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Ce qu’il disait hier et ce qu’il dit aujourd’hui

En 2010, il préconisait la rupture avec la France puisqu’il invitait les Africains qui « cherchent à inventer leur futur à oublier la France, à ne pas lui reconnaître plus de pouvoir qu’elle n’en dispose vraiment, à regarder ailleurs » (cf. « Télérama » du 9 octobre 2010). Fanon l’avait déjà dit et de fort belle manière en 1961 dans « Les Damnés de la terre ». Je me demande si Mbembe n’a pas piqué cette idée au philosophe et psychiatre martiniquais.
Le 30 avril 2023, sur Nouvelle chaîne ivoirienne (NCI), on l’a entendu soutenir qu’il serait « difficile de dire que la relation entre la France et ses ex-colonies n’a servi à rien et ne sert plus à rien ». Il prétend que la France a posé des gestes qui montrent qu’elle a changé (restitution des objets d’art volés au Bénin pendant la colonisation, rencontre entre Macron et un groupe de jeunes africains à Montpellier en octobre 2021, fin du dépôt des réserves de change en France, etc.).
Moi, je ne vois aucun changement dans le comportement des dirigeants français. Car, de Sarkozy à Macron, ce que nous observons, c’est toujours le non-respect des promesses faites, l’arrogance, le mépris, le pillage des matières premières sans aucune contrepartie pour les populations africaines, le deux poids, deux mesures, le soutien à des satrapes incompétents et cruels, le maintien des bases militaires françaises dans certains pays africains, l’ingérence de la France dans des affaires qui ne la concernent en rien comme l’élection présidentielle ivoirienne de 2010.
Que s’est-il passé pour qu’il se mette à vanter les mérites d’un pays qu’il clouait au pilori hier ? Pourquoi a-t-il retourné sa veste ? Parce qu’on lui a offert 50 millions d’euros pour lancer une fondation sur la démocratie au moment où de plus en plus de Français admettent que cette dernière est morte chez eux et qu’elle a été remplacée par une oligarchie dont le but inavoué est de faire disparaître l’État.
Il semble que, « quand l’argent parle, la vérité se tait ». N’y sommes-nous pas ? Quoi qu’il en soit, nous avons ici le comportement des pseudo-intellectuels dont l’ambition, au dire de Fabien Eboussi Boulaga, un vrai intellectuel, n’est ni de libérer ni de défendre ni de faire respecter l’Afrique mais « d’entrer dans les circuits où se stockent et se redistribuent les biens rares, les honneurs et les plaisirs » (« Lignes de résistance », Yaoundé, Clé, 1999).
Achille Mbembe m’inspire un profond dégoût. Il fait honte au Cameroun de Ruben Um Nyobè et de Mongo Beti qui n’étaient ni opportunistes ni cupides.
Jean-Claude Djéréké

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