Bruxelles vient de mettre à la disposition du continent 262 milliards de francs CFA. Une partie de cet argent servira à renforcer les programmes d’échange entre les universités africaines.
Le renforcement des capacités de résilience de la jeunesse africaine a été le grand crédo du 5e sommet Union africaine (UA) Union européenne (UE). A Abidjan en fin novembre 2017, les pays membres des deux organisations ont vu en cette solution la panacée pour la lutte contre l’immigration. Celle-ci passe, selon eux, par «une attention particulière à l’amélioration de l’employabilité et de la mobilité des jeunes et à la promotion de l’innovation technologique».
Le financement mise à disposition par Bruxelles devrait permettre par exemple «de renforcer les programmes d’échanges entre universités africaines en se fondant sur l’expérience acquise dans le cadre du programme Erasmus, et de soutenir la reconnaissance des qualifications et l’harmonisation de l’enseignement supérieur en Afrique, en s’inspirant du processus de Bologne mené par l’UE». Un semestre après ce sommet, les exécutifs des deux institutions continentales se sont retrouvés le 23 mai dernier à Bruxelles pour notamment organiser le schéma cette interconnexion universitaire africaine.
I- L’appoint européen
«Dans le contexte du partenariat Afrique-UE, l’UE a mis à disposition une enveloppe supplémentaire de 400 millions d’euros [262 milliards de francs CFA] destinée à des projets régionaux et continentaux», peut-on lire dans le communiqué sanctionnant cette 9e réunion entre la Commission de l’UA et de la Commission de l’UE. «Ceux-ci visent notamment à promouvoir le renforcement des capacités institutionnelles de la Commission de l’Union africaine et à apporter un soutien aux jeunes.
Cette aide facilitera la mobilité des jeunes à l’échelle du continent, par exemple en renforçant les programmes d’échanges entre universités africaines et en améliorant la reconnaissance des qualifications et l’harmonisation de l’enseignement supérieur en Afrique», détaille le document. L’objectif de l’UE c’est de contribuer à faciliter la mobilité continentale des jeunes. A travers le renforcement des programmes d’échange entre les universités africaines, l’amélioration de la reconnaissance des qualifications et l’harmonisation de l’enseignement supérieur en Afrique.
Environ 122 universités dans 39 pays africains ont été impliquées dans les «partenariats de mobilité académique intra-ACP et intra-Afrique». En Afrique, ces partenariats ont facilité le mouvement interuniversitaire à 2 500 chercheurs et membres du personnel académique. Le programme Erasmus de l’UE a, quant à lui, permis aux chercheurs africains de bénéficier de son offre scientifique. Jusqu’en 2017, plus de 2 000 étudiants à travers l’Afrique ont reçu des bourses pour les cours Erasmus Mundus.
Parmi eux, plus de 120 boursiers africains ont participé aux doctorats communs Erasmus Mundus et 230 ont été formé au parcours master. Entre 2014 et 2017, les programmes de mobilité Erasmus + ont soutenu 770 partenariats de mobilité. 9 700 étudiants et chercheurs africains en ont bénéficié pour un peu moins de 4 300 européens seulement. Plus de 195 000 Africains ont été inscrits dans l’enseignement supérieur en 2015.
Le soutien à l’éducation et à formation professionnelle est le premier concours européen au développement des savoirs avec une enveloppe de 1,34 milliard d’euros entre 2014 et 2020. En 25 ans (1990 – 2015), le taux net de scolarisation dans le primaire en Afrique subsaharienne est passé de 52% à 80%. Soit la plus forte augmentation dans le monde.
Grâce aux programmes de l’UE (entre 2015 et 2016), 190 000 enfants ont été scolarisés dans l’enseignement primaire et secondaire en Afrique subsaharienne. En matière de formation professionnelle, 53.560 personnes en Afrique ont bénéficié de programmes de développement des compétences et d’autres programmes actifs du marché du travail. Pour l’encadrement, 15.400 enseignants ont été formés grâce aux initiatives financées par l’UE.
II- Le dispositif africain
Dans sa Stratégie de la science, la technologie et de l’innovation pour l’Afrique (STISA-2024), l’UA souligne l’importance de la «transformation des universités en centres d’excellence, comme en témoigne l’Université panafricaine». La stratégie est bâtie sur 6 domaines prioritaires : la sécurité alimentaire et nutritionnelle, la prévention et lutte contre les maladies, la mobilité physique et intellectuelle, la protection de l’espace environnemental, le vivre ensemble et la construction de l’identité africaine, ma création des richesses.
L’union africaine envisage la mise sur pied des réseaux nationaux pour la recherche et l’éducation. Ceux-ci se chargeront de faciliter la collaboration coordonnée entre les institutions d’enseignement et de recherche à l’échelle régionale puis continentale par la convergence des curricula et domaines de recherche afin de réaliser l’interconnexion des écosystèmes de la recherche et de l’innovation.
Un Fonds africain pour la science, la technologie et l’innovation (ASTIF) sera constitué comme instrument financier panafricain. Il sera alimenté par un mécanisme national où les Etats doivent allouer au moins 1% de leur PIB à la recherche et l’innovation. Au niveau régional, les communautés économiques régionales (CER) mettront sur pied des fonds régionaux servant à financer les centres d’excellence régionaux, la collaboration transfrontalière en matière de recherche et d’innovation.
Ces fonds permettront d’exécuter les initiatives régionales, de renforcer l’impact des initiatives nationales des États membres des CER et de veiller de manière générale au développement durable. Université Pan Africaine est un réseau continental d’université dont la mission est de fournir un enseignement de troisième cycle dans 4 campus (Cameroun, Nigéria, Kenya, Algéries).
III- Le contexte
Le programme panafricain est le tout premier programme de l’UE en matière de développement et de coopération qui concerne l’Afrique dans son ensemble. Il a été adopté en 2014 pour un budget total de 845 millions d’euros et constitue l’instrument financier spécialisé pour soutenir le partenariat Afrique-UE. La première phase du programme (2014-2017) a contribué à avancer sur la mise en œuvre du système des droits de l’homme de l’UA.
À l’occasion de cette neuvième rencontre, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a déclaré: «nous nous sommes réunis aujourd’hui afin de passer des paroles aux actes, afin de traduire nos engagements en mesures concrètes. Nous avons lancé des programmes pour un montant de 400 millions d’euros pour soutenir, entre autres, la jeunesse africaine — cette priorité est d’autant plus importante sachant que 60 % de la population africaine a moins de 25 ans. L’avenir du monde dépend de la bonne coopération entre l’Europe et l’Afrique».
Le président de la commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, a ajouté: «le multilatéralisme est la seule réponse aux défis mondiaux d’aujourd’hui dans un monde de plus en plus polarisé. Le partenariat UA-UE est fondé sur des valeurs communes et des responsabilités partagées; il offre une plate-forme unique pour faire face aux défis communs liés à la paix, à la sécurité et au développement durable sur nos deux continents».
Zacharie Roger Mbarga