres. Cela peut être fait même au sein des États unitaires et a été utilisé avec succès dans les processus de paix pour résoudre les conflits liés aux revendications d’autonomie des régions», suggère Paul Nana Simo.

Jean-René Meva’a Amougou

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