Conjoncture : Les sociétés d’État forcées de quitter le « sein »

Tétanisé par plusieurs crises, l’exécutif exige des entreprises publiques de « se débrouiller » et ne plus rester à l’écart de l’opération de renflouement de ses caisses.

 

Louis-Paul Motaze, le ministre des Finances interpelle les sociétés d’Etats à plus de performance 

 En plus de la crise sécuritaire dans les régions de l’Extrême-Nord et de l’Est, des violences dans le Sud-Ouest et le Nord-Ouest), le Cameroun est devenu « l’épicentre de la Covid-19 en Afrique centrale », selon la formule de Savina Ammassari, la directrice pays de l’ONUSIDA pour le Cameroun. Manifestement surpris par un contexte inédit avec des pans entiers de l’économie en grandes difficultés, les pouvoirs publics peinent encore à décrire l’ampleur la récession engendrée par la pandémie. Dans ses caisses, pas de bonnes nouvelles. On racle les fonds de tiroirs pour empêcher le collapse de l’économie. « Au moment où la quatrième année de la réforme est engagée, le contexte est bien plus rude que celui qui a avait présidé à sa mise en œuvre. En effet, il est projeté en 2020 une régression de 1,1%, avec une reprise lente en 2021. Cette prédiction induit une réduction des ressources financières, contraint à une plus grande discipline budgétaire et à l’efficacité de la dépense publique ; ce d’autant que le déficit budgétaire global devrait se détériorer en 2020 (-4,5 % du PIB) », expose Viviane Ondoua Biwole dans une analyse amorcée la semaine dernière.

Dans le Document de programmation économique et budgétaire (DPEB) à moyen terme 2021-2023, il est répété que l’État consacre des sommes astronomiques à soutenir les entreprises publiques. Et pour échapper aux conséquences fatales de cette pratique (maintenant considérée comme une dérive), l’exécutif entend réaligner les entreprises d’État aux exigences du résultat. « Sur la base d’un scénario où les projections les plus catastrophistes peuvent se donner libre cours, autant être plus directif :  l’État ne veut plus servir de béquille financière aux entreprises publiques et se prémunit pour que ce soit l’inverse », traduit Stéphane Wondja.

C’est tout le sens à donner aux propos de Louis-Paul Motaze le 5 juillet 2020 devant la Commission du budget de l’Assemblée nationale. « Les entreprises publiques peuvent faire l’objet de mesures susceptibles d’améliorer leur productivité et leur rentabilité, l’assainissement du portefeuille de ces dernières pouvant permettre à l’État d’augmenter les recettes budgétaires, d’améliorer ses performances sur le front de l’emploi et de booster l’activité économique dans les secteurs où elles interviennent».  En elle-même, la suggestion du ministre des Finances (Minfi) trahit l’une des grandes lignes du DPEB. 

Identifier celles des entreprises publiques dont le capital peut être ouvert au secteur privé dans la perspective de soulager le trésor public et d’accroitre leurs performances. S’agissant de la maitrise de l’endettement généré par les établissements et entreprises publics, les actions qui seront déployées au cours du triennat viseront la réduction des sollicitations en direction du budget de l’Etat de la part de ces structures porteuses de passifs conditionnels, en les amenant à s’orienter vers les prêts non souverains des partenaires au développement ou des banques privées.

Il sera surtout nécessaire d’améliorer l’information financière et de renforcer la surveillance de la gestion de ces entités, sur la base des innovations induites par la réforme en cours. Quant aux dettes existantes, dont les audits sont soit en cours, soit projetés, celles-ci seront progressivement apurées, à travers leur prise en compte dans les budgets de ces entités», peut-on y lire.

 Jean René Meva’a Amougou 

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