Rien ne filtre sur le sort des fonctionnaires capturés par des bandes armées dans le Sud-ouest et le Nord-ouest.
Sept chefs traditionnels Bakweri ont été libérés le 30 juillet 2018. Le faste et la solennité liés à la bonne nouvelle ont autorisé Paul Atanga Nji à dérouler le tapis rouge aux anciens captifs des bandes armées qui sévissent dans la région du Sud-ouest. Le cabinet du ministre de l’Administration territoriale (Minat) a servi de cadre à la cérémonie. Pour l’occasion, le récit de la remise en liberté des dignitaires Bakweri a été soigneusement construit par des communications et urgentistes de marque. En posture d’invité du 13 heures de la CRTV, le Minat a révélé que l’on doit la libération des chefs à l’implication personnelle du chef de l’Etat, Paul Biya. Le Minat Paul AtangaNji n’a pas manqué de susciter un climat éditorialement positif autour du comportement du président de la République.
A quelques nuances près, on parlerait d’un remake de la scène vécue en début avril à Yaoundé. En ces temps-là, Issa Tchiroma Bakary, ministre de la Communication (Mincom) saluait, au nom du peuple camerounais, le happy end de l’infortune d’une vingtaine de touristes italiens et suisses enlevés dans la localité du Moungo – Ndor (Kupe Manengumba).
Entre temps, l’opinion guette les contradictions et soupçonne tout geste du gouvernement dans le cadre de la gestion de crise anglophone. Avec la libération des chefs Bakweri, la question de fond se pose d’autant plus que la série des kidnappings tend à se banaliser. Dans cette ambiance, certains enlèvements ont vite fait d’être ensevelis, bien qu’ils aient écœuré la nation entière. Dans cette fourchette, l’on tient le cas de certains fonctionnaires : Marcel Namata Diteng (sous-préfet de Batibo, région anglophone du Nord-Ouest enlevé le 11 février 2018), Nimbom Arong Yong (délégué régional du ministère des Affaires sociales (Minas) dans le Nord-Ouest.
Enlisement
En février 2018, l’organisation International Crisis Group, évaluait à au moins 23 gendarmes et policiers camerounais tués ces trois derniers mois, 75 civils tués par les forces de sécurité depuis septembre de l’année dernière. Sur les ondes de RFI (Radio France internationale), Hans de Marie Heungounp, chercheur à International Crisis Group, parlait d’une insurrection tentant de prendre pied depuis. «Cette insurrection s’articule pour l’instant autour de groupes d’autodéfense. Il y en a plus d’une dizaine présents dans les deux régions, mais aussi deux ou trois principales milices, en particulier l’Ambazonia Defense Forces (ADF) et les Southern Cameroon Defense Forces (SCDF). Il y en a deux avec des acronymes différents. Ce sont ces milices principales, qui, de concert avec les groupes d’autodéfense, organisent des attaques de basse intensité contre les postes militaires, les postes de gendarmerie et les postes de police».
Il est difficile de savoir avec précision quel est le nombre de combattants dans chacune de ces milices ou groupes d’autodéfense, «mais au sein des différentes milices, cela tournerait autour d’une centaine de combattants. Et (…) la plupart des autres groupes d’autodéfense comportent un effectif allant de 10 à 30 membres actifs ou combattants», précise le chercheur. Toujours selon ICG, ces groupes utilisent des armes légères comme des fusils traditionnels ou des grenades pour certains. Mais ils ne disposent pas d’armement lourd.
Jean René Meva’a Amougou
Région du Nord – Ouest
Entre recensement des déplacés et enlèvement d’un commissaire de police
Tranches de vie de la semaine qui s’achève à Bamenda et ses environs.
Ce n’est pas encore la distribution du kit de survivance et du matériel de réhabilitation aux déplacés internes de la crise dite anglophone dans la région du Nord-ouest. Bien que le premier contingent des dons et autres denrées alimentaires soit déjà dans les chefs-lieux des régions concernées. En attendant, le gouverneur de la région du Nord-ouest, par délégation de pouvoir au secrétaire général auprès de ses services, vient de commettre un communiqué radio conviant les déplacés à se faire enregistrer auprès des sous-préfectures. Dans ce communiqué daté du 3 août 2018, Harry Lanyuiy, SG auprès des services du gouverneur, on peut lire: «dans le cadre l’assistance humanitaire d’urgence décidée par le président de la République pour les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, le gouverneur de la région du Nord-ouest invite toutes les personnes déplacées dans la région à contacter l’autorité administrative la plus proche dans le but de s’inscrire».
Quant à celles vivant à Bamenda et ses environs précise ledit communiqué, elles peuvent contacter le point focal de la protection civile logé dans ses services et ce «tous les jours de 9h à 15h ou appeler le numéro 233361941». Le gouverneur dit pouvoir compter sur la collaboration et le sens de responsabilité civique de tous et de chacun pour le succès de cet exercice. Ce n’est qu’au terme de ces enregistrements que débutera la distribution. On peut lire en filigrane, à la suite de ce communiqué, un moyen d’assurer l’accountability, mais aussi de procéder au recensement de toutes les personnes qui ont fuit les affres de ce conflit qui a glissé en affrontement entre les forces de l’ordre ou de sécurité et les séparatistes.
kidnapping
Pendant qu’on sollicite l’enregistrement des personnes déplacées, les nouvelles sur le terrain ne sont guère reluisantes. En effet, le commissaire Samuel Mbiba du commissariat spécial de Bali, dans l’arrondissement hyponyme, a été enlevé en compagnie de son épouse dans la matinée du lundi 30 juillet, par des individus armés non identifiés. Ils ont été conduits loin du centre ville. L’épouse du commissaire de police a finalement été libérée. Mais les kidnappeurs ont confisqué les téléphones du couple. Vraisemblablement pour empêcher d’alerter les forces de l’ordre. Les recherches menées pour retrouver le commissaire Samuel Mbiba sont restées infructueuses. Il est toujours en captivité.
La bonne nouvelle est la libération du procureur de la République auprès les tribunaux de Fundong. Le magistrat Francis Tabufor kidnappé le 27 juillet a été libéré mardi dernier 31 juillet. Les forces de l’ordre sont allées le dénicher à Oku avant de le conduire pour de soins à l’hôpital BBH (Banso Baptist Hospital) à Kumbo.
Zéphirin Fotso Kamga