Coronavirus au Cameroun: le «passager 57» de SN Brussels dénonce

Ce voyage a commencé d’une drôle de manière. Vers 19 h la veille du voyage, SN Brussels a d’abord envoyé un courriel à ses passagers, reportant à 15 h un vol prévu à 11 h 40.

 

Pour moi, j’avais annulé le voyage, d’autant plus que Macron avait annoncé le confinement dès midi. À 2 h 30 du matin, autre message de SN Brussels. Le vol est ramené à 11h40. Je me dis que ma femme peut me déposer à Roissy et avoir le temps de rentrer à la maison avant le confinement total. Si les passagers avaient su que les frontières camerounaises allaient être fermées, je peux t’assurer qu’à 5 minutes près, tous allaient demeurer chez eux en France ou en Belgique où les prestations sanitaires sont mille fois mieux qu’au Cameroun!

Idées reçues
Je le dis parce que le ministère de la Santé publique et les populations véhiculent l’idée selon laquelle ce sont les Camerounais de la diaspora qui ont délibérément voulu contaminer leurs concitoyens du Cameroun. On oublie que le covid19 est apparu dès novembre, et que des centaines de Camerounais commercent avec la Chine dans l’achat de toutes sortes de marchandises. En effet, les avions atterrissent toutes les semaines, transportant Chinois et Camerounais, et on omet de dire que ces gens ont pu introduire le virus au Cameroun dès novembre. Pour revenir au fameux vol SN369 du 17 mars.

«Périple confiné»
À notre atterrissage à Yaoundé, des escouades de policiers, gendarmes et militaires en armes nous attendent au pied de la passerelle. Nous sommes soumis à la prise de température et à un questionnaire sommaire sur notre état de santé. Nos bagages sont débarqués sur le tarmac et désinfectés par des équipes d’un service dont les membres étaient encagoulés et armés de projecteurs d’un liquide douteux. Nous sommes embarqués dans des bus, à partir de la piste d’atterrissage, pour des hôtels de la place. Nous remarquons néanmoins que 2 femmes et 2 hommes repartent tranquillement à pied, alors que nous sommes conduits vers des hôtels. Pour mon groupe, nous étions 22 en direction de l’Hôtel Safyad.

Nous comptions dans nos rangs une dame, d’une cinquantaine d’années, et sa fille de 25 ans, toutes deux pharmaciennes; une autre dame, franco-malienne, et son fils, un métis de 9 ans, dont le père, un Français, travaillerait à Yaoundé. À notre arrivée à l’Hôtel Safyad, nous sommes logés dans des chambres individuelles, à l’exception des deux mamans et leurs enfants. Le lendemain, deux passagers exigent de se faire tester par une équipe médicale de passage à l’accueil de l’hôtel. Le rationnement n’étant pas prévu, quelques passagers se sont achetés à manger au restaurant de l’hôtel.

L’argent dépensé leur sera remboursé le soir même, lorsqu’un agent, se présentant comme venant des Finances, viendra pour signer une prise en charge du rationnement des passagers, à hauteur de 17 500 FCFA par jour et par passager. Aucun test n’a été effectué durant cette première semaine, ni de prise de température ou de tension. Une semaine plus tard, à 11 h, on nous embarque, sous forte escorte policière, dans des bus pour le Palais des sports. À notre arrivée, des tentes blanches dressées nous attendent. Malheureusement, on finit par nous dire, à 14 h, que les tests ne sont pas prêts.

Retour à l’hôtel. Toujours pas le moindre suivi médical. Feu Yousoufa avait, la veille, appelé les services médicaux pour qu’on lui administre des infiltrations dans le genou. Il nous a expliqué que c’est un traitement qu’il avait commencé en Belgique et qu’il était impératif qu’il le suive. Nous étions pourtant confinés avec une jeune médecin et une laborantine, mais aucune n’avait le moindre thermomètre pour nous prendre la température, ou même s’enquérir de notre état de santé. Ce n’est que le lendemain du décès de M. Youssoufa que ces dernières ont commencé à faire les tournées dans les chambres.

Transfert
Lorsque, le 1er avril, on nous débarque à Olembe à 2h du matin, on nous a au préalable donné des résultats des tests réalisés 3 jours avant au Palais des sports. On ne comprend juste pas que certaines personnes testées négatives le lendemain de notre débarquement soient testées positives 10 jours après. Que la pharmacienne, qui a partagé draps, serviettes, couverts et souffle dans la même couverture, soit testée positive et sa fille négative. Quelle est la fiabilité de ces tests? Je ne parle même pas de ceux qui n’ont pas reçu leurs résultats plusieurs jours après! On intègre des appartements sommairement meublés de lit en fer et de matelas de mousse.

Heureusement que les confinés avaient des familles qui les suivaient, sinon nous serions demeurés affamés durant toute la journée. Finalement, c’est à se demander si les chiffres énoncés par les autorités sont vrais, car aucun de ces testés positifs n’est mal. D’ailleurs, aucun soin n’est entrepris pour soigner quoi que ce soit. S’il s’agissait de vrais tests, on aurait au moins pu voir la charge virale de chaque patient. Or, il n’y avait rien de tel, sinon les médecins auraient administré des médicaments à ces personnes, ne fût-ce que pour baisser cette charge virale.

En effet, ils comptent sur le fait que si rien n’est fait, les organismes combattront le virus, finiront par le vaincre et les patients seront par la même occasion immunisés. Mais si, aux prochains tests, la charge virale n’a pas baissé, alors ces mêmes personnes seront testées positives et resteront confinées ad vitam aeternam! Donc nous attendons. Les prises de température ne sont même plus faites, et des sandwiches, soi-disant venus d’un service traiteur, nous sont déposés dans des cartons comme à des pestiférés.

Des camions sont arrivés il y a 4 jours avec des chaises et des réfrigérateurs, mais rien n’a été distribué dans les appartements et on continue de vivre dans le sommaire. Heureusement que nos familles nous apportent à manger avec d’autres ustensiles et matériels pour améliorer notre quotidien, non sans se faire contrôler, engueuler et insulter par les policiers en garde à l’entrée du camp!!! Une fois de plus, quels sont ces Camerounais qui choisissent de quitter leur confort occidental pour se retrouver prisonniers, sachant que les frontières vont être fermées????

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