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Chancelleries étrangères au Cameroun : Finie la diplomatie des «monstres froids»

Depuis le discours présidentiel annonçant un grand dialogue national, des analystes observent un silence radio dans certaines ambassades à Yaoundé.

Peter Henry Barlerin, l’ambassadeur des États-Unis à Yaoundé

Dans la crise anglophone, un sillon semblait tracé: dénoncer systématiquement tout ce qui est hors normes sur le terrain. Certains diplomates accrédités au Cameroun s’étaient faits forts de ne plus manier la langue de bois et d’en finir avec les ronds de jambe verbeux. En mai 2018, cela s’était vu avec éclat avec les sorties de Peter Henry Barlerin, l’ambassadeur des États-Unis à Yaoundé. Dans un communiqué de presse publié sur le site de l’ambassade américaine en ces temps-là, le représentant du pays de l’Oncle Sam dénonçait, à coups de trompette, une «politique d’assassinats ciblés», d’«arrestations sans accès à un avocat, à la famille ou à la Croix-Rouge» et l’existence de «villages incendiés et pillés par le gouvernement dans la zone anglophone».

De son côté, Catherine Ray, porte-parole du Service extérieur de l’Union européenne fulminait: «Le recours à la violence ne peut permettre d’atteindre des objectifs politiques. Il reste essentiel que les forces de sécurité fassent un usage proportionné de la force dans l’exercice de leurs fonctions».

Regards
Et voici le dialogue national inclusif annoncé. Aucune réaction. Aucun commentaire. Les grands principes défendus semblent voués à l’oubli. Dans cette ambiance de silence constaté, le Dr Jules Edmond Fouda analyse. Dans son exposé fait le 14 septembre 2019 à Yaoundé, l’enseignant-chercheur à l’Université de Yaoundé II fait le procès de ce qu’il appelle «la diplomatie des monstres froids». «Avec la mise sous surveillance des stratégies du gouvernement camerounais et la minorisation du poids des mobilisations sécessionnistes, cette démarche diplomatique cherchait à imposer un seul regard à l’opinion publique internationale», a-t-il énoncé au cours d’un café-débat sur le thème «Démocratie et participation citoyenne».

Plus nuancé, le Pr Belinga Zambo estime qu’«au-delà les flonflons de l’annonce du dialogue par Paul Biya, un dilemme a germé dans la rhétorique diplomatique actuelle». Et le politologue de poursuivre: «Parce que dans son discours, le président de la République a évoqué la main de certains pays dans l’enlisement de la crise anglophone, cette rhétorique est tiraillée entre l’envie de leur jeter une bouée de sauvetage dans une mer déchaînée et celle d’attendre de voir comment il va s’en tirer, livré à lui-même».

 

Ongoung Zong Bella

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