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Climat délétère : L’ordre des avocats renonce à l’hommage du Bâtonnier devant les juridictions

C’est en guise de protestation contre ce qu’il appelle  » la persécution des avocats « .

 

Alors que le Bâtonnier de l’ordre des avocats du Cameroun décédé en France entame cette semaine son dernier voyage sur terre, le barreau du Cameroun par l’entremise du conseil de l’ordre vient de prendre la décision de «renoncer aux hommages judiciaires initialement programmés sur les parvis de la cour d’appel du Littoral et de la Cour suprême du Cameroun du Bâtonnier Charles Tchakouté Patie pour les orienter en d’autres lieux plus accueillants pour les avocats, qui seront ultérieurement indiqués». C’est l’une des articulations de la résolution prise à l’issue de la session extraordinaire du barreau convoquée par Mme le Bâtonnier par intérim Claire Atangana Bikouna le 21 novembre 2020.

Par la même occasion, le conseil de l’ordre «suspend sur l’étendue du territoire national le port de la robe du 30 novembre au 4 décembre 2020 pour tous les avocats». Le conseil de l’ordre «suspend, également, jusqu’à nouvel avis pour tous les avocats, toute intervention devant les juridictions statuant en matière criminelle, à tous les degrés de juridiction y compris la Cour suprême, le Tribunal criminel spécial, et les juridictions statuant en matière de contentieux électoral, le Conseil constitutionnel inclus». Il motive cette posture non seulement par ce qu’il appelle les «brutalités policières perpétrées le 10 novembre 2020 sur des avocats dans la salle d’audience du tribunal de première instance de Douala-Bonanjo».

Mais aussi et surtout, «les avocats Tamfu Ngarka Tristel Richard et Tchuenmegne Kenmegne Armel exerçant dans la ville de Douala, témoins des dites brutalités, ont été, sans convocation préalable ni mandat, appréhendés à l’avantage de guet-apens tendus par des éléments de la division régionale de la police judiciaire du Littoral pour y répondre à leur tour des incriminations d’outrage à magistrat, destruction et commentaires tendancieux sur une affaire en cours, puis gardés à vue du 18 au 20 novembre 2020, date à laquelle ils ont été déférés devant le procureur de la République et placés sous mandat de détention provisoire, puis notifiés de la date de leur première audience de flagrant délit le 23 novembre 2020 devant le tribunal de première instance de Douala-Bonanjo statuant en matière correctionnelle».

Dans cette résolution le conseil de l’ordre fait savoir que «des éléments de l’enquête les concernant, il ressort que le procureur de la République près le tribunal de première instance de Douala-Bonanjo a instruit l’interpellation d’un total de quinze avocats tantôt victimes, tantôt témoins de la barbarie du 10 novembre 2020 et la mise en détention des deux premiers ne permet désormais aucune spéculation sur le sort des treize autres recherchés, mettant à jour un programme de persécution des avocats par l’utilisation des moyens de l’appareil judiciaire et de certains magistrats ouvertement déterminés, étape suprême succédant à la précédente qui aura consisté à les mépriser et à compliquer leur exercice professionnel à tous stades, quoiqu’auxiliaires de justice» .

Pour le conseil, il s’agit à l’évidence d’une «persécution programmée des avocats transformés en délinquants». Néanmoins, le conseil de l’ordre invite les avocats à observer plus que par le passé, une attitude de prudence, de calme et de vigilance, en se  dominant pour ne point céder, ni à la provocation, ni à la confrontation violente, au risque de tomber dans des pièges multiples tendus pour affaiblir la corporation à un moment non anodin où le barreau, orphelin de son Bâtonnier s’apprête à lui rendre hommage. Il se réserve le droit de convoquer une assemblée générale extraordinaire en «signe de protestation et jusqu’à ce qu’il soit mis fin à cette véritable cabale par la libération de tous les avocats détenus d’une part et d’autre part dans le but de redorer le blason de la profession ainsi souillé». C’est dire si l’avenir s’annonce riche en rebondissements dans le milieu judiciaire. D’où l’urgence et la nécessité de l’intervention du Garde des sceaux pour ramener la paix et la sérénité dans le secteur

Bobo Ousmanou

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