La 116e session du Congrès des États-Unis pilonne indifféremment Yaoundé, Paris et les milices armées.
Des phrases incandescentes, des froncements de sourcils et des bricoleurs qui décident de tomber leurs masques en parlant de la crise sociopolitique dans la partie anglophone du Cameroun. Telle est l’ambiance lors de la 116e session du Congrès américain à Washington DC, le 8 septembre 2020. Ce jour, Jim Risch occupe longuement la scène pour décrire la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du pays. En posture de président de la Commission des relations extérieures du Sénat américain, le parlementaire rallie de précieux suffrages dont celui de Ben Cardin (membre éminent du sous-comité sur l’hémisphère occidental, la criminalité transnationale, la sécurité civile, la démocratie, les droits de l’homme et les problèmes mondiaux des femmes au Congrès américain).
Suffisant pour adopter quelques résolutions. Globalement, celles-ci épinglent à la fois les autorités camerounaises et les activistes séparatistes. «Le sénat américain condamne fermement les abus commis par les forces de sécurité de l’État et les groupes armés dans les régions du NoSo, y compris les exécutions et détentions extrajudiciaires, le recours à la force contre les civils et les manifestants non violents, la torture, les viols, enlèvements et autres formes de violence contre les femmes et les violations des libertés de la presse et d’expression», déclame un extrait. Face à ce drame en puissance, les sénateurs américains s’unissent et lancent non seulement un appel à l’aide humanitaire, mais demandent aussi des mesures d’exception applicables aux gouvernants et aux groupes armés. Au-delà, ils témoignent de la capacité au dialogue des acteurs concernés, laissant entrevoir la convergence d’un certain nombre de leurs intérêts, longtemps perçus comme totalement opposés.
Paris accusée…
Dans son arsenal de résolutions, le Sénat américain introduit une ligne qui incrimine la France. Tout en décryptant les intérêts de Paris au Cameroun, Washington constate que le pays d’Emmanuel Macron «n’a pas suffisamment utilisé son influence pour endiguer les atrocités commises dans les régions anglophones, ou soutenir une action internationale plus forte pour rechercher une résolution du conflit». Fort de l’idée que «l’Amérique est le leadeur du monde libre», le Congrès invite la France à se commettre et «à joindre à un effort collectif stratégique pour faire pression sur le gouvernement du Cameroun et les groupes armés séparatistes, notamment par l’utilisation des outils diplomatiques et punitifs disponibles, pour conclure et maintenir un cessez-le-feu immédiat, et participer à un dialogue inclusif et significatif pour s’attaquer aux causes profondes du conflit et griefs en suspens, et rechercher une solution non violente au conflit, y compris en faisant appel à un médiateur indépendant et crédible».
Dans ce plaidoyer, la bande à Jim Risch s’attache à mieux définir ses priorités et ses orientations dans le rapprochement entre grandes puissances appelé de tous les vœux. Le tout se décline en l’utilisation des forums régionaux et internationaux, y compris l’Union africaine, la Communauté des États d’Afrique centrale, et le Conseil de sécurité des Nations unies, pour discuter de la crise anglophone. De même, il est question de faire pression pour l’arrêt des violences et la mise en œuvre d’un programme, convenu d’un commun accord, pour s’attaquer aux causes profondes de la situation actuelle dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Jean-René Meva’a Amougou